Annales des Mines (1877, série 7, volume 6, partie administrative) [Image 166]

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travail des objets destinés à l'exportation, par des matières d même nature. Ce point reconnu, comme tout droit que la loi n'a pas déclar inaliénable peut être atiéné, l'industriel a pu céder ses pouvoir d'introduction, lorsqu'il ne lui convenait pas d'effectuer lui-mêm l'achat et la vente des matières importées. Quelle est maintenant la situation faite à l'industriel par Ja mi; en action de ce mécanisme? D'un côté, il a acheté sa matière première à l'intérieur, au pri. surélevé par l'effet des tarifs de douane ; mais, d'un autre côté, i a vendu ses pouvoirs d'introduction à un prix qui représente peu près l'écart entre le prix du marché intérieur et celui d marché extérieur; il a donc obtenu sa matière première au pri du marché général, comme l'industriel placé près de la frontiè et comme il l'eût obtenu à l'intérieur, si les tarifs de douan n'eussent pas fait obstacle au nivellement du prix entre le mar ché du dedans et celui du dehors. C'est ainsi que le vœu de la loi de 1806 a reçu une satisfactio générale et non -partielle, et que la moitié des exportateurs n' pas été mise hors la loi. 2" Les intérêts respectifs des différents groupes de producteurs. — C'est ici le côté le plus bruyant de la question, c'est aussi le plus obscur. Les producteurs de fonte, notamment ceux du nord-est et de l'est, se déclarent écrasés par la concurrence des produits du Luxembourg que le trafic des acquits-à-caution amène et laisse sur le marché. Quelques exploitants de hauts fourneaux dans le sudouest prétendent que leurs produits sont privés, par les facultés d'importation accordées aux exportateurs du centre, des débouchés qu'ils trouveraient dans cette région. Tous se plaignent que ce qu'ils appellent la prime d'exportation soit pris dans km poche, pour nous servir de leur expression. Déjà nous avons eu occasion de dire que ce qu'ils appellent une prime n'est à nos yeux qu'un dravvback. Or, dans notre opinion, il y a une corrélation naturelle entre les droits protecteurs sur des matières premières et les drawbacks. Lorsque, il y a trois ans, il a été question de taxer certaines matières premières non imposées à cette époque, personne, dans le gouvernement ni à l'Assemblée nationale, n'a mis en doute qu'un système de drawbacks ou d'importation temporaire ne dût être la conséquence de la mesure proposée, et la difficulté dérégler équitablement le chiffrée!» drawback a été l'une des objections qui ont fait échouer le projet,

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Le drawback, en effet, a toujours été considéré comme le correctif nécessaire des droits protecteurs qui surélèvent à l'intérieur le prix des matières premières. Le drawback ne prend rien dans la poche des producteurs protégés ; il leur enlèverait tout au plus une partie de la prime qu'ils perçoivent eux-mêmes sur les consommateurs; mais il est plus vrai de dire qu'il leur laisse l'approvisionnement intérieur et que, s'il paraît les priver de l'approvisionnement extérieur, c'est plutôt en apparence qu'en réalité, puisque ce marché leur échapperait, au moins en grande partie, par suite de la surélévation de leurs prix. Il est vrai que le trafic des acquits-à-caution laisse, sur les marchés voisins des frontières d'importation, une certaine quantité de produits étrangers, qui sont remplacés à l'exportation par des produits de provenance plus éloignée de cette frontière. Mais on répond que, si ces derniers produits ne pouvaient plus être exportés, ils reflueraient sur le marché voisin de la frontière et y produiraient les mêmes effets de concurrence que les produits étrangers. On ajoute que les conséquences seraient même plus fâcheuses pour les industriels qui produisent la fonte; car, dans l'état de choses actuel, non-seulement les exportateurs du centre ne leur font pas concurrence, mais ils achètent une partie de leurs produits et allègent le marché français d'une quantité égale à celle des déchets considérables résultant de leur fabrication, c'est par exagération, dit-on encore, que les producteurs de fonte se prétendent entièrement privés du bénéfice de la protection que le tarif des douanes leur accorde; car, d'une part, l'importation ne laisse sur leur marché qu'une quantité de produits très-inférieure à celle que réclame la consommation intérieure, et, (l'autre part, cette quantité même y arrive grevée du prix des acquits-à-caution, lequel, avec les frais et les bénéfices, représente à peu près l'écart entre le prix de l'étranger et celui de l'intérieur. Quand le prix des acquits est élevé, il représente une protection considérable ; quand il est bas, c'est que la protection du tarif est excessive. Quoiqu'il en soit, on pourrait soutenir que les consommateurs seuls auraient qualité pour se plaindre de tout ce régime, mais que les industriels qui profitent de la protection et surtout ceux qui la réclament le plus vivement, en raison de leur situation voisine de la frontière, ne sont pas recevables à décliner les conséquences du système, en demandant la suppression des drawbacks. Les producteurs de fonte invoquent encore, pour combattre la faculté de substitution, l'impossibilité qu'il y aurait, dans l'état