Annales des Mines (1908, série 10, volume 13) [Image 165]

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textuellement, c'est que, en prenant comme chapitres du livre de la Terre les formations successives des diverses chaînes, on réalise la division la plus naturelle de ce livre, celle qui introduira la plus grande clarté et le plus bel ordre dans le récit. De cela Marcel Bertrand n'a jamais douté à partir de 1886, et il semble bien qu'il ait eu raison. Mais le moment n'est pas venu d'écrire le récit sans hésiter et d'un bout à l'autre, et de le comparer à la symbolique narration de Moïse. 11 y a trop de lacunes dans nos connaissances, surtout en ce qui concerne les vieilles chaînes, pour que nous ne soyons pas obligés de nous contenter, pendant longtemps encore, des formules générales, volontairementimprécises, que Marcel Bertrand nous a laissées. On sait comment il a été conduit à ces formules et comment l'étude des séries cristallophylliennes des Alpes françaises et des . Alpes du Piémont l'a convaincu de l'étroite relation entre le métamorphisme régional et les phénomènes orogéniques. A la vérité, il n'a pas été le premier à voir la pluralité de ces séries cristallines et à en fixer les âges relativement récents. D'autres, avant lui, avaient attribué au Permien, ou au Houiller, les micaschistes et les gneiss des Alpes Cottiennes ; un autre, et qui était Charles Lory, avait rapporté au Trias l'énorme complexe des Schistes lustrés. Mais Marcel Bertrand a. trouvé, pour ces démonstrations d'âge, des arguments nouveaux et décisifs; et, comme toujours, il a été, dans l'étude de ces terrains métamorphiques, un généralisateur puissant et hardi. C'est lui qui a montré l'extension jusqu'au Grand-Paradis, et même jusqu'au Mont-Rose, du Permo-Houiller cristallin de la Vanoise; lui aussi qui a fait voir que le faciès Schistes lustrés embrasse non seulement le Trias supérieur, comme avait dit Lory, mais aussi le Lias et peut-être d'autres terrains encore. La stratigraphie des Alpes franco-italiennes entre

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le massif d'Ambin et la vallée d'Aoste n'a guère eu besoin d'être perfectionnée depuis que Marcel Bertrand nous l'a décrite ; et cela est d'autant plus remarquable que notre manière de comprendre la tectonique de- cette région a dû être récemment changée de fond en comble. Une des dernières conceptions du Maître, restée inédite, mais que ses disciples n'ont pas oubliée, est celle de l'existence d'une loi de répartition des matières volatiles dans les couches de combustible d'un même bassin houiller. Il en parlait souvent comme d'une chose très importante; et il eût voulu que, dans tous les bassins, on s'occupât de chercher des arguments pour ou contre. La teneur du charbon en matières volatiles ne dépendrait que des conditions de la sédimentation : ce serait un caractère primaire, et non pas secondaire , de la couche de combustible. Si, dans chaque couche, on traçait les courbes d'égale teneur en matières volatiles, on aurait une série de lignes grossièrement concentriques, semblables aux lignes de niveau des bords d'une cuvette, et qui iraient s'ordonnaut autour d'une région centrale. On pourrait donc déterminer, par la construction de ces lignes, la position approximative de la région centrale de l'ancien fond du bassin, quelle qu'eût été la dislocation ultérieure, et alors même qu'il y aurait eu, dans le terrain houiller plissé, des plis couchés et des charriages. L'idée est assurément fort intéressante. Malheureusement, la vérification de sa justesse est très difficile. Dans beaucoup de . couches de houille, la teneur en matières volatiles ne change presque pas, et ses petites variations, ou bien sont de l'ordre des erreurs d'analyse, ou bien semblent capricieuses. Quand le bassin est très étendu — et c'est le cas du Pas-de-Calais — la teneur change beaucoup; mais une autre difficulté surgit alors, qui est celle de suivre une même couche d'une région à l'autre, au delà des hiatus que créent nécessairement les failles, les limites