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ENQUÊTE OFFICIELLE SUR LA CONDITION DES OUVRIERS

émise par l'ingénieur principal de Charleroi, au sujet des subsides nécessités par l'adjonction, à l'école industrielle de cette ville, d'une section destinée à former des conducteurs de travaux : « Comme celle section,—dit-il, —dont l'utilité et la nécessité ne se font as sentir, ne lardera pas à disparaître, faute d'élèves, les communes pourront peut-être, sans faire tort à la section des ouvriers, relirer ces subsides pour les appliquer plus utilement à l'instruction de la classe travailleuse, qui en a si grand besoin. Je crois cependant, si j'en juge par ce qui s'esl passé à Charleroi, qu'on obtiendra difficilement des subsides de l'État, à moins d'adopter les programmes stéréotypés de ses écoles industrielles, qui, il faut bien le dire, ne sont pas à laporlée de la classe ouvrière de notre bassin. Ces programmes, coordonnés pour trois années d'études, sont peut-être bons pour les ■villes; mais ils sont trop savants, trop chargés pour que nos ouvriers puissent en retirer tout le fruit désirable. Quel courage et quelle énergie ne faudrait-il pas â un ouvrier pour aller, après un rude labeur de dix à douze heures, assister tous les jours, à l'exception du samedi, à des leçons qui durent deux heures et sont considérablement au-dessus de son instruction première? On ne devrait pas perdre de vue que l'ouvrier industriel a peu de temps à cjnsacrer par jour, mais qu'il peut disposer de bon nombre d'années. En admettant qu'il commence à 14 ans, il peut déjà acquérir beaucoup de connaissances jusqu'à 23 ou 24 ans, âge avant lequel il ne doit guère espérer devenir conlre-maitre, chef de brigade on porion. »

Des écoles industrielles existent, non-seulement à- Charleroi, comme nous venons de le voir, mais à Dour, Houdeng (Hainaut), à Namur, Liège, Seraing et Huy (province de Liège). A Seraing, un sous-ingénieur professe un cours gratuit d'exploitation des mines. Mais peut-être faut-il étendre à toutes ces écoles l'assertion émise, par un des ingénieurs principaux de Liège, au sujet de celle de cette ville, c'est qu'elle n'est fréquentée par aucun ouvrier mineur! Pour apprécier l'état moral d'une population, il ne faut pas négliger ses plaisirs : « Les sociétés de chant, d'harmonie, de fanfares, sont nombreuses au Borinage, — dit l'ingénieur de cet arrondissement. Beaucoup de charbonnages les encouragent et je ne sais s'il existe une seule commune industrielle qui n'ait sa société de musique, quelquefois plusieurs. En ce cas, souvent la rivalité s'en mêle, et ces institutions, qui devraient être un trait d'union entre les habitants d'une mêu.e commune, y sèment et perpétuent souvent des dissentiments. « Des sociétés de jeu existent au Borinage, surtout des sociétés de tir à l'arc, qui, par l'importance des sommes qu'on s'y dispute, ont un succès qu'on peut qualifier de déplorable. Le jeu de balle est également entré dans les habitudes du Borain. Dans les communes de l'agglomération comme à Mous

DANS LES MINES ET USINES DE BELGIQUE.

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même, les ducasses comprennent, comme réjouissance, un concours au jeu de balle, où les sociétés des communes à la ronde viennent se disputer les prix. La lutte, les jours de décision, est suivie avec passion par les habitants des communes dont les parties sont en lice. »

Après la lecture de cet exposé, on restera convaincu,—comme l'ingénieur auquel nous avons emprunté la dernière citation, — que, si de nombreux efforts ont été faits pour l'amélioration des conditions d'existence de la classe ouvrière de l'industrie minérale ou métallurgique en Belgique, il reste encore beaucoup à faire sous ce rapport; mais, chacun apportant sa pierre à l'édifice, il n'y a pas de doute qu'il ne ressorte de l'enquête due à l'initiative ministérielle des enseignements précieux, qui aideront puissamment à procurer le bien-être physique et moral à cette classe intéressante.