Annales des Mines (1853, série 5, volume 2, partie administrative) [Image 51]

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NOTICE

NÉCROLOGIQUE

pour produire un grand nombre de cristaux naturels qui ne l'avaient jamais été auparavant dans les laboratoires. Ebelmen commença ses recherches*par la reproduction d'une grande famille de minéraux isomorphes entre eux (à l'exception de la cymophane) cristallisant généralement en octaèdres réguliers et qui sont formés par la combinaison d'un sesquioxyde et d'un protoxyde équivalent à équivalent. Le spinelle blanc, le spinelle rose, le spinelle noir, le fer chromé natif, qui tous cristallisent en octaèdres, furent reproduits, ainsi que la cymophane qui affecte la forme du prisme rhomboïdal droit. Il obtint l'émeraude en cristaux hexagones incolores ou verts; le péridot en longs prismes à six faces, biselés. En se servant du borax comme dissolvant, il réussit à obtenir le corindon hyalin en tables hexagonales. De plus, dans le cours de ses recherches, il prépara des corps isomorphes avec les précédents et qui n'ont pas encore été rencontrés dans la nature, l'aluminate de cobalt, celui de manganèse, des chromites de. fer, de magnésie, de manganèse cristallisés tous en octaèdres, des aluminates de baryte et de chaux. Tous ces minéraux obtenus par la synthèse ont été soumis à l'analyse chimique, aux observations cristallographiques et physiques les plus minutieuses, et leur identité avec les minéraux naturels est sortie victorieusement de toutes ces épreuves ; ils ont même composition chimique5 même densité, même forme cristalline, même dureté, mêmes propriétés optiques. — « Ce sujet, dit » Ebelmen à la fin de son premier mémoire, n'est encore » qu'effleuré ; il comporte une longue série de recherches. J'ai » l'espoir que cette méthode enrichira la chimie de la voie » sèche d'un grand nombre de nouvelles combinaisons. Les » expériences déjà exécutées permettent de classer définitive» ment au nombre des produits chimiques une grande quantité » de minéraux dont plusieurs sont des pierres rares et pré» cieuses. Elles établissent un lien de plus entre deux sciences, » la chimie et la minéralogie, dont les points de contact sont » déjà si nombreux. Elles ne seront pas inutiles, je l'espère du » moins, pour éclairer le géologue dans l'appréciation des » causes qui ont présidé à la formation de telle ou telle espèce

SUR

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EBELMEN.

«minérale. En montrant en effet que ces espèces, compléte» ment infusibles à la température de nos fourneaux, ont pu » cristalliser à la faveur d'un dissolvant, à des températures de » beaucoup inférieures à celle de leur fusion, on peut rendre » raison de leur présence dans beaucoup de roches où elles » sont associées à des espèces d'une fusibilité bien différente. » Je ne prétends nullement que l'acide borique ou les borates » aient été dans tous les cas le véhicule naturel qui a servi à » opérer la cristallisation de ces espèces ; mais je ne puis pourtant m'empêcher de faire remarquer qu'il existe des localités » où l'acide borique se dégage du sein de la terre entraîné par » des courants de gaz et de vapeur d'eau portés à de très-hautes » températures. Chacun connaît les lagoni de la Toscane qui » fournissait annuellement au commerce plus de 5oo.ooo kilo» grammes d'acide borique. Ces dégagements d'acide borique » sont en liaison évidente avec les phénomènes volcaniques. » L'intérieur du cratère de Fulcano a fourni même de l'acide » borique cristallisé. Des lacs contenant du borax en dissolu» tion existent sur la terre en un grand nombre de points, et » tout porte à croire que l'acide borique y a été amené par des » causes plus ou moins analogues à celles qui donnent nais» sance aux suffioni de la Toscane. » Il ne faut pas beaucoup de hardiesse d'esprit assurément » pour comparer ces grands phénomènes naturels à ce qui se » passe dans les expériences que j'ai décrites, et pour arriver à » admettre que le dégagement continu de l'acide borique sous » l'influence d'un courant de gaz et de vapeur d'eau est accom» pagné delà formation, dans l'intérieur delà terre, d'espèces » minérales cristallisées, que des soulèvements du sol amène» ront peut-être un jour près de la surface. Je n'insisterai pas » davantage sur ce point de vue, qui était, du reste, une con» séquence toute naturelle des résultats de mon travail. » Je terminerai ce mémoire en examinant s'il est permis » d'espérer qu'on arrivera à reproduire les pierres fines dont » je me suis occupé, comme le spinelle, le cymophane, le co» rindon, sous un volume assez notable pour qu'on puisse en » tirer parti. Je ferai remarquer que toutes mes expériences LOIS ET

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DÉCRETS

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