Annales des Mines (1899, série 9, volume 8, partie administrative) [Image 266]

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légalement acquittée aux époques usitées pour la paye du salaire dans l'entreprise à laquelle appartient la victime. Si l'accident a entraîné une incapacité permanente, la victime a droit, à partir de la décision judiciaire qui fixe sa situation, non plus à la simple indemnité journalière de demi-salaire, mais à une rente viagère payable par trimestre. La rente varie suivant que l'incapacité permanente est partielle ou absolue. En cas d'incapacité partielle, c'est-à-dire d'accident réduisant la capacité de travail et de gain de la victime, l'arrachant même peutêtre à sa profession, tout en lui laissant le moyen de se livrer à un autre travail industriel, la rente est égale à la moitié de la réduction de salaire que peut entraîner l'accident. En cas d'incapacité absolue, excluant la victime de toute profession industrielle, la rente est égale aux deux tiers du salaire. Dans les deux cas, le salaire qui sert de base au calcul de l'indemnité n'est plus, comme au cas d'incapacité temporaire, le salaire au jour de l'accident, mais le salaire « annuel », c'est-à-dire le total des gains normalement réalisés ou réalisables par la victime dans les douze mois antérieurs à l'accident, soit dans la même industrie, soit dans des industries ou occupations alternantes. Enfin, si l'accident a entraîné la mort, la loi attribue des renies également calculées d'après le salaire « annuel » de la victime, à ses ayants droit, dans l'ordre et les proportions que détermine l'article 3. Sans entrer dans le détail de ces attributions, je me borne à vous signaler qu'elles ont, en deux points, ému un certain nombre de chefs d'entreprise et même d'ouvriers, qui ont craint d'en voir découler, par un effet directement contraire aux intentions du législateur, une sorte de prime à l'emploi des ouvriers célibataires et des ouvriers étrangers. Pour répondre à ces appréhensions, il suffira sans doute de rappeler que l'assurance, refuge moralement obligatoire de pre'sque toutes les entreprises assujetties, égalise complètement les risques et, on peut dire, confond dans un même pourcentage de salaires les ouvriers célibataires ou mariés, étrangers ou Français. Que si, d'ailleurs, on objectait que de très grandes exploitations peuvent ne pas recourir à l'assurance, on répondrait que la question ne se pose que pour les accidents mortels. Les charges qu'ils entraînent n'atteignent pas, dans l'ensemble, le cinquième des dépenses afférentes aux accidents. L'économie réalisée par l'exclusion chimérique de tous les ouvriers qui ne seraient pas célibataires ou étrangers serait donc insignifiante.

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Aussi bien la très grande majorité des chefs d'entreprise ne manquera pas de recourir aux divers procédés d'assurance que la loi met à.leur disposition et dont, sauf des cas très rares, la prudence la plus élémentaire les invite à user. En ce qui concerne les frais et indemnités d'incapacité temporaire, le chef d'entreprise peut se décharger, avec l'assentiment de ses ouvriers, pour les trente, soixante ou quatre-vingt-dix premiers jours d'incapacité, sur une société de secours mutuels, en traitant avec elle dans les conditions prévues aux statuts-types approuvés par M. le ministre de l'intérieur, le 16 mai dernier (*). S'il est exploitant de mine, minière ou carrière, il peut utiliser la caisse de secours organisée en exécution de laloi du 29 juin 1894(**), moyennant allocation d'une subvention complémentaire annuelle, dont les conditions et le montant sont approuvés par M. le ministre des travaux publics. Dans toute autre industrie, il peut enfin créer une caisse particulière de secours, analogue aux caisses de secours obligatoires pour les mines, dans les conditions déterminées par le titre III de la loi du 29 juin 1894 et par le décret du 10 mai 1899 (*"), à charge de prendre alors à son compte le tiers de la cotisation normale à la caisse de secours, et, en outre, le montant de la dépense afférente aux incapacités temporaires occasionnées par les accidents. En ce qui concerne les rentes dues en cas d'incapacité permanente ou de mort, le chef d'entreprise peut s'adresser à la caisse nationale d'assurance contre les accidents et à tous ses préposés dans les départements (trésoriers-payeurs généraux, receveurs particuliers des finances, percepteurs, receveurs des postes). Cet établissement, institué par la loi du U juillet 1868, a été autorisé, par la loi du 24 mai 1899 (****) et par le décret du 26 mai (**"), à assurer les risques prévus par la loi du 9 avril 1898, soit uniquement pour la constitution des rentes, soit, en outre, pour les frais funéraires, indemnités journalières et frais médicaux dus jusqu'à constitution des rentes. Qu'il s'agisse enfin de l'incapacité temporaire ou bien de l'incapacité permanente et de la mort, les assujettis peuvent s'assurer intégralement, en s'adressant soit à des syndicats de garantie solidaire, soit à des sociétés d'assurances mutuelles, soit à des (*) Voir suprà, p. 366. (**) Volume de 1894, p. 358. (***) Voir suprà, p. 365. (****) Voir suprà, p. 373 et 376.