Annales des Mines (1907, série 10, volume 11) [Image 142]

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RÉFORMES RÉCENTES DE LA LÉGISLATION FÉDÉRALE

NOTE SUR LES RÉFORMES RÉCENTES DE LA

LÉGISLATION FÉDÉRALE DES CHEMINS DE FER AUX ÉTATS-UNIS Par M. O. HENRY-GRÉ ARD, Ingénieur au Corps des Mines.

L'objet de cette note n'est pas d'exposer dans son détail la législation fédérale des chemins de fer aux ÉtatsUnis. Nous voudrions seulement marquer les différentes étapes du chemin parcouru depuis une vingtaine d'années, indiquer les tendances de la loi promulguée le 29 juin 1906 et préciser les questions délicates que soulèvera son application. L'on sait qu'aux États-Unis, pays confédéré, le droit de légiférer appartient à la fois aux législatures d'État et au Congrès fédéral. La Constitution de 1787 (avec ses amendements) définit la limite de chacun de ces pouvoirs et pose un certain nombre de principes que doit respecter toute loi nouvelle. Les Cours judiciaires fédérales et, à leur tète, la Cour suprême, doivent contrôler et maintenir cette conformité. C'est dans la Constitution de 1787 que le contrôle fédéral des chemins de fer trouve à la fois son fondement et ses limites. L'article 1 (section VIII) dit : « Le Congrès aura le droit de réglementer le commerce avec les pays étrangers et d'État à État. » Cette dévolution de pouvoir s'expliquait à la fin du XVIIP siècle par la crainte de voir s'élever entre les États des

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barrières menaçantes pour l'unité nationale. Pareil danger n'existe plus aujourd'hui ; et à la rigueur croissante de la réglementation fédérale une nouvelle justification doit être donnée. Les partis les plus conservateurs admettent que les transporteurs publics sont chargés d'un service d'intérêt général et, pour employer les expressions de la Cour suprême elle-même (*), que les compagnies de chemins do fer « remplissent en quelque mesure une fonction du gouvernement». Pourtant les chartes qui les créent, chartes d'État presque toujours, se bornent à établir leur existence légale, à indiquer les lignes nouvelles, à octroyer certains droits exceptionnels, comme celui d'expropriation. Il n'y est question ni de privilèges ni même de concession. Les subventions, en terres ou en argent, n'ont été accordées qu'aux entreprises d'intérêt national ou stratégique, comme 1' « Union Pacific » (**). Rien enfin ne limite la concurrence ; les lois récentes ne font que l'encourager. La doctrine ne semble pas moins établie que l'industrie des chemins de fer ne doit pas jouir d'une complète indépendance ; la liberté des contrats individuels ne saurait subsister ; l'importance économique, pour le pays, des questions de transport, la puissance des monopoles de fait que se sont assurés les compagnies, l'infériorité dans laquelle les trusts placent les petits producteurs, imposent l'application de tarifs raisonnables et uniformes. Maintenir cette équité et cette égalité de traitement est un devoir pour le Gouvernement fédéral, (*) Gouvernement fédéral contre «Joint Trafûc Association», 1898. (**) Une convention de 1862 accordait à 1' « Union Pacific » le droit d'émettre directement des obligations fédérales 6 p. 100 amortissables entrente ans, jusqu'à concurrence de 136.182.000 francs. Le service des intérêts et l'amortissement étaient à la charge du Trésor public, qui devait rentrer dans la totalité de ses avances par un prélèvement de ^ P- 100 sur les bénéfices nets. Ces bénéfices furent nuls dans les premières années. Une transaction en 1897 a remboursé au Gouvernement fédéral le capital et les intérêts simples, mais non. les intérêts composés.