Annales des Mines (1862, série 6, volume 2) [Image 282]

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EXTRAITS DE GÉOLOGIE POUR L'ANNÉE 186h 486 Deux directions se joignent d'ailleurs, comme axes volcaniques au mont Ararat; c'est la direction méridienne de l'Arménie, et l'axe

moyen des directions est-ouest. Contournements et renversements des terrains. Depuis qu'on a proposé d'expliquer les anomalies paléontologiques des Alpes par des renversements de couches, les géologues se

sont occupés d'une manière spéciale de ces phénomènes. Des arrangements de couches très-compliqués et tout à fait extraordinaires ont été signalés par M. Alb. M tiller (1) jusque dans le Jura, notamment sur son versant septentrional, dans les cantons de Bâle

et d'Argovie. Ainsi, une coupe faite par le Wiesenberg et par Hoselfingen présente des couches inclinées d'environ 3o0 vers le Sud qui, de haut en bas, se succèdent dans l'ordre suivant : oolite inférieure, lias et keuper, muschelkalk, keuper et lias, tertiaire, corallien et couche de Bradford, oolite Inférieure, tertiaire, corallien, oolite inférieure. Cette strUcture bizarre offre donc plu-

sieurs récurrences d'un même terrain ; elle est attribuée par M. Muller à des dislocations qui auraient eu lieu, soit avant, soit après le dépôt du tertiaire moyen. Les contournements et les renversements se présentent surtout sur une grande échelle dans les Alpes; déjà de Saussure avait signalé à l'attention des géologues les couches qui sont courbées en forme de G, et récemment M. St ude r a repris cette question. Parmi les couches en en forme de G, ce géologue comprend aussi celles qui forment un coin et il les distingue en deux classes : s' les unes tournent la partie convexe du C ou l'arête du coin vers les Alpes, c'est-à-dire pour la plus grande partie de la Suisse vers le

Sud; s° les autres ont au contraire leur ouverture du côté des Alpes, tandis que leur partie convexe regarde le nord. De Saussure admettait que les courbures de la première classe proviennent d'un renversement produit dans un système de couches, et alors on comprend que les couches extérieures du G doivent être les plus anciennes. C'est par cette hypothèse qu'en 1830

M. Vo ltz et depuis MM. Favre, Lory, Pill et ont expliqué les anomalies signalées dans les Alpes et en particulier le gisement des nummulites en Maurienne. M. St u der (2) cite plusieurs exemples analogues en Suisse. Ainsi, (i) Verhandlungen, der Naturforschenden Gesellschaft in, Basel, Archives des sciences physiques et naturelles, 1861, XI, 165. 2) Archives des sciences physiques et naturelles, 1861, XI, 5.

SYSTÈMES DE MONTAGNES.

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au litettenberg, où les couches forment coin dans le gneiss, celles qui

sont à la partie supérieure consistent en quartzites, dolomies et schistes bigarrés que M. F avre regarde en partie comme triasiques, tandis que la masse principale et intérieure du coin consiste en calcaire oxfordien. Au hameau de Mürre,n , un lambeau de terrain

mummulitique d'une puissance de loo mètres se trouve enclavé au milieu du terrain jurassique ; car ce terrain forme au-dessous de lui les escarpements du Staubach qui ont 800 mètres de hauteur, d'un autre côté, il le domine de 1,3o0 mètres et il s'élève au-dessus de lui jusqu'au Schilthorn. Les Alpes donnent aussi des exemples de la deuxième classe de courbure. M. St uder en cite d'abord un au nord du lac de Brienz, et, comme l'on pouvait s'y attendre, les couches extérieures de ce

contournement sont les plus récentes ; elles appartiennent au flysch et au terrain nummulitique, tandis que les couches intérieures sont les plus anciennes et paraissent appartenir au calcaire à rudistes. De même, dans la haute chaîne, à laquelle appartiennent

les Diablerets et la dent de Mordes, le coude de la courbure est tourné vers l'extérieur des Alpes ; les couches extérieures sont formées par le terrain nummulitique, et dans l'intérieur du C. on rencontre les terrains crétacés, puis jurassiques (i). Sur le haut de la grande chaîne qu'on traverse par la Gemmi, les couches se maintiennent à peu près horizontales; mais vers le bord du passage, elles fléchissent vers le nord, atteignent d'abord la verticale, puis, par une deuxième courbure, elles plongent vers le midi et vers l'in-

térieur de la montagne. M. Stu der estime que ce C gigantesque se prolonge jusqu'en Savoie et que son étendue ou sa largeur est de tr8 kilomètres, tandis que sa corde verticale ou sa hauteur s'élève à î kilomètre. Il faut sans doute chercher dans les refoulements la cause de la plupart des anomalies qui viennent d'être mentionnés ; déjà de Saussure avait signalé la puissance de ces refoulements qui ont plus particulièrement fixé l'attention de M. E. de B e a.0 in on t, et postérieurement celle de M. Poule tt Sc r ope ainsi que d'autres savants. La force latérale qui les a produits devait être immense et elle s'est propagée de l'axe des Alpes Centrales vers les bords de la chaîne. « Cette force, dit M. Studer, ne paraît pas devoir se rapporter directement aux massifs granitiques..... Elle est plutôt due à l'origine ou à l'élargissement de la crevasse dans la croûte

1859, 348.

(I) Bulletin de kt Société vaudoise, décembre 1859.