Annales des Mines (1892, série 9, volume 2) [Image 42]

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LA FORMULE D'EXPLOITATION DE M. CONSIDÈRE.

partie, les charges indépendantes du trafic , lesquelles, sans cela, devraient nécessairement être couvertes intégralement par des subventions, et retomberaient à la charge des contribuables. Or, M. Considère nie qu'il soit possible d'appliquer ainsi, aux divers transports, des prix en rapport avec leur valeur, et il en conclut que la seule manière de tirer d'une voie de communication tous les services qu'elle peut rendre, c'est, si on ne tient pas compte des avantages indirects, d'abaisser tous les tarifs au prix de revient partiel, et si on tient compte des avantages indirects, de descendre au-dessous de ce prix de revient. Sans doute, il fait observer ensuite que l'utilité des abaissements diffère beaucoup suivant les cas, et que, pour les marchandises de grande valeur, elle est relativement minime. Néanmoins, en théorie, il arrive à cette conclusion, que l'intérêt des contribuables est que les lignes d'intérêt local soient exploitées à des tarifs voisins du prix de revient partiel des transports. Il n'étend pas, il est vrai, cette conclusion aux lignes d'intérêt général; mais les raisons de distinguer ne nous apparaissent pas bien clairement, et il semble que si la théorie était exacte pour les unes, elle devrait nécessairement l'être aussi pour les autres, car les arguments s'appliquent dans un cas comme dans l'autre, et le lien entre le budget des Compagnies et celui de l'État est à peu près aussi étroit. Cette théorie aurait pour conséquence nécessaire de faire à peu près disparaître toutes les différences de tarifs. Remarquons bien qu'il ne s'agit pas ici de la question, si controversée, des tarifs différentiels appliqués à une même marchandise, sur des parcours différents. Il ne s'agit pas

de savoir si le prix d'une certaine nature de transports, entre deux gares quelconques, doit se calculer en fonction de la distance, d'après une formule mathématique traduite en barême, ou s'il doit, au contraire, résulter de

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prix fermes établis d'après les circonstances c,ommerciales. Non, le cas envisagé est uniquement celui des. transports de marchandises différentes entre deux gares données, Lyon et Paris, par exemple. La seule manière de tirer du chemin de fer, entre ces deux gares, tous les services qu'il peut rendre, ce serait de ramener chaque tarif aux environs du prix de revient partiel du transport, ou même au dessous. Or ce prix varie, sans doute, avecla nature du transport, les risques qu'il entraîne, les soins qu'il exige, avec l'importance de l'expédition, etc. Mais enfin les variations sont relativement minimes; sur-

tout sur les lignes à bon profil, où les frais de traction ne sont pas très élevés. Entre Paris et Lyon, pour toutes les marchandises, le prix de revient partiel doit être compris entre 1 et 2 centimes par tonne kilométrique ; la théorie conduirait donc à ramener tous les tarifs aux. environs de cette base', qui répond à un prix de 5 à 10 francs pour le parcours total. Pour combattre ainsi la thèse de Dupuit, M. Considère fait observer que, quel que soit le nombre et la variété des

tarifs institués entre deux gares, jamais on ne pourra. prévoir tous les cas. Une même marchandise, entre ces deux mêmes gares, peut supporter des tarifs très différents, selon qu'elle est destinée à être consommée sur place, ou à être envoyée à quelque distance par camion-

nage, ou encore à être réexpédiée au loin par chemin de fer; selon qu'elle doit être consommée par le public pour satisfaire directement ses besoins, ou être transformée dans une usine, etc. Il n'est pas douteux, par exemple, que la houille transportée dans une région où le combustible manque pour les usages domestiques, répondant à un besoin de première nécessité, pourrait se vendre bien plus cher, et par suite payer des péages bien 4 plus élevés, que la houille destinée aux industries qui ne se créeront que si elles ont le combustible à bas prix