Annales des Mines (1896, série 9, volume 10) [Image 18]

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APPLICATIONS GÉOLOGIQUES

DE LA SPÉLÉOLOGIE

s'est fait, ou se fait encore, par des fissures de plus en plus rétrécies, mais à un niveau inférieur à toutes les

vues théoriques ont reçu, des dernières recherches pra-

plaines et vallées environnantes ; ou, du moins, si peu dif-

férent, qu'on ne connaît aucune fontaine pouvant servir d'issue à ces eaux : :telles sont les grottes de.Mitchelstown (Irlande), Cravanche (près Belfort), Miremont (Dordogne), etc., et les pertes de la mer à Argostoli (Céphalonie; V. Les Abîmes, p. 522). Bien qu'on soit sûr par là de ne jamais déboucher au dehors, il n'en serait pas moins curieux de désobstruer aussi de telles. extrémités : on y

pourrait recueillir des données sur les conditions de descente de ces eaux, qui sans doute ne remontent au jour qu'après un assez bas voyage plus ou moins réchauffant, ou qui vont alimenter les nappes profondes et les nappes artésiennes. Actuellement, ce qui a déjà été fait depuis la rénovation des explorations souterraines et le perfectionnement industriel de leurs méthodes, permet d'expliquer au moins comment les eaux d'infiltration ont matériellement opéré pour agrandir les lithoclases. La plus vive controverse s'était Érosion et corrosion. élevée à ce sujet entre les géologues ; les uns affirmant que l'érosion, ou action mécanique de l'eau en mouvement

charriant des graviers, galets, etc., était prépondérante; les autres, que la corrosion ou action chimique de l'eau chargée d'acide carbonique l'emportait. Il serait oiseux d'expliquer ici ce que l'on entend par ces deux termes si connus.

Mieux vaut établir, à l'aide d'exemples bien choisis, que, comme dans la *plupart des théories relatives aux cavernes, aucune des deux n'est ici absolue : il faut, pour appliquer l'une de préférence à l'autre, distinguer entre les diverses sortes de terrains. Il faut surtout généraliser et proclamer, :encore avec M. Daubrée, dont toutes les

tiques, les plus éclatantes confirmations, que, dans les cavités naturelles, « l'action des eaux d'infiltration a été et est .encore à la fois mécanique et chimique » (Eaux sou-

terraines, I, p. 299). Vouloir déterminer, d'une manière générale, la part précise de chacune de ces deux actions, c'est poursuivre un problème aussi vain qu'insoluble. Trois principes seulement peuvent être posés et reconnus dès maintenant comme définitifs 1° La corrosion l'emporte dans la destruction des roches solubles comme le gypse et le sel gemme;

2° L'érosion domine dans le creusement des grottes marines et de certaines cavernes volcaniques ;

3° Mais ces deux effets « s'exercent d'ordinaire ensemble, et ne doivent pas être étudiés séparément (*) » (De Lapparent).

J'ai donné plus haut suffisamment d'exemples du premier principe, en parlant des cavités qui se forment sous l'action de l'eau s5eule, abstraction faite de toute fissuration

préexistante. D'ailleurs, « il n'est pour ainsi dire aucune substance qui soit complètement insoluble » (Delesse). Le deuxième principe Érosion. Grottes marines. trouve sa principale confirmation dans cette observation

universelle, que les grottes des rivages maritimes sont creusées dans des terrains bien plus variés et bien plus résistants que les cavernes de l'intérieur des terres. Assurément l'eau .de mer est, jusqu'à un certain point, corrosive; mais n'est-ce pas plutôt par les chocs violents et réitérés de ses vagues de tempêtes qu'elle a pu creuser ces puffing-holes(**) perforés de bas en haut, ces ponts naturels, (1 DE LAPPARENT, Leçons de géographie physique, p. 228; Paris, Masson, in-8°, 1896. (**) V. E.-A. MARTEL, la Nature, n° 1196, 2 mai 1896.