Annales des Mines (1901, série 9, volume 19) [Image 180]

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DISCOURS PRONONCÉ AUX FUNÉRAILLES DE M. MOUTARD

ment équitable à l'égard d'un professeur aussi éminent, auquel la loyauté de son attitude, à la suite du coup d'État, avait fait perdre ses fonctions et son titre pendant dix-huit années consécutives? Il mit fin de lui-même à son professorat, au mois de ' septembre 1900. Il commençait à éprouver une fatigue générale, qui ne laissait pas d'inquiéter ses amis ; et, en effet, sans maladie bien déterminée, il fut obligé de s'aliter au mois de janvier dernier et il s'éteignit le 10 mars. M. Moutard avait été fait Chevalier de la Légion d'honneur le 5 février 1878, Officier le 5 juillet 1888 et Commandeur le 13 juillet 1899. J'ai surtout insisté sur ses qualités de professeur et d'examinateur, parce que ce sont surtout ces qualités qui l'ont fait connaître et qui lui ont donné un rôle important dans l'enseignement des sciences mathématiques. Mais il fut aussi un savant chercheur et on lui doit quelques mémoires reconnus de premier ordre. Je me bornerai à citer les trois plus importants : 1 er Sur la transformation par vecteurs réciproques et sur les surfaces anallagmatiques du 4 e ordre (Société Philomathique, 14 mai et 30 juillet 1864) ; 2 e Rapprochements divers entre les principales méthodes de la géométrie pure et celles de l'analyse algébrique (tome I er des Applications d'analyse et de géométrie du général Poncelet) ; 3e Recherches sur les équations aux dérivées partielles du second ordre à deux variables indépendantes ( Comptes •rendus de l'Académie des Sciences, 20 avril 1870). Un rapport sur ce dernier mémoire fut fait en 1870 par Joseph Bertrand ; mémoire et rapport furent insérés dans le Journal de l'Ecole Polytechnique. Il publia plusieurs autres notes de mathématiques ; mais il n'aima -jamais à rédiger et plusieurs travaux

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restèrent à l'état de calculs sur ses cahiers de notes, d'où l'on pourra peut-être quelque jour les exhumer utilement. Plusieurs fois, il ne se décida à publier, que sur les instances réitérées de ses amis. Il était profondément bon et serviable ; il lui arriva souvent de se mettre en campagne et d'utiliser ses relations politiques, dans le but d'obtenir, en faveur d'un ami ou d'un camarade, une situation ou une distinction qu'il savait méritée, mais pour laquelle un coup d'épaule était nécessaire. M. Moutard avait, je le répète, en même temps qu'une grande intelligence, un cœur excellent et largement ouvert. Une grande loyauté et une droiture sans reproche s'alliaient chez lui à une fermeté de convictions et à un désintéressement, qui lui ont valu de profondes amitiés.