Annales des Mines (1910, série 10, volume 18) [Image 87]

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EXPÉRIENCES SUR LES POUSSIÈRES

DE HOUILLE

suivant ce processus n'est certainement pas nulle ; l'expérimentation et la pratique des mines en témoignent ; mais elle est très faible. Il est rare que les nuages accidentellement soulevés dans la mine soient assez denses pour être inflammables; nous n'avons réussi d'inflammations par lampes et arcs électriques qu'avec des nuages très épais et tout à fait opaques. En second lieu, le volume du nuage créé, sauf circonstances très exceptionnelles, comme celles qui se rencontrèrent à Monongah, est au plus de quelques mètres cubes. Or, la vitesse initiale de propagation de la flamme, dans un nuage qui n'est pas soumis à de violents remous, est très faible ; les chasses d'air engendrées par la détente des gaz chauds ne prennent de vitesse, n'acquièrent la violence nécessaire à l'entretien du soulèvement et à la généralisation de l'explosion que si l'inflammation initiale a pu s'étendre à un grand volume de mélange inflammable, ce qui n'est généralement pas le cas. La production d'un coup de poussières est beaucoup plus aisée quand l'inflammation est obtenue par la détonation d'un explosif ou l'explosion d'une masse suffisante de mélange grisouteux inflammable. D'abord une explosion de ce genre provoque habituellement la formation immédiate d'un nuage beaucoup plus volumineux. En outre, le phénomène explosif initial crée dans le nuage de violents remous, qui accélèrent singulièrement la vitesse de propagation de la flamme. A l'effet des remous s'ajoute celui des accélérations dues à la même cause initiale ; si une niasse d'air poussiéreux est soumise à une accélération, les poussières, dont le poids spécifique est mille fois supérieur à celui de l'air ambiant, prennent, du fait de leur inertie, une vitesse différente de celle de l'air; or il est clair qu'un corps combustible brûle d'autant plus vite qu'il se déplace plus rapidement par rapport au milieu comburant.

ET SUR LES MOYENS DE COMBATTRE LEURS DANGERS

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Ces considérations permettent de comprendre avec quelle facilité l'on engendre un coup de poussières au moyen d'explosifs ou d'explosions de grisou. A ne considérer d'abord que l'emploi de l'explosif seul, certaines conditions doivent cependant être remplies. L'explosif doit produire deux effets, le soulèvement des poussières et leur inflammation. Si, chargé en trou de "mine suivant les règles de l'art, il «travaille bien», la presque totalité de la puissance disponible sous forme de travail mécanique est employée à mettre en mouvement des roches, qui prennent une vitesse d'autant plus faible que leur masse est plus considérable ; par suite l'air de la galerie est relativement peu ébranlé et les poussières sont mal soulevées ; en outre, il n'y a pas, ou presque pas d'effet extérieur de flamme ; s'il y en a quelque peu, la flamme est environnée des matériaux projetés; de toutes façons les chances d'inflammation sont minimes. Supposons, au contraire, que le coup débourre sans briser la roche, ou, pour pousser les choses à l'extrême, que l'explosif soit tiré au mortier d'acier, sans bourrage : toute la puissance disponible sous forme de travail mécanique est employée à mettre en mouvement l'air de la galerie ; en raison du faible poids spécifique de l'air, les accélérations et les vitesses prennent des valeurs élevées et les conditions sont aussi favorables que possible au soulèvement des poussières et à la propagation rapide de l'inflammation. En même temps, l'effet extérieur de flamme est favorisé et les chances d'inflammation sont grandes. Même dans ces conditions favorables, l'expérimentation montre que tous les explosifs ne donnent pas naissance aux coups de poussières avec une égale facilité ; ils se comportent, en effet, différemment, soit au point de vue delà mise en suspension' des poussières, soit au point de vue de leur inflammation.