Annales des Mines (1870, série 6, volume 17) [Image 164]

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FREIN AUTOMOTEUR

irréalisables dans la pratique journalière. Quelque sérieuse

que soit cette objection, elle n'aurait peut-être pas suffi pour empêcher la généralisation de l'emploi des freins Gué-

rin, si un autre inconvénient plus grave ne s'était révélé. Lorsqu'un train muni de freins Guérin est au moment de s'engager sur une pente au sommet de laquelle se trouve une station,, les freins sont désarmés, c'est-à-dire que la

fourchette de chacun d'eux est abaissée sur la tige de traction prête à s'appuyer contre l'épaulement de celleci, dès qu'une pression quelconque s'exercera contre les tampons. Le train une fois lancé sur la pente, le mécanicien ferme son régulateur bien avant que la vitesse nécessaire à l'armement du frein soit acquise. Or, la machine représente alors à elle seule une résistance de 600 à 700 kilogrammes, c'est-à-dire supérieure à celle du res-

sort dé rappel, et par conséquent suffisante pour faire butter la fourchette contre l'épaulement. Une fois cette buttée produite, quelle que soit l'accélération spontanée du train, la fourchette est maintenue par la pression, et le frein ne s'arme plus. Pour éviter ce grave inconvénient, qui paralyse le frein au moment où il serait le plus nécessaire, on a donné aux mécaniciens les instructions suivantes 1° Fermer le régulateur en abordant la pente, et laisser descendre le train par sa propre pesanteur. 2° Dès que la vitesse s'accélérera d'une manière sensible (25 kil. environ), ouvrir le régulateur pendant un parcours de 3o â 4o mètres, afin d'assurer l'enclanchelf ment des freins. « 5° Fermer le régulateur, et faire fonctionner tous les freins automoteurs du train par le serrage du frein du

tender, et au besoin de celui du chef de train. » Il est facile sans doute d'édicter de pareilles prescriptions; mais il faut songer aussi à la situation d'un mécanicien qui, n'étant plus maître de son train, n'a d'autre

DE MM. LEFÈVRE ET DORRÉ.

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moyen-eramortir la vitesse qu'en commençant par l'accélérer en donnant de la vapeur afin d'enclancher des freins dans lesquels il a une médiocre confiance. Aussi la compagnie de l'Est a-t-elle compris qu'il fallait avant tout résoudre cette difficulté. M. Doué, ingénieur de la compagnie

et l'un des inventeurs du frein aujourd'hui soumis à la commission, a imaginé alors un système d'échappement à

ressort, ayant pour but d'assurer le fonctionnement des freins automoteurs dans les trains lourds à la descente. La barre d'attelage ne peut plus rentrer dans l'oeil de la traverse qu'à une pression déterminée par le ressort d'échap-

peinent et supérieure, bien entendu, à la résistance que produit la machine descendant avec son régulateur fermé. Mais aussitôt que cette pression est atteinte, la barre d'attelage échappe à l'action du ressort additionnel, et le frein fonctionne librement. Ce système, appliqué en 1865 à 16o véhicules, ne remédiant pas à tous les inconvénients du frein Guérin, ne put en empêcher l'abandon. Il n'y aurait donc eu d'autre ressource que d'augmenter

la puissance du ressort de rappel et de lui donner une bande initiale supérieure à la résistance que présente une machine descendant une rampe avec son régulateur fermé. Mais alors on diminuait d'autant et dans toutes les circonstances l'énergie du frein jusqu'à la paralyser entièrement, et de plus on augmentait l'énergie des réactions nuisibles. On a donc laissé le ressort de rappel avec sa faiblesse relative. Cette insuffisance se manifestait d'ailleurs dans d'au-

tres circonstances. On sait que dès le début il avait été reconnu que, au manient de l'arrêt d'un train arrivant à une

station, quelques-uns des freins pouvaient rester armés. Pour parer à la difficulté que présenterait alors le refoulement, les instructions de la compagnie de l'Est portent « Si le frein était resté serré, il serait nécessaire, « avant de refouler, que le mécanicien, pour détendre le « train, donnât un tour de roue en avant.