Annales des Mines (1907, série 10, volume 12) [Image 172]

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LA CATASTROPHE DE COURRIÈRES

sur les taquets ; elle n'avait donc pas sauté bien haut. Une des tôles du moulinage était soulevée. Les sonnettes du fond ne marchaient plus. M. Petitjean avait constaté que le ventilateur aspirait de l'air frais ; le goyot était donc détruit. Le ventilateur fut arrêté, et M. Petitjean fit installer une chute d'eau dans le puits pour rétablir le courant descendant. Puis il tenta avec le porion Clabecq de descendre par les échelles du goyot d'aérage; l'air y devenait vite mauvais. Bientôt ils trouvèrent des trous dans la cloison. Ils ne purent dépasser la profondeur de 70 mètres, à partir de laquelle les échelles étaient tombées. Force fut de remonter au jour. Le câble de la cage du fond fut coupé et amarré ; l'autre câble reçut un cuffat à la- place do sa cage. Pendant ces opérations, grâce àla chute d'eau dans le puits, le courant d'air descendant commençait à se rétablir. Vers neuf heures, il fut possible de descendre dans le cuffat : MM. Petitjean et Fournier, ingénieurs, Clabecq, porion d'abouts (*), et Caucheteux, brondisseur, y prirent place; à partir de 50 mètres de profondeur, ils se heurtèrent à des débris de planches, de guides, etc.; ils remontèrent un à un ceux qui paraissaient les plus dangereux. A 100 mètres, les fumées séjournaient toujours ; il fallut attendre. Quand le nuage qu'elles formaient baissa, on put poursuivre la tentative de descente ; l'obstruction devenait de plus en plus serrée ; toute la cloison de séparation du goyot s'était rabattue dans le compartiment des cages. De plus, les moises diamétrales qui portent les guides s'étaient rompues à l'une de leurs extrémités et pendaient en porte-à-faux avec les guides qu'elles soutenaient encore. MM. Petitjean, Fournier et Clabecq commencèrent la remonte, un à un, des matériaux qui encombraient le puits. A dix heures et quart (*)Le porion d'abouts et, sous ses ordres, le brondisseur sont chargés de la surveillance et de l'entretien des puits (cuvelage, guidage, etc.).

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du matin, M. l'ingénieur en chef des mines Léon, en prenant la direction du sauvetage, donna l'ordre à M. Petitjean de continuer ce travail ; c'est ce qui fut fait pendant toute la journée du 10; on put parvenir à 160 mètres environ. Vers dix heures du soir, le même jour, M. l'ingénieur des mines Leprince-Ringuet, descendu dans le tonneau, se rendit compte du danger excessif du travail tel qu'il avait été fait : on s'était avancé en se débarrassant seulement des pièces de bois qui empêchaient la descente du tonneau, sans consolider celles qui tenaient encore, mais que le battement du câble pouvait faire tomber d'un instant à l'autre sur les sauveteurs. Vers deux heures de l'après-midi, puis vers sept heures, ceux-ci avaient cru entendre un appel venant du fond, et c'est ce qui leur avait fait précipiter leur travail. M. Leprince-Ringuet donna l'ordre de ne pas descendre plus bas avant d'avoir consolidé, même d'une façon sommaire, les pièces branlantes du guidage. Puis il s'occupa de préparer la chute de poids dans le puits pour faire un trou à travers les matériaux obstruants» Mais ce projet fut abandonné, car il devenait sans objet immédiat, quand on apprit un peu plus tard que l'accès des accrochages du n° 3 était possible en venant du puits n° 10. Le travail de consolidation, puis d'avancement dans le puits n° 3 n'en continua pas moins toute la nuit et toute la journée du 11. Le 11 au soir, à dix heures, quand il fut arrêté, on était parvenu à 170 ou 180 mètres. Fosse n° 4-11. — Au puits n° 11, le mécanicien et le moulineur virent sortir du puits un nuage de poussières noires ; le moulineur, qui se trouvait tout près du puits, tomba à la renverse, sans se faire de mal. La cage du jour était en train d'être soulevée au-dessus des taquets pour redescendre ensuite; elle fut envoyée aux molettes, beaucoup plus, probablement, par suite de l'émotion du nié-