Annales des Mines (1878, série 7, volume 7, partie administrative) [Image 185]

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teinte à des droits acquis? Tel est le premier point qu'avait à examiner votre commission. Le principe de la non-rétroactivité des lois, ainsi que l'a fait remarquer le rapport de la sous-commission de l'assemblée nationale, s'impose au juge bien plus qu'au législateur. Il ne peut créer un obstacle à une réforme législative commandée par un motif d'ordre public, spécialement en matière de servitude légale. Le législateur de 1810 nous a donné l'exemple; il s'est trouvé en présence d'une prohibition bien plus étendue : la loi de 1891 l'appliquait (article 25 du titre 1"1 à une distance de 200 toises. Comme il voulait développer en France l'industrie minière, la considération tirée de prétendus droits acquis ne l'a pas empêché de réduire les 200 toises à ioo mètres. Le développement naturel de l'industrie amène nécessairement des modifications dans les prohibitions de ce genre. Ainsi le décret du 25 janvier i865 (*) a restreint les conditions de distance d'établissement des appareils à vapeur par rapport aux maisons des tiers; de même le décret du 3i octobre 1866 sur les établissements insalubres a diminué les servitudes établies en faveur des propriétés avoisinantes. La commission, après avoir écarté l'objection tirée des droits acquis, a reconnu qu'il serait impossible, sans blesser les sentiments d'équité, de modifier l'article 11 dans l'intérêt des concessions futures et de laisser sous l'empire de la loi de 1810 les concessions déjà faites: les conditions d'infériorité de ces dernières seraient évidentes. L'égalité de traitement s'impose en pareille matière. A côté des inconvénients dont souffre le propriétaire de la surface, nous avons pensé aussi qu'il convenait de placer l'indemnité qu'il reçoit, en cas d'occupation, et surtout la plus-value que le fait seul de la découverte d'une mine donne à la contrée où l'exploitation s'opère. La révision de l'article 11 adoptée en principe, la commission a comparé la modification que la Belgique a introduite à ce sujet par la loi de i865 et le projet du gouvernement. D'après la loi belge, la zone de 100 mètres n'est affranchie d occu| ation que quand les terrains compris dans cette zone appanienni nt au même propriétaire que la maison d'habitation ou la clômre murée directement protégée contre les travaux extérieurs de la mine. La commission a pensé que le projet de loi soumis à l'examen du sénat offrait l'avantage de s'écarter beaucoup moins de la loi de 1810, telle qu'on l'interprète et qu'on l'applique universellement depuis l'arrêt

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Volume de i865, p. 48.

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de i85G; il réalise, par des moyens différents et qui nous semblent préférables, une réforme aussi libérale et plus efficace. Le projet de loi maintient, d'une manière absolue, la nécessité du consentement du propriétaire de la surface pour faire des son • dages, ouvrir des puits ou galeries, établir des machines, ateliers ou magasins dans les enclos murés, cours et jardins. Il conserve, autour des habitations et des terrains compris dans les clôtures murées qui en dépendent, une zone protectrice des jouissances domestiques, dans laquelle certains travaux ne pourront s'opérer sans le consentement des propriétaires de ces habitations. La règle ainsi posée est générale, absolue; elle s'applique aux habitations construites après la concession aussi bien qu'à celles dont l'existence est antérieure. La jurisprudence de la cour de cassation, sur ces deux points importants, est ainsi consacrée législativement. Mais les restrictions imposées à l'industrie minière subissent une triple modification, qui profitera à tous les concessionnaires de mines et qui réalisera, sans aggraver la servitude de la surface, les améliorations sollicitées par eux. Le rayon de 100 mètres est réduit à 5o. Il suffit à la protection que la loi de 1810 a voulu établir. En Autriche, la prohibition ne s'étend pas au delà de 37™,go; en Prusse, elle s'applique dans un rayon de 62".75. L'égalité de traitement qui existait entre toutes les clôtures murées, qu'elles fussent ou non attenantes aux habitations, est supprimée. La zone de 5o mètres ne sera respectée au delà des clôtures murées (cours, jardins, enclos) que quand elles dépendront d'une maison d'habitation. Les autres enclos, même murés, ne réclament pas la même sauvegarde à l'extérieur. Le projet n'assimile plus, en ce qui concerne la prohibition qu'il maintient dans le rayon de 5o mètres, l'établissement des machines, ateliers ou magasins, à l'ouverture des puits ou galeries. Ces derniers travaux devront seuls être autorisés; ils occasionnent un passage fréquent à partir de l'endroit où ils débouchent et constituent un voisinage assez incommode pour qu'on les tienne à distance. Il n'y a, au contraire, aucune raison de traiter les machines servant aux mines plus défavorablement que les appareils à vapeur employés par les autres industries; il suffit que les règlements généraux sur la matière soient observés par les concessionnaires de mines. Les ateliers de tous genres se réunissent librement sur tel ou tel point, même à l'intérieur des villes; les magasins servant au commerce de la houille s'y développent sans restriction aucune. N'est-ce pas pousser les choses à l'exagération que DÉCRETS,

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