Annales des Mines (1883, série 8, volume 4) [Image 134]

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240 EXPLOSION D'UN BOUILLEUR DANS UNE SCIERIE A BOIS.

EXPLOSION D'UN BOUILLEUR DANS UNE SCIERIE A BOIS. 241

et la pression indiquée par le manomètre n'était que de

sur le bord d'une des tôles. Trois ouvriers, agissant avec une

kilog. Nous pensons qu'il y a lieu d'accepter ces assertions, car

grande barre de fer comme levier, travaillèrent pour augmenter cette déchirure ; elle s'ouvrit d'abord très lentement, puis subitement le métal céda sur une longueur de 15 à 2o centimètres, sans se ployer, et se brisa brusqnement comme une matière cassante. Sur la petite partie de la déchirure qui avait d'abord résisté, le métal montrait du nerf, et, sur le reste, un grain brillant mélangé de très peu de nerf, il paraissait mal soudé et offrait une structure schisteuse. Nous avions donc affaire à un métal de très médiocre qualité : mal travaillé, mal soudé, aigre et cassant. Pour nous rendre compte d'une manière plus précise de la nature du métal, nous fîmes découper, dans diverses parties de la chaudière, un certain nombre de languettes, qui, aux essais par traction, nous donnèrent les résultats

s'il y avait eu abaissement du niveau de l'eau, d'après la disposition de l'appareil, la chaudière seule eût été atteinte,

et s'il y avait eu excès de pression, il en serait certainement résulté dans la marche du mécanisme des anomalies qui auraient attiré l'attention du personnel de l'atelier. Il convient, d'ailleurs, de remarquer que les effets matériels

de l'accident auraient eu alors un tout autre caractère ; sous l'influence d'une pression élevée, les fragments de la chaudière eussent été projetés à de grandes distances, et, tout autour d'elle, les bâtiments rasés au niveau du sol et leurs débris également projetés au loin ; dans le cas actuel,

il y a eu peu de dégâts matériels, et pas de projection, puisque les fragments du bouilleur sont pour ainsi dire retombés sur place, à l'exception du bouchon antérieur qui

a été lancé comme un projectile à la distance relative-.

suivants La limite d'élasticité variait de 22 à 28 kilog., la ténacité

ment faible d'une vingtaine de mètres.

de 26 à 52, et l'allongement de rupture de 1,7 à 5,77

Il faut donc exclure, dans la recherche des causes de cet accident, l'excès de pression, l'alimentation intempestive après un abaissement du niveau de l'eau, puisque le chauffeur était absent et, pour la même raison, une production subite de vapeur, comme il s'en produit quelquefois après une période de repos, lorsque la machine est remise en marche. Les tôles avaient conservé partout leur épaisseur primitive, mais l'examen de leurs surfaces de déchirure attira notre attention par leur aspect grenu et cristallin, qui dénotait un métal de très médiocre qualité ; en outre, dans toutes les parties où les tôles présentaient des bosses un peu fortes, on observait des cassures et des gerçures. Nous fûmes ainsi amené à suspecter la qualité du métal et, pour mieux l'examiner, nous fîmes détacher un fragment qui se trouvait découpé en partie par une déchirure

p. 100. Ces résultats indiquent un métal de résistance ordinaire et possédant très peu d'allongement de rupture, c'est-àdire un métal aigre et cassant. En général, dans les fers et les aciers la limite d'élasticité est très sensiblement la moitié de la limite de rupture ; dans le cas présent, ces deux quantités sont très rapprochées, ce qui dénote un métal fatigué. Ces défauts indiquent nettement la cause de l'explosion la résistance moyenne des tôles, quoique très ordinaire, était largement suffisante pour résister à la pression normale de la chaudière et même à une pression bien supérieure; mais on comprend qu'un appareil soumis à des efforts incessants de contraction et de dilatation et construit avec un métal aigre, peut arriver à se briser, sans qu'il y ait lieu de faire intervenir aucune cause anormale ;