Annales des Mines (1907, série 10, volume 12) [Image 241]

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soient quelque peu sustentés au moyen des provisions de leurs maleties, de leurs boutelots et des œufs que l'un ou l'autre d'entre eux avait pu apporter pour son repas du matin. En ce qui concerne la fosse n° 3, deux faits ont été avancés. D'après MM. Cordier et Evrard, M. Surmont, employé de la Compagnie de Courrières, aurait déclaré devant la commission avoir vu onze morts dans le passage de Julie, où il n'y en avait pas le 10 mars. Bien que la déposition de Surmont ait été immédiatement après rectifiée par celle du vérificateur Biaise et qu'elle ne figure pas avec cette précision dans les notes prises par le secrétaire et transformées par lui en procès-verbal, la commission a dû l'examiner à nouveau. Le délégué mineur Simon, dit Ricq, dans ses explorations des 10 et 11 mars, M. Leprince-Ringuet le 11 mars, ont vu et noté huit cadavres dans la voie de fond de Julie à 280, et trois dans labowette, à l'entrée do Julie, soit au total onze cadavres, dont sept ont été reconnus dès ce moment et quatre sont restés non reconnus. Le délégué Simon a formellement déclaré depuis lors n'avoir pas vu, le 30 mars, d'autres cadavres que ceux déjà vus par lui le 10 et le 11. Surmont, interrogé à nouveau par les ingénieurs, a déclaré en avoir vu, non pas onze, mais un nouveau; il a d'ailleurs reconnu qu'il avait pu passer à côté le 11 mars sans le remarquer. Le fait signalé reposant uniquement sur une déclaration mal formulée ou mal comprise de Surmont, et démenti par les témoins les plus dignes de foi, paraît à la majorité de la commission ne pas devoir retenir l'attention. L'autre fait, celui des corps trouvés à l'accrochage 303 de la fosse n° 3, paraîtau contraire exact. Les 10 et 11 mars, le délégué Simon et le porion contrôleur Pélabon n'avaient vu, près de l'accrochage 303 de la fosse n° 3, qu'un cadavre et n'avaient pu le reconnaître. Le 30 mars, on y trouva cinq cadavres : celui déjà vu le 10 et quatre autres

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trouvés assis et plus ou moins penchés entre les portes de l'accrochage. Ils furent remontés et autopsiés le 14 avril. M. le procureur général près la Cour d'appel de Douai a eu l'obligeance de communiquer à la commission le rapport des médecins légistes commis par la justice. Il résulte de ce document que : Le cadavre 242 présentait des brûlures sur toute la face et sur le thorax ; Le cadavre 243 portait un maillot complètement brûlé laissant presque à nu le thorax, qui était le siège de brûlures très étendues ; d'autres brûlures siégeaient à la face, à l'abdomen, aux deux jambes ; Le cadavre 244- portait des brûlures sur la face, le thorax, l'abdomen et les deux jambes ; Le cadavre 245 avait la figure protégée par un fichu de laine à moitié brûlé, les parties du visage non recouvertes par ce fichu étaient le siège de brûlures étendues'; le thorax présentait de nombreuses brûlures, ainsi que le ventre et les deux jambes. Et le rapport conclut comme suit : « Nous concluons que ces quatre ouvriers ont été d'abord brûlés et que la mort doit être attribuée à l'empoisonnement par l'oxyde de carbone. L'état des brûlures, qui ne présentaient aucun travail de réparation, indique bien que le décès n'est pas postérieur au 10 mars. » Eu présence d'une affirmation aussi formelle, il semble (pie l'on doive admettre ou tout simplement que ces quatre malheureux se trouvaient déjà, le 10 mars, au pointoùon les a retrouvés le 30, et qu'une circonstance quelconque avait empêché de les y voir; ou, tout au moins, qu'ils n'ont que peu survécu à l'intoxication qui avait suivi l'explosion et sont venus mourir à l'accrochage du puits 3, peu après 1 exploration du 11 mars, comme ils seraient morts en tout autre point de la mine.