Annales des Mines (1896, série 9, volume 10) [Image 22]

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APPLICATIONS GÉOLOGIQUES

DE LA SPÉLÉOLOGIE

relles de Caumont (Eure), le milieu est si tendre et délayable

contact des formations crevassées, s'y perdent subitement dans des fentes assez larges pour les engloutir en entier;

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qu'il est impossible de distinguer l'une de l'autre la corrosion et l'érosion. Coupoles des voûtes. - Cependant, c'est assurément

tette dernière qui a creusé dans les voûtes un certain nombre de cavités en forme de coupoles, vraies mar-

mites de géants renversées ; on en rencontre dans toutes les cavernes, même dans les calcaires si durs de PeakCavent (Derbyshire) et d'Ingleborough (Yorkshire); elles sont dues au tournoiement de l'eau sous pression. Enfin, les angles émoussés, les surfaces polies comme du marbre, les galets roulés, les larges gouttières d'écoulement, etc., abondent suffisamment pour trahir à chaque pas l'énorme importance de l'érosion. Et il faut: bien conclure que, pour les rivières souterraines, et dans les -formations calcaires, l'action chimique . et l'action mécanique ne doivent et ne peuvent pas être considérées comme agissant séparément. CIRCULATION DES EAUX D'INFILTRATION DANS LES CAVERNES.

Ayant ainsi établi comment l'eau d'infiltration agit sur les

roches et élargit les joints et les lithoclases en cavernes,

examinons sa circulation souterraine, qui comprend : 1° le 2° celui de l'écoumode- d'introduction dans le sol ; 3° celui de l'intérieur; lement ou de la propagation à la sortie sous forme de sources*.

Les eaux I° Pénétration des eaux dans le sol. météoriques pénètrent dans les fissures des terrains crevassés de diverses manières: ou bien goutte à goutte et inégalement vite, dans -les toutes petites fentes la terre (leptoclases) plus ou moins bien obturées par

végétale ; c'est ce qu'on nomme particulièrement le suinteou bien -sous forme de ruisseaux nés sur des ment ; terrains imperméables et qui, amenés par leur pente au

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le terme d'absorption est généralement consacré à ce deuxième mode de pénétration. Les fentes d'absorption elles-mêmes sont de trois sortes: entonnoirs sans profondeur

remplis de terre, de bois mort et d'autres matériaux de

transport, entre lesquels l'eau seule peut trouver un passage ; ce sont les bétoires de Normandie ; les pertes du Ventoux, de la Charente, d'Issendolus (Lot), les

Sauglôcher (suçoirs) des Autrichiens, les swallow-holes (avaloirs) des Anglais, les Aiguigeois de Belgique, les pimors de Dalmatie, etc., etc. ; ils sont bouchés pour l'homme; cavernes à pente douce ou rapide (Han-surLesse, Adelsherg, Bramabiau, Réveillon, etc.), oit le courant peut être suivi plus ou moins loin ; et pour lesquelles j'ai proposé le nom de goules, usité dans l'Ardèche; les grands Katavothres de Grèce ont généralement cet aspect ; puits verticaux, enfin, oit le ruisseau se précipite en cascade dans l'abîme. La plus grande confusion règne dans la nomenclature de ces trois sortes de puits d'absorption : MM. Kraus (*), Ovijié et moi-même nous n'avons pas pu encore identifier dans une bonne classification les innombrables noms locaux qui, en France et en Autriche surtout, s'emploient trop souvent les uns pour les autres. Celui .de puits naturels

reste le plus exact ; et celui d'abîme (aven dans une partie de la France) convient .bien aux noirs gouffres, pro-

fonds, dont j'ai exploré plus de cent depuis 1888. Cette dernière catégorie de cavités naturelles, ainsi percées à pic clans la terre, est peut-être celle qui a donné lieu aux plus vives polémiques. J'indique tout de suite que, dès mes premières descentes,

j'ai considéré en principe les abîmes comme formés de (*) 1Iohlenkunde, p. 138.