Annales des Mines (1877, série 7, volume 11) [Image 204]

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ÉLOGE D'ALEXANDRE BRONGNIART.

ÉLOGE D'ALEXANDRE BRONGNIART.

l'art ; il s'élève des briques, des tuiles et des objets de ménage les plus grossiers, aux vases élégants que leur forme pure, leur décoration délicate et leurs brillantes couleurs désignent pour l'ornement des plus riches demeures. Les terres cuites étant inaltérables, le moindre de leurs débris, façonné dans les temps anciens et laissant sur le sol l'empreinte de l'homme, a suffi pour signaler le premier indice d'un commencement de civilisation et pour rendre, au profit des siècles reculés, les services que l'imprimerie promet aux siècles futurs. Que d'informations seraient perdues pour nous, si les bibliothèques assyriennes n'avaient été formées de plaques d'argile cuite et si le respect n'avait associé plus, tard aux restes des morts les vases en terre que nous re'trouvons intacts dans ces tombeaux, où les ossements de leurs possesseurs se sont réduits en poussière !

lis de ses mains, de tous les produits de la céramique espagnole et, en particulier, de ces grandes pièces de cinq mètres de hauteur, qui donnent une si juste idée du célè-

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Réunir les poteries de toute sorte, les argiles qui leur donnent naissance, les modèles des appareils et des fours. employés à leur manipulation ou à leur cuisson, emprunter

à tous les pays et à tous les âges les types de cette industrie, si profondément liée au mouvement et au progrès de la civilisation, telle a été la conception première de la fondation du musée céramique, image sensible de l'union étroite de la science, de l'industrie, de r art et de r histoire. De ses nombreux voyages en France, en Angleterre, en Italie, en Suisse, en Allemagne, en Suède, en Norwége, entrepris pour étudier les points signalés à son attention par les progrès de la géologie,'Alexandre Brongniart revenait

les mains pleines des dom que sa réputation européenne avait valus au muSée céramique. Marins, diplomates, voya-

geurs, industriels, chacun apportait son tribut. A mesure que l'importance de cette collection s'accroissait, la liste civile lui assurait le concours des personnes qu'elle chargeait de missions spéciales. C'est ainsi que notre vénéré confrère, M. le baron Taylor, enrichit le musée de Sèvres, où son nom est cité .mille fois, d'une foule d'objets recueil«

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bre tonneau de Diogène.

Alexandre Brongniart fut assez heureux pour terminer, au milieu des matériaux réunis pendant quarante années, son Traité classique des arts céramiques, et pour le publier

Peu de temps après, il était enlevé à la science, vaincu par une maladie dont il avait prévu l'issue funeste, mais à laquelle avaient résisté, jusqu'à la dernière heure, son ardeur pour l'étude, son admiration pour les beautés de la nature, l'austérité de ses habitudes stoïques et ses tendresses prévoyantes pour une famille étroitement unie, dont il était l'âme. Sa compagne vénérée, qui, après un demi-siècle de bonheur commun et de confiante affection, devait être conservée, pendant quelques années encore, à l'affection des

siens et au respect de tous, avait répandu une douceur infinie sur l'intérieur patriarcal dont elle, était le plus grand charme par la bonté de son coeur, la solidité de son esprit, l'étendue de ses lumières et l'ineffable dignité de sa vie.