Annales des Mines (1881, série 7, volume 20) [Image 195]

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DUES PAR _UN CONCESSIONNAIRE DE CHEMIN DE FER, ETC.

364 AUTORITÉ COMPÉTENTE POUR CONNAITRE DES INDEMNITÉS

conséquences que présentait, au contraire, la doctrine de 185o. Le nouveau tribunal des conflits s'est probablement inspiré de la tendance, de plus en plus marquée actuellement, de dessaisir les tribunaux administratifs en faveur de l'autorité judiciaire ; il se peut aussi qu'il ait voulu réagir contre certains arrêtés d'occupation ou d'interdiction, arrêtés dits temporaires, qui étaient renouvelés assez souvent pour de courtes périodes, alors qu'il était pour ainsi dire constant qne l'occupation ou l'interdiction devaient durer un temps indéterminé, indéfini même. Qu'il y ait eu là un certain abus, dans la forme beaucoup plus que dans le fond, la chose est possible. Mais le Conseil d'État aurait bien su faire rendre bonne et entière justice, tout comme pour ces occupations temporaires de terrains sous lesquelles on avait cherché à déguiser de véritables expropriations. Dans les cas d'investisons de mines, la juridiction administrative aurait pu faire régler toute l'indemnité due, aussi justement et équitablement qu'elle la fixe quand il s'agit, par exemple, de dommages permanents en matière de travaux publics. On peut ajouter, à un autre point de vue, que la compétence de l'autorité judiciaire s'expliquerait encore si le chemin de fer était une propriété privée ; il s'agirait alors de contestations entre intérêts privés qui sont exclusivement du domaine du juge civil. Mais ce n'est pas à titre de propriété privée que le chemin de fer est protégé par l'établissement de l'investison, c'est à titre de travail public, pour cause d'utilité publique, comme en matière de grande voirie. Il ne s'agit plus là de droit commun ; la législation spéciale sur la matière doit résoudre la difficulté, Toutes ces objections, que soulève la décision du 5 mai 1877, sont bien quelque peu de nature à faire douter que cette décision soit appelée à former une jurisprudence admise sans contestation. Il semble déjà que le Conseil d'État est peu disposé à l'accepter et il paraît vouloir per-

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sister à reconnaître exclusivement la compétence adminis-

trative. C'est du moins la conclusion qu'on est tenté de tirer de l'arrêt au contentieux du 18 mars 1881 (*). Sans doute, dans l'affaire au sujet de laquelle a été rendu cet arrêt, il s'agit d'une carrière et non d'une mine, et les relations réciproques d'un chemin de fer et d'une carrière ne sont pas tout à fait identiques à celles d'un chemin de fer et d'une mine concédée. On ne voit pas cependant, dans l'espèce, pourquoi les motifs invoqués par le Conseil d'État ne pourraient pas identiquement s'appliquer au cas de rinvestison prescrit dans une mine même « pour une durée indéfinie ». Dans ce cas aussi, en effet, on peut dire avec l'arrêt précité que « si l'interdiction a pour effet de priver le concessionnaire de la faculté d'user de sa propriété de la façon la plus avantageuse, elle n'a pour ellet ni d'en déposséder le concessionnaire, ni de l'empêcher d'en jouir suivant tel autre mode qu'il pourra adopter ». Cet arrêt, venant immédiatement après la décision du tribunal des conflits, est d'autant plus à remarquer que le conseil de préfecture de la Haute-Savoie, s'inspirant de la doctrine de cette décision, s'était déclaré incompétent. Le concessionnaire d'un chemin de fer postérieur à la concession d'une mine peut aussi, le cas échéant, avoir, on

le sait, à payer une indemnité aux propriétaires superficlaires qui auraient droit à des redevances tréfoncières proportionnées au produit de l'exploitation, comme cela, se présente pour les mines de houille de la Loire. Le principe n'a jamais été sérieusement contesté et nous avons rapporté ci-dessus trois affaires où il avait été, explicitement reconnu tant par la cour de cassation (arrêt du 5 janvier 1855) que par le Conseil d'État (14 avril 1864, Marin; 5 février 1875, Ogier et Larderet). Il résulterait implici-

tement de la décision du tribunal des conflits du 5 niai

  • ) Partie administrative, volume de 1881, P. 370.