Annales des Mines (1854, série 5, volume 5) [Image 313]

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mine; mais comme c'est assez loin et dans un pays sauvage, il n'est pas facile de l'avoir promptement. Voilà, Messieurs, tout ce que j'ai appris sur la minéralogie

et la géologie de ce pays-ci. Avant de vous envoyer cette lettre, peut-être recevrai-je encore quelques autres renseignements ; ce sera alors pour moi un nouveau plaisir rie vous en faire part sur cette même lettre. Maintenant, je vais vous

dire quelques mots sur la métallurgie de l'or et sur celle du fer. Métallurgie

de l'or.

Pour l'or, comme je l'ai déjà dit plus haut, il s'exploite en le séparant des sables où il se trouve disséminé, de sorte que toute la métallurgie de ce métal consiste en de simples lavages,

et d'après la description qu'on m'en a faite, ces lavages sont assez imparfaits. Les Annamites n'ont point de tables, ni mouvantes, ni dormantes ; ils lavent simplement sur terre, et bien entendu qu'ils ne connaissent pas la méthode d'amalgamation,

ou tout au moins ils n'en font point usage. Voici comment les compagnies qui exploitent l'or sont organisées. Chaque compagnie est de 50 hommes, ayant à sa tête un chef responsable; elles doivent fournir chacune la quantité d'or détermi-

née pour le tribut ; et ce tribut est aussi réparti sur chaque individu de la compagnie, de sorte que chaque tête doit four-

nir sa quote-part au chef, qui à son tour livre la réunion de toutes les parts particulières au mandarin chargé dans ce lieu de percevoir le tribut. Lorsqu'une compagnie se forme, elle prend son autorisation du gouvernement pour exploiter l'or de telle province ou de telle portion de province, et on ne lui impose d'autres conditions que de fournir le tribut déterminé, et ce tribut est le même pour toutes les compagnies, partout, pour chaque individu en particulier, quelle que soit d'ailleurs la richesse des minerais qu'ils exploitent. S'ils rencontrent un minerai riche, tant mieux pour eux, mais aussi tant pis s'ils le rencontrent pauvre. Chaque individu, après avoir payé sa quote-part, peut empocher pour lui le surplus qu'il a trouvé. Précédemment, le tribut avait été augmenté, mais il paraît qu'on le trouvait trop onéreux ; l'était-il en effet ? je n'in sais rien ; ce qu'il y a de certain, c'est qu'on vient de le diminuer. Maintenant, d'après les renseignements que j'ai eus, 10 hommes

doivent fournir I once du métal en question, cela équivaut à 39Y,05, car il s'agit de l'once annamite. Les individus qui entrent dans ces compagnies et autres cle la sorte, ont pour

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privilège d'être exempts de toute corvée publique, et aussi du service militaire. La seule province de Quang-Nam renferme un grand nombre de ces compagnies. Les autres provinces en renferment, ou une, ou plusieurs chacune. Dans le Binh-Dinh , je sais qu'il y en a au moins une, je ne sais pas s'il y en a davantage. Le ()ming-Nam a une grande réputation pour ses richesses minérales; on dit qu'il renferme des mines d'un grand nombre de métaux, mais qu'on n'ose point les exploiter. La principale raison est, dit-on, que c'est trop près de la mer, et surtout trop près de Tourane, beau port convoité par les Européens. On craint d'exciter la convoitise de ces derniers et de les attirer dans le royaume pour s'y emparer des mines ouvertes. On ajoute même que c'est pour cette raison qu'il n'y en a aucune d'ouverte en Cochinchine ; il n'y a que des lavages de sables aurifères ; ceci n'a pas l'air de mine, de sorte qu'aux yeux des Annamites, cette espèce de métallurgie ne les compromet pas aux yeux des Européens. On ne tient pas compte

des minerais de fer, qu'on sait bien ne pas être capables de tenter ceux-ci. A ce que j'ai entendu dire dans le Tonquin , les mines sont ouvertes loin de la mer, dans les montagnes vers

l'occident, loin de la portée des Européens. J'ai pris des informations pour connaître le nombre des compagnies exploitant l'or, ou bien la somme totale du tribut en or payé au roi, mais je n'ai rien pu obtenir de satisfaisant sur ce sujet. Avant de parler de la métallurgie du fer, il faut que je dise un mot de l'exploitation et de la préparation du minerai. Les Annamites ne font pas de puits d'extraction très-profonds ; l'abondance des minerais non loin de la surface de la terre les en exempte. Ils ne se servent que du minerai de première qualité ou à peu près. Quand la mine est détériorée au point de n'avoir plus l'éclat métallique, ils disent que c'est un minerai mort, il ne peut plus servir, on le rejette. Lorsqu'un minerai, quoique mélangé d'un peu de terre, conserve pourtant l'éclat métallique, alors ce minerai passe encore pour bon, on le lave, puis on le soumet au grillage. Pour les autres minerais, ils n'ont 9as besoin d'être lavés, parce qu'ils sont très - purs ;

on se contente seulement de les griller. Cette opération du grillage s'exécute dans des fours fort simples. Les Annamites élèvent quatre murs en terre à peu près de Im,20 de haut sur

une longueur et une largeur égales. Il y a dans le bas trois petites portes pour donner l'air à l'intérieur; elles sont dans

Métallurgie

de fer.