Annales des Mines (1914, série 11, volume 5) [Image 111]

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ADGUSTE MICHEL-LÉVY

dés d'examen microscopique qu'il avait importés en France et puissamment contribué à développer pour classer les roches d'après leur âge. Logiquement, cet âge devait présenter avec leur structure une relation qu'Elie de Beaumont et Grimer avaient déjà pressentie et sur laquelle Elie de Beaumont avait attiré l'attention par des aperçus géniaux, comme il l'a fait pour l'âge des plissements montagneux et celui des gisements métallifères, mais que les moyens d'étude dont il disposait ne lui avaient pas permis de préciser. Etudiant au microscope la série des roches éruptives anciennes, MichelLévy s'est appliqué à déterminer quel âge correspondait aux divers types de structures et à en formuler la loi. A cet égard, il lui est arrivé d'abord ce qui arrive presque fatalement aux novateurs, ce qui était arrivé à Elie de Beaumont lui-même pour les systèmes montagneux. Partout dans le domaine des sciences naturelles, on ne saurait approcher de la vérité autrement que par approximations successives et, même en physique ou en chimie, on a vu les premières lois trop simples, dans lesquelles on avait réussi à grouper un nombre d'observations insuffisantes, être ultérieurement remplacées par des lois plus compliquées, tenant compte de détails d'abord inaperçus. Il en sera ainsi jusqu'au jour, encore bien lointain, où toutes nos petites lois provisoires vien- . dront se fondre et se condenser dans la loi unique qui logiquement devrait résumer toute cette complexité des problèmes. En attendant ce futur problématique, nous nous apercevons sans cesse que l'intervention de quelque astre inconnu, de quelque Neptune insoupçonné, vient troubler les premiers calculs de nos orbites planétaires. L'ordre établi par Michel-Lévy, en 1875, dans la chronologie des roches acides anciennes, reste vrai dans son ensemble, en tant qu'ordre relatif. Nous continuons à admettre la même succession des granités, granulites

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(ou granités à mica blanca), micro-granulites (ou porphyres granitoïdes), porphyres pétrosiliceux et globulaires, porphyrites, etc., et l'on peut encore énoncer avec quelques rectrictions les deux propositions par lesquelles il concluait son étude : 1° Que la série des roches acides est continue et que leur nature n'a pas brusquement changé d'une période à une autre ; 2° Qu'il y a une relation intime entre la texture de ces roches et l'âge de leurs éruptions. Mais il ne paraît plus exact d'attribuer, comme il le faisait dans cette œuvre de jeunesse, à ces différences de structure, une valeur d'âge absolue, en supposant « que la nature chimique et la quantité des dissolvants et des minéralisateurs ont dû varier à mesure que le refroidissement du globe s'accentuait ». Nous ne considérons plus qu'un granité tertiaire, comme celui de l'île d'Elbe, doive nécessairement présenter une autre structure qu'un granité ancien. Nous admettons au contraire, et Michel-Lévy lui-même avait été conduit peu à peu à admettre de très nombreuses récurrences dans une série pétrographique qu'il avait commencé par croire unique. Dans la théorie actuelle, on attribue volontiers à des différences entre les conditions de cristallisation, où la profondeur notamment a joué un grand rôle, l'influence prépondérante, qui avait paru d'abord devoir être réservée au refroidissement progressif du globe. Mais, si quelques réserves sont aujourd'hui nécessaires pour cet ancien travail sur l'âge des roches, il faut, au contraire, applaudir sans restriction à la vision véritablement prophétique que Michel-Lévy a eue, dès 1877, sur l'origine des terrains dits cristallophylliens et sur la mise en place des granités. C'est en 1877 qu'il a fait voir le premier, en contradiction avec l'école allemande, comment se produisaient les gneiss granitiques et granulitiques.