Annales des Mines (1907, série 10, volume 12) [Image 175]

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LA CATASTROPHE DE COURRIÈRES

Barbe Sud-Ouest, à l'extrémité du recoupage de Joséphine. Les 8 ouvriers qui travaillaient de ce côté (2 dans Cécile, 2 au recoupage, 4 dans Sainte-Barbe) s'étaient réfugiés dans le cul-de-sac de Sainte-Barbe. En se retirant, ils bouchèrent avec leurs effets les buses qui aéraient le front du recoupage et celui de Sainte-Barbe. Malgré ces . deux bouchons, les mauvais gaz s'avançaient par les fuites des portes ; les 8 ouvriers se décidèrent vers huit heures du soir à tenter de passer au travers ; 6 d'entre eux tombèrent en route asphyxiés ou intoxiqués, les 2 autres réussirent à gagner l'accrochage en passant sur les éboulements des treuils et de la voie de fond de Joséphine Sud-Ouest. Ils arrivèrent à l'accrochage à onze heures et demie du soir, le 10 mars. En les voyant arriver, le porion Sylvestre, dont le fils travaillait dans SainteBarbe, quartier d'où ils venaient, s'élança de ce côté pour tâcher do le ramener ; l'ouvrier Delvalléo le suivit. Ils ne revinrent ni l'un ni l'autre, et leurs corps furent retrouvés par la suite dans la voie de fond de SainteBarbe Sud-Ouest. Sauf ces 25 vivants, on ne sortit par le n° 4, les 10 et 11 mars, que des cadavres au nombre de 43, rencontrés dans les voies que l'on réparait. Fosse n° 2. — Aun° 2, il n'y eut pas de dégâts au jour, et l'on ne s'y aperçut de rien sur l'instant. Les volets qui fermaient le puits ne bougèrent pas ; les cages qui étaient en marche n'eurent aucun dommage. L'alarme fut donnée au jour par un surveillant qui se trouvait à l'accrochage de 306, quand il fut renversé par une violente secousse; immédiatement après il vit une fumée . noire épaisse sortir du beurtia d'accrochage. Il remonta aussitôt chercher le chef porion qui s'apprêtait à descendre. Après avoir envoyé prévenir l'ingénieur, M. Voisin, ils redescendirent ensemble à 306 ; le beurtia d'accro-

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chage était toujours plein de fumées; il en était de même du beurtia Bourlard à 150 mètres du puits dans la bowette Nord. Le chef porion alla voir de ce côté, mais revint à l'accrochage indisposé ; il tomba en y arrivant. L'ingénieur, M. Voisin, y arrivait au même moment ; il chargea le chef porion dans la cage, y fit monter quelques autres ouvriers qui se trouvaient là, en renvoyant les autres vers le n° 10. La cage, une fois remontée au jour, fut redemandée par la sonnette, à l'étage de 258. M. Voisin redescendit avec le brondisseur Wagon, en donnant l'ordre au mécanicien de ne les descendre sous aucun prétexte au-dessous de cet étage. A 258, il fit monter dans la cage trois ouvriers qui se trouvaient là ; le brondisseur sonna « hue » ; mais, par suite d'une erreur inexplicable, la cage se mit à descendre jusqu'à 306, plongeant dans les gaz méphitiques les 5 hommes qu'elle renfermait. Tous s'affaissèrent dans la cage, sauf le brondisseur Wagon; les lampes s'éteignirent. Arrivé à 306, Wagon eut la présence d'esprit et le courage de sauter dans l'obscurité sur le plat de l'accrochage, et d'y sonner « hue » ; puis, il s'enfuit seul vers le n° 10. La cage remonta; un galibot évanoui qui s'y trouvait laissait pendre au dehors son bras droit, qui fut broyé. M. Voisin eut également un pied brisé. A partir de ce moment, sept heures et demie environ, le puits n° 2 devint impraticable, les fumées s'y élevant peu à peu. On ne put désormais pénétrer dans les travaux que par le n° 10, situé à 500 mètres au Sud du n° 2 et qui communique directement avec lui par des bowettes de puits à puits. Les ouvriers survivants du n° 2 et tous les ouvriers du n° 10 remontèrent par len° 10, à partir de sept heures et demie environ. Ce furent d'abord les ouvriers du quartier du Sud du n° 2, les plus voisins de l'accrochage, qui avaient été bien vite mis au courant et qui sortirent d'eux-