Annales des Mines (1902, série 10, volume 2) [Image 150]

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BULLETIN

On a remarqué que l'abondance des éléments éruptifs était, pour les filons de quartz, un signe de fréquence et de richesse. Sur les flancs de cette arête cristalline reposent de part et d'autre les importantes formations du grès nubien ; on y trouve de puissantes masses d'oxydes de fer et de manganèse et quelques gisements d'hématite dure. On n 'a découvert dans ces formations aucun débris fossile, à part de rares fragments de bois pétrifié recueillis dans le Wady Allowi, à l'Ouest d'Assouan. Le grès nubien n'est pas toujours en contact direct avec le massif cristallin : les premières assises sont parfois formées de conglomérats quartzeux alternant avec des sables et des argiles; ailleurs, et surtout vers le Nord, s'interposent de grosses lentilles d'un conglomérat sombre, très dur, formé de débris des terrains cristallins et que les Romains ont autrefois exploité à Hammamat comme pierre d'ornement. L'inclinaison générale des couches nubiennes est dirigée vers le Nord; c'est au Sud qu'elles atteignent leur plus grand développement. Elles sont surmontées par le crétacé discordant qui s'étend au Nord-Est de Keneh et le long de la vallée du Nil; on a prétendu qu'il existait des gisements de houille dans les synclinaux de cette dernière formation : ce serait une découverte d 'uni 1 importance capitale ; mais il semble bien qu'elle ne repose que sur l'observation des quelques couches de sables charbonneux à empreintes végétales, qui se rencontrent parfois à la base du crétacé. Le tertiaire, principalement représenté par un calcaire nummulitique, n'a qu'un faible développement dans la région et n'est d'aucun intérêt pour la question présente. I.a partie principale du rapport de M. Alford est celle qui a trait aux conditions d'exploitation. On avait toujours pensé que le manque d'eau serait un obstacle insurmontable pour toute tentative d'exploitation de mines dans la zone désertique située à l'Est du Nil. M. Alford n'est pas de cet avis : il reconnaît que l'eau y est actuellement très rare, mais il estime que l 'on pourrait s'en procurer sans trop de difficultés, au moins dans la région montagneuse. Assurément il est impossible de compter sur les ressources actuelles : l'eau qu'on trouve après les pluies dans les creux de rochers est desséchée au bout d 'un temps très court, et ce qu'on appelle source des Bédouins consiste en de simples trous creusés dans le lit des wadys, où filtre une faible quantité d'eau qui, par suite de la dissolution 4e sels des sables environnants, est généralement saumùtre et

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impropre à l'alimentation. Mais, si l'on peut encore disposer de ces trop précaires ressources, c'est parce que le sous-sol granitique est imperméable aux eaux; il ne serait pas difficile d'utiliser cette propriété, et de créer de vastes réservoirs au moyen de digues et barrages, dont la construction serait certainement rendue très aisée par la constitution topographique particulièrement favorable de la région des wadys. D'ailleurs, en tous les points où les Anciens ont exploité l'or, on retrouve encore des citernes, des réservoirs cimentés partiellement ruinés ou complètement remplis de sable; il suffirait de peu de chose pour les rendre utilisables. Ainsi, d'une façon ou de l'autre, on peut sans trop de peine créer des réservoirs de capacité suffisante pour que les pluies de printemps et d'automne fournissent toute l'eau nécessaire à l'exploitation et à l'alimentation. Il est probable que la question du combustible est plus grave que celle de l'alimentation d'eau : vu l'absence presque absolue de toute espèce de bois, vu le prix du charbon à Suez, la solution la plus économique et la plus pratique serait vraisemblablement de se servir de pétrole ; il faudrait l'importer en Egypte, puis, soit du Nil, soit de la mer Rouge, le conduire à dos de chameau jusque dans les montagnes. Le transport d'une charge de chameau (150 à 200 kilogrammes) revient à 0 fr. 60 par kilomètre, soit :i à 4 francs la tonne kilométrique. Les gisements du versant oriental jouissent, au point de vue des transports, d'un avantage considérable, car ils ne sont qu'à quelques kilomètres de la côte de la mer Rouge. Pour la main-d'œuvre, les fellahs sont susceptibles de rendre de bons services, lorsqu'ils sont bien dirigés ; il leur suffit d'un salaire de 1 à 2 francs par jour. M. Alford n'a pu se rendre compte de l'état des mines anciennes et de la profondeur à laquelle les travaux avaient été poussés ; il a reconnu de nombreux orifices de galeries; mais elles étaient complètement obstruées par les sables, et il eût fallu entreprendre de véritables travaux de recherche pour y pénétrer à nouveau. Il a remarqué que les travaux se maintenaient toujours dans le quartz et que les Anciens n avaient jamais cherché à rejoindre le filon par une galerie au rocher débouchant au fond d'un wady, quoique la disposition des lieux s'y prêtât admirablement. Iians le voisinage des mines, M. Alford a vu de très nombreux vestiges de constructions anciennes, dont les murs sont presque tous rasés ou enfouis sous le sable; il a rapporté d'intéressantes