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Annales des Mines (1867, série 6, volume 11)

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BULLETIN. 496 mais pour être, comme elle, bientôt étouffées par l'insouciance de l'avenir, assez naturelle à un présent bien partagé. Ainsi passèrent inaperçus tous les avertissements jusqu'à t850, où la question commence sérieusement à s'emparer de l'opinion. Quelques hommes spéciaux voulurent se rendre un compte exact de la situation, et, bien que raisonnant sur des données encore incomplètes, ils se crurent autorisés à formuler en chiffre la durée probable des richesses carbonifères du Royaume-Uni.

L'exemple devint contagieux ; les hommes politiques se joignirent

aux industriels, et bientôt le parlement et la presse retentirent de pronostics tour à tour optimistes ou décourageants. Qu'on en juge!, Sir William Amstrong, l'éminent ingénieur dont les usines sont situées au centre d'un des plus riches gisements de l'Angleterre, déclara que deux siècles suffiraient, au train actuel de l'exploitation, pour rendre la houille d'une grande rareté. M. Taylor, dans son- ouvrage Statistic of Coal, estima, au rebours de sir William Amstrong, que les ressources présentes se prêteraient à une exploitation continue d'au moins dix-sept siècles; et, se fondant sur la probabilité de la découverte de nouveaux gisements, il se crut autorisé à traiter de prévoyance superflue les préoccupations générales. M. Edward Hull, du Geological Survey, après une étude qui se distingue par sa clarté minutieuse, arriva sensiblement aux mêmes conclusions que sir William Amstrong. M. Ilussey Vivian, membre du parlement, affirma que le comté dont il était le représentant renfermait à lui seul assez de combustible pour suffire, durant cinq cents ans, à tous les besoins industriels, commerciaux et domestiques de l'Angleterre. Nous pourrions citer plusieurs autres opinions également respectables, sans rencontrer entre elles plus de concordance que dans celles qui précèdent ; industriels et savants sont à l'unisson pour se contredire. S'il est un enseignement qu'on puisse, sans hésiter, tirer de ces débats, c'est que le premier devoir du Gouvernement est de rechercher la lumière, en procédant au plus tôt à une exploration rigoureuse de tous les gisements, et en ouvrant une enquête générale sur les questions relatives à la consommation aussi bien qu'à l'exploitation du charbon. Cette enquête sera difficile. Quoi qu'il en soit, ce que nous avons dit suffit à montrer qu'il existe des causes légitimes de préoccupations. Le relevé officiel des quantités de charbon extraites et exportées depuis douze ans mérite surtout d'être étudié ; car il met en relief,

BULLETIN.

497 comme on va le voir, la progression énorme que suit l'épuisement des dépôts carbonifères, et justifie, amplement, toutes les mesures prises par le Gouvernement.

ANNÉES.

1854 1855

1856 1857

1858. 1359 .

1860. 1861. 1862 1863

1864 1865

Accroissement en douze ans.

EXPORTATION.

4.309.255 9.976.902 5.879.779 6.737.718 6.529.483 7.006.949 7.412.575 7.934.332 8.330.673 8.275.212 8.800.420 9.170.477

CONSOMMATION

locale.

60.352.146 59.977.177 60.765.671 58.756.989 58.479.166 64.971.816 72.630.123 75.700.382 73.307.665 80.017.303

83.987.453 85.461.038

POPULATION.

21.792.872 22.080.499 22.369.463 22.616.839 22.810.069 22.946.998 23.181.790 23.416.264 23.655.482 23.891.009 24.127 003 24.375.000

4.861.222

25.108.893

2.582.123

(doublée).

(Près de moitié en sus).

Augmentation

d'un dixième.

En comparant ces chiffres, on voit qu'a partir de 1860, l'exportation et la consommation locale s'accroissent chaque année dans une proportion notable. Le traité avec la France, en favorisant la sortie des charbons et en donnant une impulsion nouvelle à toutes les industries, fut la cause première de ce mouvement. Si cette progression continue sur le même pied, » dit un publiciste distingué, M. Stanley Sevons, dans un ouvrage publié il y a deux ans, on verrait l'extraction du combustible atteindre, en 1900, le chiffre de 300 millions de tonnes, et de s milliards en 1950. 5oo.00c ouvriers sont aujourd'hui nécessaires à l'extraction de 92 millions de tonnes, mais il en fautirait 8 millions pour suffire aux travaux de 1950, et durant les

quatre-vingt-quatre années qui nous séparent de cette époque, l'Angleterre dépenserait Loo milliards de tonneaux de charbon. n Que de semblables supputations soient très-incertaines, nous l'admettons volontiers ; mais le tableau qui précède n'en fait pas moins ressortir éloquemment l'intérêt qui s'attache, pour une partie de l'Europe aussi bien que pour l'Angleterre, à ce que l'enquête commencée ait un résultat favorable.