Annales des Mines (1873, série 7, volume 3) [Image 50]

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NOTES GÉOLOGIQUES SUR LE CHILI.

Au-dessous viennent 70 mètres au moins d'un conglomé-

rat quartzeux rougeâtre qui repose sur les micaschistes. Toute la formation tertiaire aurait donc, en ce point, une puissance de 200 mètres environ. Dans la rapide visite que nous avons faite aux mines de Coronel, nous n'avons pu recueillir de plantes fossiles. Il serait à désirer que celles que signalent les Ingénieurs Chiliens fussent examinées avec soin, car elles nous donneraient de précieux renseignements sur la flore du 'continent américain pendant la période tertiaire, et peut-être pourrait-on arriver, par la comparaison avec les flores tertiaires d'Europe, à déterminer avec précision l'époque géologique de la formation. L'aspect des roches rappelle complètement celui des couches du terrain éocène inférieur parisien. Les faits suivants donnent une assez grande vraisemblance à ce rapprochement. L'île de Quiriquina située dans la baie de Talcahuano à 45 kilomètres au nord de Coronel, est .formée de couches schisteuses métamorphiques sur lesquelles reposent des lits d'argile verdâtre, de grès calcaires et micacés avec bancs de lignite et bois silicifié. Or, dans ces couches métamorphiques, on a rencontré des fossiles assez nombreux qui

ont été retrouvés dans les couches métamorphiques du détroit de Magellan. Ces fossiles ont été déterminés par M. Alcide d' Orbigny, qui y a reconnu avec certitude la faune

qu'il a désignée sous le nom de sénonienne (craie supé-

rieure) (*). D'un autre côté, M. Pissis (') rapporte que, clans la partie inférieure du terrain à lignites de la province de Concepcion,

on a trouvé une grande quantité de baculites disséminés (*) Voyage de l'Astrolabe, géologie et minéralogie, par M. Grange,

t. II, p. 174, et d'Orbigny (Alcide), Cours élémentaire de paléontologie, t. II, p. 672. Pl Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1865, t. LX.

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dans une couche de grès très-friable, où ils sont accompagnés de cardiums et autres bivalves, ainsi que de quelques empreintes végétales. « Ce grès, ajoute M. Pissis, forme la base du terrain à lignites et affleure sur plusieurs points de la baie cr Arauco , dans les environs de Concepcion et plus au sud, près du Rio-Levu. En tous ces points, sa stratification ne diffère en rien de celle des couches tertiaires qui le recouvrent, de telle manière qu'il faut nécessairement admettre que le tout a été soulevé en même temps. » Si l'on admet que l'extinction des baculites s'est produite au Chili comme en Europe au commencement de la période

éocène, on est conduit à rapporter à cet étage le terrain à lignites de Concepcion, qui serait ainsi l'équivalent américain de l'argile plastique parisienne. On sait d'ail-

leurs que les baculites se rencontrent dans le bassin de Paris, au milieu de couches du calcaire pisolithique, qui supportent les argiles à lignites et sont en discordance trèsnette avec les assises de la craie blanche sous-jacente. Cette discordance de stratification, si anciennement observée aux

environs de Paris, se retrouve donc, d'une manière bien plus accentuée, sur les rives du Pacifique, et correspond sans doute à l'une des phases les plus importantes du soulèvement de la chaîne des Andes, puisque la craie blanche est représentée, sur leur versant occidental, par des couches profondément métamorphisées et disloquées, tandis que les baculites se rencontrent dans des assises qui gardent encore leur facies primitif, et qui n'ont été qu'assez légèrement bouleversées. Le terrain tertiaire se retrouve dans le détroit de Magellan, mais seulement sur le versant oriental de la grande Cordillère. Ce détroit est ouvert au milieu de formations très-différentes les unes des autres, et offre en raccourci une coupe complète de l'Amérique du Sud. A l'est, après avoir doublé le cap des Vierges qui marque l'entrée du détroit du côté de l'Atlantique, on rencontre des terrains sensiblement