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Annales des Mines (1907, série 10, volume 12)

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ÉTUDE SUR L'INDUSTRIE DU FER

DANS LES ARDENNES FRANÇAISES

bondance, disons-nous, causa une grande perturbation dans la marche des affaires. Dès qu'arrivèrent les offres de travaux, certaines usines, alléchées par l'appât du gain, et craignant un nouvel arrêt des constructions, se lancèrent à corps perdu dans les commandes, et il s'ensuit actuellement, pour elles, un encombrement qui entraîne des retards considérables dans la livraison des ferrures. Aussi les Compagnies ont dû lancer à l'étranger de très importantes commandes de matériel.

tout dépensé. Il est triste de dire que certains ouvriers ont gagné jusque 25 francs par jour, sans faire un sou d'économie, plus triste encore d'avoir vu des forgerons, entre les charges des fours, jouer au bouchon avec des pièces de 5 francs. Pourtant la prodigalité naturelle n'a pas chassé toute idée de prévoyance : les ouvriers nouzonnais ont formé entre eux une Association contre les accidents du travail ou la maladie, qui leur donne d'excellents résultats; moyennant 1 franc de cotisation par mois, ils touchent 3 francs par jour en cas d'impossibilité de travail. L'ouvrier nouzonnais est d'esprit pacifique; les grèves sont assez rares ; la dernière eut lieu à propos de la loi de dix heures : elle dura six semaines. environ sans incident fâcheux. Les résultats de cette grève eurent une importance assez considérable pour que nous jugions utile de relater les faits qui se sont passés à cette époque.

A un autre point de vue, la surabondance des commandes a eu pour effet l'augmentation des prix de maind'œuvre et de matières premières et, par suite, du prix de revient. Devant les exigences des ouvriers, les patrons ont dû consentir des salaires plus élevés, dont l'augmentation a atteint 10 p. 100. Le marché des métaux, d'autre part, indique une majoration considérable des prix de base. Enfin, une autre conséquence que nous avons déjà signalée, c'est la création d'usines nouvelles par les constructeurs qui ne peuvent obtenir livraison, notamment les constructeurs d'automobiles. Il importe de noter l'éclosion de ces maisons qui, par la suite, pourront terriblement concurrencer l'industrie ardennaise. Conditions économiques de la population. — Les ouvriers nouzonnais sont pour la plupart locataires ; ils payent un loyer de 12 à 15 francs par mois et disposent de deux pièces, avec jardin, cuisine et cour. En dehors de son travail, l'ouvrier s'adonne un peu à l'agriculture ; il cultive son champ ou son jardin. Sans parler de l'alcoolisme, sur lequel nous reviendrons dans un autre chapitre, la population nouzonnaise est peuéconome; on a gagné, dans les années de prospérité, des sommes considérables; sauf de rares exceptions, on a

Grève des ouvriers de Nouzon en 1902. — La loi Millerand, votée en 1900, imposait aux industriels occupant des femmes et des enfants une réduction progressive des heures de travail. Pour débuter, du 1 er avril 1900 au 31 mars 1902, on ne devait plus faire que onze heures, et du 1 er avril 1902 au 31 mars 1904, dix heures et demie. Avant le 1 er avril 1900, les ateliers de Nouzon faisaient douze heures, et les ouvriers étaient payés à la journée. Naturellement, une absence quelconque entraînait une retenue calculée au prorata du temps perdu. Quand arriva l'époque de l'application de la première partie de la loi Millerand, c'est-à-dire le 1 er avril 1900, les ouvriers réclamèrent pour les onze heures le même salaire journalier que pour les douze heures. A ce moment, les patrons, qui avaient des commandes en abondance, consentirent sans discussion à maintenir les anciens salaires,