Annales des Mines (1890, série 8, volume 17) [Image 169]

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NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR EDMOND FUCHS.

NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR EDMOND FUCHS.

Soissonnais et le Tardenois. C'est là qu'un jour, après une laborieuse journée de marche, l'état défectueux de son accoutrement lui attire, de la part de la gendarmerie, une amusante mésaventure, dont il a légué le récit à ses enfants dans une pièce de vers remplie de la plus spirituelle bonhomie.

Fuchs retourne en Espagne en 1881; voyant croître, avec son expérience, sa situation officielle; car un décret du 11 juillet lui apporte sa nomination d'ingénieur en chef. Trois mois après, le 18 octobre, M. Le Myre de Vilers, gouverneur de la Cochinchine, ayant demandé au gouvernement d'organiser une exploration minière de la colonie, ainsi que du Cambodge et du Tonkin, Fuchs est officiellement désigné pour cette mission, qui va enfin lui procurer l'occasion longtemps souhaitée d'aborder les

pays de l'Extrême-Orient. Le 29 octobre , emmenant comme secrétaire un ancien élève de l'École polytechnique et de l'École des mines, M. Saladin, il s'embarque sur le paquebot l'Amazone. Là, il trompera les longues heures de la traversée par une correspondance active, où il aime à faire partager aux siens toutes ses impressions nouvelles, complétant ses descriptions par des dessins où se révèle un crayon alerte et spirituel. D'autres fois, les circonstances qu'il rencontre ou les sites devant lesquels il passe lui inspireront des poésies pleines de charme et de sentiment. Ce côté particulier de ses heu-

reuses facultés mérite d'être mis en lumière et il est vraiment à souhaiter que, quelque jour, une publication

spéciale fasse connaître à d'autres qu'aux intimes

les

gracieux épanchements où se complaisait sa riche imagination. Nombreuses furent les péripéties de ce voyage, pen-

dant lequel Fuchs fut, tour à tour, reçu avec des honneurs presque princiers, ou bien, comme aux environs d'Hanoï, accueilli par la fusillade des pirates chinois.

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Après avoir touché à Saïgon, on s'embarqua sur l'Antilope, navire de l'État, mis spécialement à la disposition des explorateurs, qui étudièrent d'abord la côte annamite. A Hué, ils frirent présentés au premier ministre de l'invisible empereur Tu-Duc, dans une audience émouvante où le consul français, qui accompagnait Fuchs, donna solennellement lecture des instructions de son gouvernement , les premières où l'intention d'assurer

désormais la sécurité sur le Fleuve-Ronge ait été nettement proclamée; prélude d'une politique active qui devait entraîner de si graves conséquences. Ensuite il fallut franchir, non sans difficultés ni même sans dangers, la barre du fleuve, pour pénétrer, à l'époque de Noël, dans le delta du Tonkin. Le principal résultat du voyage fut la reconnaissance précise des gisements houillers de la côte, dont la description, oeuvre commune de Fuchs et de M. Saladin, a été publiée en 1882 dans les Annales des mines. A ce mémoire fut jointe une étude .paléontologique de M. Zeiller, montrant, d'a-

près les empreintes végétales recueillies, que les gîtes appartenaient à l'infralias. Pourtant la nature des schistes encaissants, ainsi que l'aspect des grès rouges subordonnés, avaient produit sur des observateurs européens exactement la même impression que nos gisements français du carbonifère supérieur et du permien.

Le mois de janvier 1882 fut consacré à l'exploration du Tonkin proprement dit, où Fuchs ne vit guère, en fait de métaux, que des traces d'or dans les ravins. Cette portion du voyage fut particulièrement pénible. Trop lourd

et de trop forte corpulence pour s'accommoder du réghne des sampangs, ces petits bateaux étroits et voûtés, où les indigènes se blottissent sans peine , Fuchs dut marcher dans l'eau malsaine des rizières, où sa jambe écorchée contracta bientôt une grave irritation. Quand il revint à Saïgon, les instances du gouverneur ne purent