Annales des Mines (1903, série 10, volume 3) [Image 54]

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NOTES SUR LA THEORIE

lions. Je me suis élevé autrefois contre cette idée(*), et j'ai, à diverses reprises, soutenu l'opinion que le fait essentiel de tout volcanisme, de toute manifestation éruptive, si profonde qu'on puisse la supposer, était l'introduction d'eau superficielle, amenée par des dislocations connexes des plissements (**) : eau qui a pu contribuer, par les sels apportés et réduits (chlorures, sulfates, carbonates, etc.), à fournir desminéralisateurs, qui probablement aussi a trouvé au moins une partie de ceux-ci emprisonnés dans le magma profond et les a aidés ks'en dégager. Je suis déplus en plus convaincu que, parmi les éléments fondamentaux de ce magma profond, le carbone jouait un très grand rôle et qu'il en est résulté, par la dissociation de l'eau, des carbures d'hydrogène, plus ou moins brûlés en acide carbonique (***•). Cet acide carbonique sous pression, soit libre, soit associé avec les alcalis montés à la surface du bain liquide, me parait avoir été l'un des agents essentiels dans toutes les cristallisations déroches éruptives. Ce sont ces carbonates alcalins, qui ont permis la formation du quartz et du feldspath; c'est peut-être, le dégagement brusque de l'acide carbonique, qui a provoqué la prise en masse de certains gros filons de (*) Contribution des gîtes métallifères, p. 28..— Mon savant et aimable confrère, M. Vogt, en reproduisant ce passage pour le discuter, ne paraît pas avoir remarqué le dernier paragraphe, où j'explique notre désaccord, plutôt apparent que réel, par ce fait qu'il ne considère comme « minéralisateurs » que le chlore, le fluor et le bore, tandis que j'entends par le même mot «tous les corps dont les fumerolles volcaniques nous offrent le spécimen ». On verra plus loin que, les choses étant ainsi comprises, notre explication des faits est aujourd'hui tout à fait la même. (**) Il est possible qu'il y ail, en outre, de l'eau emprisonnée en profondeur et peut-être retenue par des bases, comme dans les expériences de M. A. Gautier ou dans la théorie d'Arrhénius, citée plus loin; mais les parties réellement profondes des magmas semblent absolument exemptes d'oxygène, ce qui ne laisse guère supposer qu'elles renferment non plus d'eau. (***) C'est probablement parce que le carbone a été le premier brûlé en présence de l'oxygène nécessaire pour la silicification des métaux qu'on en retrouve dès quantités si faibles dans les roches silicatées.

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quartz, etc., etc. Il est visible que les éléments carburés ont été, dès ce moment, accompagnés d'abondantes dissolutions salines (de chlorure de sodium), comme suffiraient à le montrer les inclusions liquides si abondantes dans tant de minéraux. On n'a peut-être pas besoin d'autre chose que de ces quelques éléments si simples et des dissolutions sulfurées qui les accompagnaient pour expliquer la plupart des phénomènes. M. Vogt est arrivé, dans son dernier travail, à une idée très analogue, en se fondant surtout sur un récent travail de M. Arrhénius sur « l'action chimique et physique de l'eau sur les magmas» (*). Il résulte de ce travail que l'eau, en profondeur et à haute température, agit comme un acide relativement fort pour se substituer à la silice et mettre en liberté des bases, qui, à la faveur de la mobilité donnée au magma par sa présence, se combinent en silicates avec la silice déplacée par la même réaction. A mesure que les roches montent et que la température faiblit, l'eau devient un acide de plus en plus faible : la silice l'expulse à son tour des hydrates ; il se produit alors de la vapeur d'eau, dont la pression augmente et finit par déterminer les explosions caractéristiques du volcanisme extérieur. M. Vogt laisse donc de côté tous les autres éléments des fumerolles, carbures, sulfures ou chlorures, pour chercher, dans 1 eau seule, l'élément fluide qui paraît bien nécessaire pour expliquer la mobilité des magmas. Quelle que soit, d'ailleurs, l'explication donnée pour le phénomène de différenciation, nous n'en avons pas moins, ( 1 mie façon certaine, dans tous les gabbros, une concentration de titane, comme de fer, avec les éléments ba(*) Geol. Foren. Forh., Stockholm, 1900. — Voir encore, sur ces queswns théoriques, outre les travaux de M. A. Gautier rappelés plus haut •■ OHOZEWICZ, Experimentelle Untersuchungen iiber die Bildung der ■ 'nerale im Magma [Tschermaks Min. petrogr. Mitth., t. XVIII, 1898).