Annales des Mines (1887, série 8, volume 11) [Image 190]

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SUR LA CONSTITUTION DES MORTIERS. RECHERCHES EXPÉRIMENTALES

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leur prise, qui dure quelques heures, facilite beaucoup leur emploi.

Les chaux hydrauliques 2° Chaux hydrauliques. mélanges naturels ou artis'obtiennent par la cuisson de ficiels de calcaires et d'argile renfermant moins d'argile que les mélanges à ciments. Elles sont caractérisées parla propriété qu'elles ont de s'éteindre comme la chaux, ce qui dispense de les pulvériser mécaniquement avant leur emploi. Elles font prise beaucoup plus lentement et atteignent une dureté moins grande que les ciments. Elles furent employées de toute antiquité, confondues avec les chaux grasses. C'est seulement en 1818, que Vicat reconnut la nature et les propriétés de ces chaux.

30 Mortiers de pouzzolane. Lès pouzzolanes sont des corps qui, mêlés à la chaux grasse éteinte, communiquent à celle-ci la propriété de faire prise sous l'eau ; ce sont des composés essentiellement siliceux et dans lesquels la silice est en partie soluble dans la potasse. Les mortiers de pouzzolane ont été inventés par les Romains, qui en ont fait un grand usage et, depuis eux, ils sont restés jusqu'au commencement de ce siècle, jusqu'aux travaux mémorables de Vicat sur les chaux hydrauliques, les seuls mortiers employés d'une façon régulière pour les travaux à l'eau.

Les recherches théoriques sur la Bistorique. constitution des mortiers hydrauliques ont été nombreuses; je les résumerai rapidement en discutant au fur et à mesure la valeur des opinions que je rapporterai.

Smeaton (*), ingénieur anglais, signala, en 1756, la pré-

sence d'argile dans les calcaires à chaux hydrauliques,

mais cette observation passa inaperçue. Praticien distingué, auteur de travaux importants, il jouissait d'une grande réputation comme ingénieur, mais n'avait aucune autorité comme chimiste. Quelques années plus tard, le savant suédois Bergmann ayant analysé le calcaire à chaux hydraulique de Lena, y trouva quelques centièmes de manganèse et attribua à la présence de ce corps les qualités hydrauliques de la chaux. Cette opinion, grâce à l'autorité du nom illustre .de son auteur, fut acceptée sans discussion. Guyton de Morveau (*), cherchant à contrôler les idées de Bergmann, analysa les principales chaux hydrauliques de France ; il reconnut. que toutes renfermaient de l'argile, mais une seule du manganèse. Il n'en affirma pas moins, sur la foi du chimiste suédois, que le manganèse était la cause de l'hydraulicité des chaux. Saussure (**) fit le même travail pour les 'chaux de Suisse et n'en trotiva pas qui fussent manganésifères. Il n'en déclara pas moins, sur la foi de Bergmann et -de Guyton de Morveau, que le manganèse était la substance hydraulisante par excellence ; mais il ajoute timidement que l'argile peut, dans une certaine limite, remplacer le manganèse tout en lui étant bien inférieure. Il expliqua l'action de l'argile en supposant qu'elle jouait le rôle de pouzzolane, c'est-à-dire qu'après 'la cuisson du calcaire il reste un mélange de chaux vive et-d'argile cuite non combinées ; opinion erronée, qui a pourtant

été reproduite encore dans ces dernières années et

donnée comme nouvelle.

La première observation précise et exacte sur les

chaux hydrauliques est due à Collet-Deseotils, ingénieur des mines, professeur de chimie à l'École des mines. Il. (*) Académie de Dijon, 1785.

(") Voyage dans les Alpes, t. III, p. 192. (") Opuscules chimiques, t.

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