Annales des Mines (1904, série 10, volume 6) [Image 282]

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BULLETIN

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tifier l'installation d'appareils coûteux afin d'assurer la dessiccation du vent.

Rappelons que la quantité de coke brûlé dans un haut fourneau n'est pas déterminée par le seul poids de la fonte produite. Suivant la qualité désirée, suivant la pureté et en particulier la teneur maxima en soufre admissible pour les applications ultérieures du métal, on marche en allure plus ou moins chaude. On peut ainsi, avec un même minerai, faire varier la consommation de coke par tonne de fonte de 800 kilogrammes par exemple à 1.200 kilogrammes, suivant que l'on marche en fonte d'affinage commune ou de moulage premier choix. Si l'emploi de l'air sec donne une fonte plus pure moins sulfureuse, il sera possible de marcher en allure plus froide sans tomber au-dessous de la qualité voulue. On aurait pu avec l'air humide brûler le même poids de combustible, mais on aurait eu une fonte trop impure et inutilisable. Dans cette hypothèse l'économie se trouverait donc justifiée, mais elle ne serait qu'une conséquence indirecte de la suppression de la vapeur d'eau. On ne pourrait donc pas en conclure, comme le fait l'auteur, que le même résultat doive être obtenu dans d'autres fabrications, comme celle de l'acier Bessemer, du cuivre, où les circonstances sont toutes différentes. Pour justifier cette interprétation, il faut maintenant montrer le rôle que l'humidité peut jouer dans la désulfuration plus ou moins complète du métal. Le soufre vient principalement du coke ; devant les tuyères il brûle en même temps que le charbon en donnant de l'acide sulfureux. Ce corps, en présence de l'oxyde de carbone, tend à se fixer sur la chaux en donnant du sulfure de calcium qui passe dans les laitiers. Les gaz sulfurés peuvent ainsi être absorbés en totalité sans avoir le temps d'arriver au contact du métal non encore fondu qui se trouve dans les parties plus élevées du haut fourneau. Le métal fondu traverse trop rapidement les régions les plus chaudes'pour pouvoir absorber la petite quantité de gaz sulfurés qu'il rencontre au voisinage des tuyères. Dans le cas, au contraire, où le gaz est humide ou simplement hydrogéné, l'absorption du soufre ne peut plus être complète à cause des phénomènes d'équilibre qui se produisent. Il reste dans la masse gazeuse une proportion d'hydrogène sulfuré d autant plus forte que cette masse est elle-même plus riche en composés hydrogénés, c'est-à-dire initialement plus humide. Ces gaz s'élèvent dans le haut fourneau et finissent par arriver au contact de l'éponge de fer très poreuse qui les absorbe. . C'est là une prévision qu'il est facile de soumettre au contrôle de l'expérience. Je l'ai fait de la façon suivante : du sulfure de calcium fut chauffé à la température de 600° dans un courant

(Extrait des Comptes Rendus de l'Académie des Sciences, séance du 28 novembre 1904.)

III. — Sur remploi de l'air sec dans les hauts fourneaux, par M. H. LE CHATELIEB , Ingénieur en chef des Mines, Professeur à l'Ecole supérieure des Mines. Depuis quelques semaines les journaux techniques étrangers sont remplis de l'annonce de la découverte de M. Gailey relative à l'emploi de l'air sec dans les hauts fourneaux; MM. Alfred Picard et Ch.-E. Heurteau ont entretenu, dans sa dernière séance, l'Académie de cette question : en employant de l'air desséché par refroidissement au-dessous de 0°, on réduirait de 20 p. 100 la consommation de coke au fourneau. Il y aurait là, si ces faits se vérifiaient, une véritable révolution économique dans l'industrie du fer. Bien des ingénieurs, il est vrai, se montrent assez sceptiques au sujet de l'exactitude des faits énoncés. Il peut être intéressant d'en discuter la possibilité au point de vue scientifique. L 'économie annoncée est attribuée à ce que la vapeur d'eau qui traverse le haut fourneau amène une dépense improductive de coke en se transformant en un mélange d'hydrogène et d'acide carbonique qui se dégage sans profit par le gueulard du haut fourneau. En outre, cette réaction absorbe une petite quantité de chaleur, qui devra être compensée par la combustion d'une quantité supplémentaire de coke. Cette perte et par suite l'économie qui peut être réalisée en enlevant à l'air une partie de son humidité peuvent être calculées rigoureusement. Dans les expériences en" question, la quantité de vapeur d'eau condensée dans la chambre de réfrigération représente une dizaine de grammes par mètre cube d'air. L'économie résultante peut être au maximum de S p. 100, soit le quart du chiffre annoncé. On peut donc affirmer en toute certitude, sinon que l'économie annoncée est inexacte, du moins que la cause qui lui est attribuée n'est pas la véritable. Il est du reste très fréquent de voiï des inventeurs partis d'une idée inexacte arriver néanmoins à des résultats intéressants. Cela pourrait bien être le cas actuel.