Annales des Mines (1892, série 9, volume 2) [Image 129]

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252 LE GRISOU AUX MINES D'ANZIN. 1810-1892. Il faudra avoir soin aussi de recommander à l'ouvrier de ne

jamais les ouvrir dans un lieu où il y aurait du danger à craindre. « Monsieur Tournelle se charge de procurer l'adresse du marchand à l'agent général pour que l'on puisse augmenter le nombre de ces lampes et se procurer en même temps 3 mètres de tissu d'égale finesse à celui des lampes arrivées afin de pouvoir les réparer ; il sera observé au fournisseur que si ce tissu pouvait être en laiton il serait préférable en ce qu'il résisterait davantage (*) ». Malheureusement l'exécution de cette sage décision rencontra un grave obstacle : la douane française arrêta au passage les lampes Davy et n'en laissa passer que quelques-unes à titre d'échantillon ; la Compagnie parvint à grand'peine à en faire entrer un petit nombre en contrebande par la frontière belge. (*) A la suite de l'explosion de Felling Colliery, en 4812, fonda

en Angleterre, où quatre-vingt-douze hommes périrent, on à Sunderland une association qui se proposait de rechercher les causes de ces calamités et les moyens de les prévenir. Cette asso-

ciation provoqua, pendant l'automne de 1815, la visite de sir Humphrey Davy dans le bassin du Nord de l'Angleterre, visite à la suite de laquelle parut la lampe de sûreté à tamis métallique. Les originesde la lampe de sûreté sont encore discutées en Angleterre; on trouve mention d'une lampe de sûreté inventée, en 1796, par Humbolt. La première lampe essayée souterrainement fut celle inventée par le docteur Clanny, en 1813, et décrite de cette même année. Cet dans les Philosophical Transactions encombrant pour un usage appareil était trop compliqué et trop

Pratique. Avant que sir Humphrey Davy eût amené son invention à maturité, une lampe basée sur des principes à peu près semblables avait été construite et essayée par Georges Stephenson, alors ingénieur de houillères à Killingworth. Les deux lampes différaient en ceci que, tandis que sir Humphrey faisait reposer la sécurité de la lampe sur le principe de l'extinction des flammes passant par des orifices étroits, tels que les mailles d'un treillis métallique, Stephenson pensait qu'en entourant la flamme d'un tube de verre, la sortie des produits de la combustion par le haut empêcherait l'inflammation du grisou. (Extrait du Rapport de MM. Pernolet et Aguillon.)

LE GRISOU AUX MINES D'ANZIN. 1810-1892.

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Cette circonstance fatale ménageait aux mineurs d'Anzin de nouveaux et terribles malheurs. Explosion à la fosse -Saint-Jean, 19 mit 1818 (Huit brûlés). Le 19 août 1818, un porion était descendu avec sept ouvriers de la coupe à terres pour remblayer les tailles de la veine Baleine à la fosse Saint-Jean (*) ; les ouvriers étaient éclairés au moyen de chandelles ; seul, le porion était muni d'une lampe Davy, qu'il ne devait d'ailleurs allumer qu'en arrivant près des fronts.

« A deux tiermes environ des fronts, ce dernier s'aperçut qu'une fenêtre d'aérage était déclouée et laissait échapper de l'air par une issue qui ne convenait pas. Aussitôt il ôte les gants qu'il avait aux mains pour se préserver du grisou et se met en devoir de réparer luimême la fenêtre. Il pose son chandelier sur le palplanche et, s'apercevant que le grisou se montre sur les lumières, il ordonne aux petits galibots de rétrograder pour qu'en cas d'explosion ils ne soient pas exposés. Mais ceux-ci n'avaient pas fait cinq pas que tout à coup l'explosion éclate. La flamme passe à trois reprises sur le corps de ces malheureux qui furent tous les huit assez fort brûlés. « Le porion, ajoute le rapport du vérificateur, n'était pas arrivé au lieu où il. convenait d'allumer la lampe préservatrice qu'il portait, puisque selon moi cela ne devait arriver qu'au delà des fenêtres ». Il est bien évident que ce n'étaient pas les trois lampes achetées par M. Scipion Perier et les quelques lampes soustraites aux saisies de la douane qui pouvaient permettre de modifier l'éclairage des fosses grisouteuses et d'assurer la sécurité des ouvriers. Tant que cette sage réforme ne serait pas généralisée, il fallait s'attendre à voir encore le grisou s'enflammer fréquemment sur les chandelles. (*) La fosse Saint-Jean fut ouverte à Anzin en 1780.