Journal des Mines (1794-95, volume 2) [Image 137]

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La première est comprise depuis sa source, ou plutôt depuis le canal Crozat par lequel elle con-in-tunique avec l'Oise , jusqu'à la ville d'Amiens qu'elle traverse, et la seconde depuis Amiens jusqu'à son embouchure. Ces deux parties, dans l'état

actuel des choses, ont chacune un .canctère distinctif, et présentent un aspect bien différent. Dans la partie supérieure de son cours, depuis St.-Quentin ,jusqu'à Sailly-Lorette , la Somme est barrée transversalement par trente-une digues dont

vingt-quatre retiennent les eaux pour le service d'autant de moulins. Elles sont. construites avec une espèce de marne tirée des collines voisines. Quant à leurs dimensions , elles ont depuis quarante jusqu'à .cinquante pieds de base , et depuis huit jus-

qu'à quinze ou vingt pieds de largeur au sommet, que l'on tient élevé au-dessus des plus hautes eaux.

Ce ne sont point les seuls obstacles que l'on ait opposés au libre écoulement de la Somme. Elle est encore traversée en beaucoup d'endroits de di-

gues plus petites vers la conservation desquelles l'industrie des habitans de cette vallée parait se diriger exclusivement. Celles-ci ne s'élèvent pas au-dessus des eaux , mais leur sommet s'arrête à quinze ou vingt pouces au-dessous. Dans la direction de chacune d'elles et sur le milieu de leur largeur qui est ordinairement de trois ou quatre pieds , sont plantés 'verticalement de petits pieux espacés de manière à soutenir des claies d'osier d'environ trente pouces de hauteur, destinées à arrêter le poisson, en même temps qu'elles permettent l'écoulement de la tranche supérieure de l'eau.

C'est ainsi qu'entravées dans la route que la

nature semblait leur avoir prescrite , les eaux de la haute Somme se sont élevées au-dessus des bords qui

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qui .devraient les contenir , et ont submergé , sus

une longueur développée de quarante-sept mille toises et sur une largeur réduite de deux cent dix, la vallée qu'elles étaient destinées à fertiliser. Tout cet espace n'est, à proprement parler , qu'un vaste étang couvert, de roseaux , et sur lecinel flottent continuellement les nacelles d'un peuple pêcheur, presqu'étranger aux travaux de l'agriculture. Si le genre d'occupation auquel se livrent les riverains 'de la haute Somme , leur procure , sans beaucoup de fatigue, les moyens de subsister et de satisfaire leurs premiers besoins , ils achètent bien cher leur inactivité. Le germe de plusieurs maladies existe daiis l'air qu'ils respirent : le retour des saisons en amène 'de périodiques dont ils sont souvent les victimes , avant même d'avoir parcouru la moitié de leur carrière. Cependant la force de l'habitude les attache tellement à leurs marais qu'ils regretteraient de les Voir transformés en prairies par un. desséchement dont on a prouvé la possibilité. La disette des bois leur rend précieux une espèce de combustible dont ces marais sont recou-

verts. Ce sont de petites îles flottantes formées par l'entrelacement des racines de plantes marécageuses qui ont d'abord été alimentées par fa vase du fond des étangs. Ces plantes , en cessant de végéter, ont été retenues dans les eaux par celles dont elles étaient environnées. Celles-ci ont péri à leur tour, et ont contribué à l'augmentation d'une masse spongieuse qui est devenue peu à peu une espèce de terreau sur lequel il s'est établi une nouvelle végétation. C'est de ce terreau; appelé botqin dans le pays, que les pêcheurs de la haa te Sinnine se servent pour leur chauffage. Ils le coupent en prismes de dix-huit à vingt pouces de long Journ. des Mines , Messidor, an III,