Annales des Mines (1879, série 7, volume 8, partie administrative) [Image 20]

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discuté par mon honorable contradicteur. Mais je m'étonne vraiment qu'au point où est arrivée la discussion, M. le rapporteur de la commission n'ait pas cru que mon amendement méritât au moins les honneurs d'une prise en considération. Car, remarquezle bien, s'il s'agissait de voter ferme mon amendement, je serais entré dans beaucoup plus de développements que je ne l'ai fait tout à l'heure. En ce moment, qu'est-ce que je demande? Je demande qu'une question des plus graves, des plus sérieuses, soitmûrement examinée, mûrement étudiée, par la commission d'abord, par le Sénat ensuite. Et dans quelles conditions la commission, par son rapporteur, s'oppose-t-elle à la prise en considération de mon amendement? Je le dis avec regret, mais il faut bien que je le dise, c'est lorsqu'une loi aussi délicate n'a encore en réalité subi aujourd'hui qu'une seule lecture sérieuse. Je fais appel à vos souvenirs. Quand la question a été présentée pour la première fois, il y a eu une lecture, c'est vrai, mais une lecture dans ie bruit, sans discussion, une lecture sans amendement . -. . . . . ........... ...... Ce que je viens vous demander, c'est que la commission examine, que le Sénat réfléchfsse. que tout le monde étudie une question des plus considérables et des plus délicates. Je n'impose pas mon amendement; je crois qu'on peut 'le modifier, mais je crois aussi que, puisque nous sommes d'accord avec la commission et le gouvernement sur bien dos points, on peut me donner une certaine satisfaction sur d'autres. Voulez-vous deux exemples de la 'nécessité d'une discussion dans le sein de la commission ? J'ai écouté le plus religieusement possible l'honorable M. Paris dans les développements qu'il vient de donner à la léponse qu'il a faite à mon amendement; qu'il me permette de lui dire que je crois avoir reconnu deux erreurs dans sa discussion. Si l'honorable M. Paris, bien plus compétent que moi en ces matières, a pu commettre deux erreurs, n'est-il pas indispensable que la commission tout entière examine de nouveau afin de savoir si elle s'associe à son rapporteur pour me combattre? Quand j'aurai tort devant M. le rapporteur, devant le gouvernement,devant la commission, je pourrai consentir à avoir tort devant le Sénat. Pour le moment, je ne demande qu'une chose, c'est qu'on examine et qu'on étudie. Si j'ai bien compris les objections de l'honorable M. Paris, il disait : mais il n'y a aucune espèce d'inconvénient à substituer les 5o mètres de protection aux 100 mètres qui étaient prescrits au-

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trefois, car, si l'exploitant de la mine se rapproche de l'habitation, de la propriété qui se trouve protégée par la zone protectrice, immédiatement, s'il cause au propriétaire riverain un préjudice, il pourra intervenir, en faveur de ce propriétaire, une condamnation qui ne sera pas seulement une condamnation en réparation du préjudice à lui causé directement, mais aussi une indemnité pour moins-val ue de sa propriété. J'en demande bien pardon à l'honorable M. Paris; mais, si vous introduisez dans les termes de la loi ce principe que l'exploitant d'une mine a le droit de se rapprocher à 5o mètres de la propriété voisine pour ouvrir une galerie ou un puits, on usera de cette faculté et l'on causera tous les préjudices moraux possibles à cette propriété; et, lorsque le propriétaire soi-disant protégé voudra faire un procès, la loi à la main, l'exploitant de la mine lui répondra : là feci, sed jure feci, et le propriétaire riverain sera débouté. Par conséquent, vous le voyez, aucune espèce de dommagesintérêts! C'est un principe de droit incontestable, et que pas un juriste dans cette enceinte ne voudrait contester. M. LE RAPPORTEUR. — Il s'est produit une confusion dans votre esprit, mon cher collègue; vous avez supposé tout à l'heure que le propriétaire avait bâti sur son terrain à 100 mètres de sa limite pour s'assurer une protection qui durât toujours. M.BERNARD. •- Mais non! M. LE RAPPORTEUR. — C'est là l'hypothèse dans laquelle vous vous êtes placé et dans laquelle vous avez raisonné. M. BERNARD. — S'il en est ainsi, je retire ma critique. M. LE .RAPPORTEUR. — Je n'attendais pas moins d'un esprit aussi judicieux que le vôtre. M. BERNARD. — Je voulais parler d'un propriétaire qui construit à 100 mètres des propriétés voisines, qui se croit protégé par un rayon de 100 mètres et qui, dans cette hypothèse, a élevé une construction plus ou moins coûteuse; je dis alors que, si vous rapprochez la limite de 5o mètres, il pourra arriver notamment, — car je n'ai pas à énumérer tous les inconvénients qui peuvent en résulter pour le propriétaire, — il pourra arriver, dis-je, que telle maison, qui valait ooo.ooo ou Zioo.ooo francs, n'aura plus qu'une valeur de 5o.ooo francs, précisément par suite de ce rapprochement de la limite. C'est pour remédier à tous ces inconvénients, que j'ai proposé mon amendement. A ceci, l'honorable M. Paris répond : prenez-y garde! le remède est encore pire que le mal et, si l'on consulte les personnes intéressées, elles répondront qu'elles préfèrent de beaucoup le régime