Annales des Mines (1880, série 7, volume 17) [Image 198]

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TRAVAUX EXÉCUTÉS A COURBONNE-LES-BAINS.

Tous les entablements de l'édifice et les voussoirs de la porte cintrée présentaient de riches moulures et des dentelures très soignées, tandis que les gros pilastres a étaient seulement dégrossis. Ce défaut d'harmonie peut faire supposer que ces derniers éléments étaient destinés à subir sur place des perfectionnements que le temps n'aura pas permis d'exécuter.

Le plan approximatif des travaux romains, que nous avons dressé sur les éléments recueillis pendant nos fouilles, montre que les thermes de Bourbonne avaient été établis avec une certaine ampleur. Il est possible qu'il y eût d'autres édifices contigus, peut-être au nord des bâtiments que nous avons tracés, une cinquième partie néces-

saire pour compléter la symétrie et allant jusqu'au ruis-

seau de Borne; mais là-dessus nous n'avons aucune donnée. Nous savons seulement encore que toutes les excavations

ouvertes sur la place des Bains ont mis à découvert des chapitaux de marbre blanc statuaire, des colonnes d'albâtre, des débris de divers matériaux de construction. Tous

ces objets, sans liaison entre eux, montrent qu'il y avait une grande variété d'édifices élevés dans la région du béton romain et qu'un certain nombre d'entre eux étaient établis avec beaucoup de luxe. Bourbonne au moyen âge (s). - Le goût si accusé qu'avaient les Romains pour les stations thermales ne paraît pas s'être propagé facilement au milieu des invasions bar-

bares. Placés dans une contrée relativement isolée, les bains de Bourbonne ont dû compter parmi les premiers abandonnés ; la plus récente des monnaies retirées du pui-

sard romain est une pièce d'or de Honorius, datant par

HISTOIRE DES SOURCES.

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conséquent à très peu près de l'an 405, époque des dernières victoires de Stilicon : les Barbares n'allaient pas tarder à envahir la Gaule.

Il ne nous paraît pas cependant que l'usage des eaux soit tombé brusquement en désuétude avec la disparition de la splendeur romaine en Occident, car une de nos trouvailles nous paraîtrait inexplicable dans cette hypothèse

c'est celle d'un tronc en grès rencontré sur le pavé du grand temple romain. Ce petit monument se composait de deux blocs de grès. La partie inférieure, de forme presque cubique, est creusée d'une cavité rectangulaire. La partie supérieure, taillée en tronc de pyramide rectangulaire, est percé sur l'une des petites faces d'une petite ouverture de orn,o5 de long et om,o r de large, destinée évidemment à

recevoir des pièces de monnaie. Les deux pierres présentent des scellements dont les ferrures ont été arrachées par la main de l'homme. 'En forçant la fermeture du tronc, on a brisé un morceau de la pierre supérieure. La disposition des autres scellements montre que les uns servaient à fixer des charnières, les autres retenaient un levier pour manier le lourd couvercle. Ce tronc est actuellement déposé dans le jardin des bains. L'emploi du grès fruste pour ce travail suffirait à en dénier l'origine romaine. Nous voyons, en effet, que les Romains avaient proscrit presque complètement l'usage du grès à Bourbonne, sauf pour former les grands dallages du temple ; quelques gros blocs avaient cependant été employés par eux dans les travaux souterrains. Ils aimaient mieux avoir des matériaux de meilleure qualité et n'avaient pas reculé devant les frais nécessaires pour des transports considérables. Les gros matériaux de leurs édifices étaient

des pierres de la grande oolithe tirées des carrières de (*) Nous avons puisé une bonne partie des renseignements nécessaires pour cet article dans l'ouvrage de M. Bougard a Bibliotheca Borvoniensis» , i vol. in-8", Chaumont, 1865, tiré à Soo exemplaires.

Chaloraines, à 5o kilomètres au nord de Bourbonne. 'Les voûtes étaient composées de tuf, apporté sans doute des gisements de Vesoul. Les piscines étaient garnies, les unes