Annales des Mines (1870, série 6, volume 9, partie administrative) [Image 136]

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ENQUÊTE OFFICIELLE SUE LA CONDITION DES OUVRIERS

atteint le taux des loyers ordinaires, avec cette différence pourtant que la maison est mieux entretenue et plus1 propre. Les ouvrière métallurgistes, qui sont mieux rétribués et se considèrent comme d'un rang supérieur, se montrent aussi plus exigeants et payent dfe 12 à i5 francs par mois un logement plus confortable. L'intérêt des capitaux immobilisés par les compagnies dans ces constructions varie de: %hk p.. 100.. Pour les maisons, attenant aux usines; il dépasse fréquemment ce taux et peut s'élever à 6 p. 100. Au dehors, les maisons qui sont louées par des propriétaires étrangers, aux célibataires pour 6 ou 8 francs par mois, aux familles d'ouvriers pour io à i5 francs, comprennent presque toujours une ou deux pièces au rez-de-chaussée et autant à l'étage, quelquefois une cave, rarement un petit jardin. En général, les pièces sont étroites, incommodes, mal aérées, malsaines : « De même quecetrx qui les habitent,—dit l'ingénieur de Charleroi,—ces maisons sont loin.de briller par l'ordre et la propreté. D'ailleurs,, ce qui se passe aux environs des sièges d'extraction n'est pas do nature à leur en inspirer le goût; car,, s'il est une industrie où l'ordre fait défaut, c'est bien l'industrie charbonnière. Cela provient, sans doute, de ce qu'elle a pris naissance dans la classe ouvrière, pour arriver ensuite dans, les régions supérieures de l'industrie, sans toutefois se dépouiller d'une routine qu'il faudra longtemps pour extirper. A l'école des porions, c'est un point sur lequel j'insiste constamment, parce que ce désordre est une source continuelle de pertes, en même temps qu'une tentation pour le vol, vers lequel celui qui n'a rien n'est malheureusement que trop porté, surtout avec les idées qu'on cherche à lui inspirer aujourd'hui au sujet de la propriété, u « Ce qui, d'après des personnes compétentes, laisse le plus à désirer,—dil encore l'ingénieur principal de lions, — c'est l'ameublement, si l'on peut appeler de ce nom le peu qui garnit certaines habitations. Il y a plus d'aisance dans le couchant : là, à Dour principalement, se; trouve un assez grand nombre de petits propriétaires; l'esprit de la classe ouvrière v est, du reste, beaucoup meilleur. Tandis que, dans les communes du Borinage avoisinant Mons, les grèves ont passé,si je puis m'exprimer ainsi, à l'état d'institution permanente, — vers Dour, nous n'en voyons que de rares exomples, qui sont le plus souvent le contre-coup de colles des communes plus rapprochées de Mons. 11 est juste de dire que, dans les fosses à charbon gras de Dour, l'extraction est plus régulière, le salaire moins soumis à des fluctuations et le nombre d'ouvriers occupés moins variable : « Celte question des grèves m'amène à parler de l'influence qu'ont sur elles les maisons ouvrières. « Dans le premier arrondissement des mines, dit le formulaire, la société du Grand-Hornu, qui possède un grand nombre de maisons, ne craint pas les coalitions, malgré le voisinage de charbonnages où, pendant longtemps, lé? grèves se sont reproduites périodiquement. »

DANS LES MINES ET USINES DE BELGIQUE.

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«le crois aussi que la considération de son lipgement retient l'ouvrier par une certaine crainte. Aussi, je comprends que les sociétés charbonnières tiennent à réserver les maisons qu'elles possèdent à leurs seuls ouvriers; mais il nés faudrait pas non plus (le formulaire en fait, du reste, la réserve: tirer des conséquences trop absolues de coïncidences qui peuvent tenir à beaucoup d'autres causes « Dans la plupart des grèves qui se sont produites dans le Borinage, sous l'influence d'excitations extérieures, les ouvriers étaient arrêtés sur les chemins qui conduisaient à leurs travaux; les maisons d'ouvriers sises à proximité des fosses ont le grand avantage de soustraire leurs habitants à ces influences fâcheuses.- » Il y a là pour l'industrie un intérêt de premier ordre, qui commence à stimuler le zèle de quelques compagnies et « semble aujourd'hui les faire entrer dans une voie plus philanthropique » : « Déjà la société de la, Vieille-Montagne, à son établissement de Moresnet, et la Société charbonnière de Wandre ont réalisé, dans une certaine mesure, ce qui a été fait à Mulhouse, en construisant des habitations saines, commodes, agréables, et en donnant à l'ouvrier la possibilité d'en devenir propriétaire (*). »

La société de Couillet (Charleroi) a donné le même exemple. » Celle de Monceau-Martinet (centre du ïïainaut) a fait bâtir des maisons; ais elle a trouvé préférable de laisser ces constructions à l'initiative de l'ouvrier, en l'y engageant au moyen de primes et d'avances de fonds qui lui sont faites sans intérêts Ces primes étaient de 200 francs par maison, plus une avance de même somme sans intérêt, remboursable par 10 francs et par quinaine... Plus de 5o maisons d'ouvriers ont été construites, dans ces conditions, depuis 1854. « La société a aussi loué 146 maisons dans la même localité. Elle sous-loue, sans bénéficier sur l'ouvrier; faisant même un sacrifice, quand ce prix de location, qui ne dépasse jamais 8 francs par mois, lui paraît un peu élevé. Cette location est retenue à l'ouvrier sur chaque quinzaine, de manière qu'il s'aperçoit peu ou beaucoup moins de cette charge que s'il devait, tous les deux ou trois mois, réunir une somme de 24 a 25. francs. De cette manière, le propriétaire des maisons est assuré d'un payement régulier, ce qui diminue le prix de la location. D'autre part, la société a plus d'action que l'ouvrier auprès du propriétaire pour obtenir les réparations et les améliorations à faire aux maisons (*"). » « Une autre question, qui appelle également la sollicitude des industriels,

(*) Rapport de M. l'ingénieur en chef Rucloux. (**) Rapport de l'ingénieur principal du Centre du Hninaut.