Annales des Mines (1913, série 11, volume 2, partie administrative) [Image 290]

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On devra expliquer, en premier lieu, aux intéressées le jeu combiné de l'article 29 et du nouvel article 29 a du livre Ier (") du code du travail. L'article 29 permettait déjà à la femme de suspendre son travail pendant huit semaines consécutives au moment de ses couches, sans que l'employeur puisse considérer cette suspension comme une rupture du contrat de travail et sans qu'il puisse lui-même, à raison de cette seule suspension, rompre le contrat. Cette disposition a pour but d'empêcher que la femme ne perde son emploi, simplement parce qu'elle aura pris, avant et après ses couches, le repos minimum qu'exige la sauvegarde de sa santé et de celle de son enfant : une seule condition lui est imposée, celle d'avertir l'employeur du motif de son absence. Le nouvel article 29 a inséré dans le livre Ier du code du travail par la loi du 17 juin 1913, donne en outre à la femme lé droit, dès qu'elle est en état de grossesse apparente, de rompre immédiatement son contrat de travail, sans que l'employeur puisse, à raison de cette rupture, lui réclamer des don:magesintérêts, alors même qu'elle n'aurait pas observé le délai-congé fixé par l'usage ou les conventions; l'article 29 permet à la femme enceinte, si elle a besoin de repos, de quitter son emploi, quel que soit le temps qui la sépare encore de sa délivrance du moment que sa grossesse est apparente, et sans qu'il soit nécessaire qu'elle établisse son état de grossesse par un certilicat médical. La loi du 17 juin 1913 complète encore sur un autre point l'article 29. Cet article donne bien à la femme la faculté de suspendre pendant huit semaines son travail, mais jusqu'ici la femme risquait, pendant ces huit semaines, de perdre avec son salaire, tout moyen d'existence. La loi du 17 juin" 1913 lui permettra de recourir plus fréquemment à cette faculté en lui assurant, pendant ces huit semaines, le service des allocations qu'elle prévoit'. Ce sont ces mêmes allocations qui rendent également possible l'application de l'article 54 a du livre II du code du travail «jui interdit aux femmes accouchées tout travail dans les établissements industriels et commerciaux dans les quatre semain s qui suivent leur délivrance. La France était jusqu'ici un des rares pays industriels dans lesquels la réglementation du travail ne contenait aucune disposition à cet égard. De nombreuses propo(*) Volume de 1911, p. 96-102.

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sitions de loi avaient été déposées en vue de combler cette lacune ; mais toutes s'étaient heurtées à cette grave objection : comment imposer aux femmes en couches une interruption de travail qui se traduira pour elles par une perte de salaire sans compensation au moment où elles auront à faire face à de nouvelles charges ? La proposition de loi, déposée par M. Paul Strauss, sénateur, le 14 novembre 1899, sur la protection et l'assistance des mères et des nourrissons, lia les deux questions du repos obligatoire et du droit à l'assistance des femmes en couches; elle posa en principe que la prohibition pure et simple du travail pendant une période déterminée comporte nécessairement l'allocation d'une indemnité compensatrice. C'est de cette proposition de M. Paul Strauss qu'est sortie la loi actuelle du 17 juin 1913 qui repose sur le même principe, et c'est aussi en vertu de ce même principe que le législateur a voulu que le repos obligatoire de quatre semaines après les couches ne pût être imposé aux ouvrières et employées du commerce et de l'industrie avant qu'elles" fussent assurées de recevoir les allocations destinées à les indemniser, tout au moins partiellement, de la perte de leurs salaires. Cette question des allocations est capitale et domine toutes les autres dispositions delà loi : les inspecteurs devront donc y insister particulièrement, d'autant plus que les ouvrières, encore plus que les ouvriers'ne connaissent pas leurs droits. Ils devront bien faire remarquer aux femmes que ces allocations constituent, non pas une aumône, mais un droit reconnu expressément par la loi à toute femme de nationalité française et privée sources, qui se livre habituellement chez autrui à" un travail salarié comme ouvrière, employée ou domestique. En ce qui icerne l'interprétation des mots « privés de ressources », je ne puis que répéter les déclarations que j'ai eu l'honneur de présenter, d'accord avec le rapporteur, à la Chambre des députés dans les séances des 5 juin et 12 juin 1913. « Que signifie-« privée de ressources »? Cela signifie qui n'a pas d mires ressources que celles provenant de son travail. Il est évident, du moment que nous imposons à une femme l'obligation de ne pas travailler, que si elle avait des ressources la veille, puisqu'elle avait son travail, elle ne les a plus le lendemain puisqu'elle ne travaille plus (*). 11 y a tout lieu d'espérer que la bonne volonté des chefs d'éla(*) 1" séance du 5 juin 1913, p. 1737 (./. 0. du G juin 1913).