Annales des Mines (1914, série 11, volume 5) [Image 220]

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LES GAZ RARES DES GRISOUS

LES GAZ RARES DES GRISOUS

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Nous remonterons ici encore, comme nous l'avons fait lorsque nous nous sommes proposé d'expliquer la constance de nos rapports, jusqu'à la nébuleuse solaire. La masse gazeuse incandescente devait être un mélange relativement homogène dans ses différentes parties. Le fragment constitutif de la Terre s'étant détaché, celle-ci comprend bientôt trois régions concentriques : une masse en fusion, une écorce solide hétérogène et l'atmosphère gazeuse. Au cours de l'évolution continue de la Planète,

tandis que les autres éléments contractaient des combinaisons mutuelles, les gaz rares, envertu.de leur inertie chimique, et aussi, en grande partie, l'azote, élément relativement inerte, sont demeurés libres, et comme ils sont difficilement liquéfiables, ils ont conservé l'état gazeux; et leurs rapports quantitatifs mutuels, dans l'atmosphère externe comme dans les mélanges gazeux souterrains qui furent emprisonnés ou occlus dans les roches de l'écorce au moment de sa solidification, ont dû se maintenir peu différents de ce qu'ils étaient au début (*). Bref, notre azote brut (azote -f- gaz rares) a gardé intact son cachet d'origine depuis l'époque de la nébuleuse jusqu'à nos jours. 4° L'azote brut occlus est susceptible d'être dégagé par diverses causes, parmi lesquelles l'action des eaux profondes n'est, sans doute, pas la moins importante (*■*), Celui qui est emprisonné (dans des poches plus ou moins volumineuses) peut être libéré sous l'influence de mouvements d'ensemble ou locaux de l'écorce : tremblements de terre, éruptions volcaniques, etc., amenant des ruptures et des dislocations. Quels que soient les mécanismes, l'azote brut, une fois mis en liberté, se répandra de proche en proche, à travers les fissures, entraîné par les eaux, par diffusion, etc., dans les différents milieux de l'écorce. Il pénétrera, notamment, dans la houille, et ira se mêlerait méthane du grisou. Il rencontrera également les pétroles, et, avec les hydrocarbures volatils de ces derniers, il s'échappera dans l'atmosphère.

(*)Th. Schlœsing fils (loe.cit.) était arrivé à conclure également que l'azote des grisous ne pouvait être issu de la houille. 11 pensait qu'il provenait de l'atmosphère: la houille aurait emprisonné de l'air en donnant naissance au grisou. Nous proposerons plus loin (en 3°) une autre explication. (**) Observons que l'azote brut de l'air atmosphérique s'écarte de la plupart des azotes bruts des mélanges souterrains par sa faible teneur en hélium (1/160.000).

(*) Hormis ce qui regarde l'hélium, dont nous savons qu'il y a production continue aux dépens des corps radioaclifs dans l'écorce terrestre, et qui est plus ou moins abondant dans les mélanges souterrains, par rapport aux autres gaz inertes, suivant la nature des terra. ns traversés. (**) Armand Gautier a émis l'idée que la plus grande partie des gaz thermaux doit provenir du noyau terrestre incandescent (Revue scientifique, 2 et" novembre 1901).

possible, vient d'ailleurs, ainsi que les gaz rares qui l'accompagnent (*). On prouverait par le même raisonnement que l'azote des gaz de pétrole a également une origine minérale, et que, comme les gaz rares, il vient aussi d'ailleurs. On peut donc dire que chaque valeur des rapports mutuels entre l'azote, l'argon, le krypton et le xénon, sensiblement la même dans tous les mélanges gazeux naturels, caractérise l'azote brut de ces mélanges et en est comme la « marque» de fabrique ». L'air atmosphérique, rappelons-le, ne fait pas exception à la règle, puisque les divers rapports y présentent des valeurs voisines de celles qu'on trouve dans les mélanges souterrains. Et l'analogie qui apparaît, à ce point de vue, entre l'atmosphère externe et l'atmosphère interne de la Terre ne laisse pas que d'être fort suggestive (**)-. 3° Cet azote brut, dont nous venons ainsi de prouver la communauté d'origine pour tous les mélanges gazeux naturels, d'où provient-il ?