Annales des Mines (1873, série 7, volume 3) [Image 101]

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SUR M. SAUVAGE.

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NOTICE NÉCROLOGIQUE

promptitude exceptionnelle avec laquelle il savait observer et étudier toutes les questions, enfin de la netteté avec laquelle il coordonnait les faits. On est étonné qu'un seul homme ait pu produire pendant

neuf années des travaux si nombreux, de .natures si diverses et tous si bien exécutés. Il semble que le jeune ingé-

nieur des mines aurait dû persévnerer dans la ligne 'qu'il parcourait avec tant de distinction. Cependant à son retour de Grèce, au moment où il faisait paraître les importantes publications que je viens de mentionner, Sauvage change tout à coup de voie de travail; il est entraîné vers l'industrie des chemins de fer qui prenait alors son essor. Mis, sur sa demande, en congé illimité au commencement de 1846 (*), il fit son début, comme constructeur de chemins

de fer, sous la direction affectueuse d'un homme des plus distingués, M. l'ingénieur en chef' Thirion, en prenant part aux travaux du chemin de fer de Metz à Sarrebrück, dont

il construisit une section avec des travaux d'art remarquables.

Dès l'année suivante, il devint ingénieur en chef du matériel de la première compagnie concessionnaire de Paris

à Lyon ("). Ce n'est 'pas sans étonnement que l'on voyait appeler û cette position importante un homme qui n'avait fait encore aucune étude spéciale des machines; mais la méfiance qui, il faut le dire, s'était manifestée chez quelques-uns des administrateurs appelés à faire un choix, ne tarda pas à s'évanouir et à faire place à un sentiment tout opposé, dès qu'on vit la sûreté d'esprit avec laquelle Sauvage s'acquittait de cette nouvelle fonction.

Il occupait ce poste lorsque, à la suite de la révolution de )848, les ouvriers mineurs du Creusot s'étant mis en grève, M. le ministre des travaux publics jugea à propos (*) Décision ministérielle du 16 mai '846. (.*) Décision ministérielle du 27 septembre 1847.

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de l'envoyer vers eux, à titre de commissaire spécial, pour rétablir l'ordre (*) . En même temps, l'éminent directeur de confiance dans la compagnie, M. Schneider, témoignait de sa ce choix en écrivant à Sauvage : « Je déclare à l'avance croirez « m'en référer entièrement aux dispositions que vous ponctuelle« devoir adopter ; elles seront, de notre côté « ment exécutées. » Il se rend immédiatement sur les lieux, et après avoir appelé les délégués chargés de lui présenter la réclamation collective, il en obtient la promesse formelle de rentrer dans les mines dès le lendemain. C'est ce qui eut lieu en effet. Grâce à une attitude aussi digne- que ferme, et moyennant la des concessions modérées qu'il sut faire, d'accord avec direction de l'établissement, tout était rentré dans l'ordre au bout de quelques heures, et le commissaire partait après avoir conquis le respect des ouvriers en même temps que l'estime des chefs. Peu de jours après, le gouvernement provisoire ne croyait pouvoir mieux faire que lui confier l'administration du séquestre dés chemins de fer d'Orléans et du Centre. C'é-

tait une nouvelle preuve de la confiance que Sauvage inspirait et qu'il venait d'ailleurs de justifier. De grandes difficultés s'étaient élevées entre diverses

catégories d'employés et l'administration de ces deux compagnies de chemins de fer. Les prétentions des employés s'appliquaient particulièrement à des questions de salaires Ces et d'intervention directe dans la conduite du service. chez idées, que d'imprudentes doctrines avaient fait naître violes ouvriers, expliquent, sans les justifier, la manière lente dont les réclamations se produisirent, et les menaces d'interruption de service qui les accompagnèrent. Réunis aux chefs de dépôt expulsés de leurs emplois et poussa par une violente irritation, les mécaniciens demandèrent (*) Décision ministérielle du 13 mars

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