Annales des Mines (1892, série 9, volume 2) [Image 312]

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LE GRISOU AUX -MINES D'ANZIN. 1810-1892.

manière que le courant d'air arrivât par le dessous et sur le côté de la grille, et donnait des résultats qui n'avaient encore été atteints par aucun ventilateur » (*). Jusqu'alors, on avait alimenté'les foyers avec du gros charbon venant des fosses maigres et on n'avait jamais atteint des dimensions aussi élevées pour la grille. On hésitait à se prononcer entre les ventilateurs et les nouveaux foyers ; on attendait de ceux-ci les meilleurs résultats, tandis que l'on adressait quelques reproches au ventilateur du Verger « On souffre beaucoup de l'aérage au Chaufour, disait un rapport hebdomadaire, depuis les grandes chaleurs ; cependant les communications sont assez grandes pour

faire passer six fois l'air dont on a besoin. Cette gêne vient du ventilateur, qui n'aspire pas assez pour le moment,

et l'on est obligé de suspendre certains travaux à cause du manque ,d'air, et ces travaux se remplissent de grisou ». Le ventilateur n'était pas parvenu, on le voit, à rallier

toutes les adhésions dès son apparition. Faut-il s'en étonner? Sans doute ces hésitations paraissent surprenantes aujourd'hui quand on compare nos puissants ventilateurs aux foyers d'aérage, mais la ventilation méca-

nique était encore absolument dans son enfance, les appareils employés étaient des Fabry ou des Lemiellu probablement très imparfaits et certainement très faibles, tandis que les foyers avaient atteint les derniers perfectionnements dont ils fussent susceptibles. Fosse _Réussite, 12 mars 1859 (Un tué).

Le 12 mars

1859, la fosse Réussite fut le théâtre d'un accident qui coûta la vie à un ouvrier, mais dont la cause ne put être attribuée qu'à l'imprudence de la victime. (*) Extrait d'un rapport hebdomadaire.

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Deux ouvriers travaillaient dans une taille montante de la veine Voisine-Carachaux, en vue d'établir une communication directe entre les fosses Réussite et Tinchon la taille suivait d'anciens travaux d'où s'échappait parfois du grisou.

En arrivant à leur taille, le jour de l'accident, les

ouvriers la trouvèrent envahie par le grisou ; ils visitè-

rent le courant d'air sans rien y trouver d'anormal ;

voyant que le courant d'air ne parvenait pas à chasser le gaz, l'un d'eux s'apprêtait à aller chercher le surveillantlampiste., lorsque son camarade voulut monter dans la

taille, en laissant toutefois sa lampe en bas. Arrivé à 4 mètres de hauteur, il tomba sans mouvement et sans pouvoir pousser un cri. Son compagnon, homme prudent à l'excès, le prit par la jambe et tenta par deux fois de l'attirer à lui; mais le malheureux était tombé à califourchon sur un bois ; pour le sauver, il eût fallu s'avancer un peu dans la taille. Sans se rendre compte de cette situation, affolé d'avoir eu tant d'audace, l'ouvrier prit la fuite. Quelques minutes après, le surveillant-lampiste arrivait sur les lieux et retirait, sans aucune difficulté, le cadavre du malheureux qui avait payé de sa vie son imprudence et l'abandon de son camarade. Dans la généreuse population de Saint-Vaast, la conduite de celui-ci fut considérée comme un crime ; les

mineurs refusèrent de travailler à côté de cet homme, qui fut obligé de quitter la mine. Cependant l'exploitation se développait très activement dans toutes les fosses de la Compagnie ; depuis le début de la période que nous étudions en ce moment, l'extraction annuelle était montée de 720.000 à 920.000 tonnes et le danger croissait en même temps

les dégagements

de grisou augmentaient de violence en même temps que

le

personnel occupé dans les travaux devenait plus nombreux; toutes les questions d'aérage et de sécurité. en Tome II, 1892.

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