Annales des Mines (1862, série 6, volume 2) [Image 227]

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REVUE DE L'EXPLOITATION DES MINES. 576 chemin de fer. Il reste à, voir aussi s'il se prêtera facilement aux réparations courantes. L'appareil Lisbet (I, considéré au point de vue mécanique, est nouveau sous le rapport du récepteur sur lequel agit la force musculaire de l'ouvrier mineur, et sous celui de l'outil, ou opérateur, que cette force met en jeu. M. Marcellis, de Liège, a imaginé une disposition qui se rapproche de la précédente quant au récepteur, mais qui en diffère en ce que l'opérateur est l'outil ordinaire, c'est-à-dire le fleuret agissant par percussion. Les hommes appliqués à une manivelle communiquent à un arbre à cames, au moyen d'une transmission par courroie, un mouvement de rotation continu; ces cames sont en relation avec une tige qui porte d'un côté le fleuret et de l'autre un piston. Leur action a pour but d'écarter le fleuret du fond du trou, et en même temps de comprimer une masse d'air derrière la face du piston. C'est la compression de cet air qui, au moment où les cames échappent, détermine la percussion du fleuret. Le couvercle contre lequel se fait la compression de l'air est une sorte de piston plongeur, qui peut pénétrer plus ou moins dans le cylindre et donner lieu à un

degré de compression de l'air variable à volonté. Un mécanisme détermine la rotation du fleuret pendant le batage; un autre, le mouvement de progression de tout l'appareil à mesure que le trou s'approfondit ; enfin, un troisième injecte de l'eau dans le trou au moyen d'une petite pompe, pour le tenir constamment nettoyé. Le système du cylindre et du fleuret est mobile autour d'un axe horizontal porté sur une plate-forme mobile elle-même autour d'un axe vertical. Le tout est porté par un chariot qu'on avance sur des rails contre le front à attaquer. Dans les deux appareils ci-dessus la force motrice est toujours la force musculaire de l'homme. Seulement on l'emploie sous une forme autre que dans le travail ordinaire de la massette, forme que l'on a supposée, avec assez de vraisemblance, pouvoir donner lieu à un travail mécanique plus considérable. Mais on a cherché également à remplacer la force de l'homme par un autre agent naturel moins dispendieux et plus puissant. L'application la plus importante qui ait été faite dans ce sens jusqu'à présent est au percement du mont Cenis. (*) On peut consulter sur le perforateur Lisbet les notices insérées au Bulletin

de la société minérale de Saint-Étienne , t. VI et VIT

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577 La force motrice primitive employée est celle des chutes d'eau disponibles aux abords du tunnel, tant du côté de la France que du côté de l'Italie. Cette force est employée d'abord à comprimer de l'air sous une'pression de 5 atmosphères. L'air ainsi comprimé, conduit par des tuyaux jusqu'à l'avancement, sert à son tour de moteur sur des appareils récepteurs dans lesquels il agit exactement comme pourrait le faire de la vapeur fonctionnant sous la même pression effective. L'échappement sert à la ventilation du chantier. Huit appareils fonctionnent à la fois pour faire une galerie directrice de Li mètres sur 3 mètres, que l'on pousse sur cette section réduite aussi activement que possible, et que l'on peut ensuite reprendre en arrière' sur autant de points que l'on veut, pour l'amener aux dimensions définitives. Ce qui donne au percement du mont Cenis un caractère spécial qui a attiré l'attention de tous les ingénieurs et du public, c'est, d'une part, la longueur exceptionnelle du souterrain, qui dépasse 12 kilomètres , et, d'autre part, l'impossibilité où l'on se trouve, par suite du relief du sol, de l'exécuter au moyen de puits de service intermédiaires. Il faut donc faire plus de 6 kilomètres de chaque côté. On s'est préoccupé de ce qu'on rencontrerait vers la partie cen-

trale. Les uns ont craint qu'on ne rencontrât des masses d'eau, d'autres qu'on ne tombât dans des espaces vides, etc. Il est bien évident que ces craintes n'ont pas le moindre fondement. On s'est préoccupé aussi de la ventilation. Comment, a-t-on dit, pourra-t-on porter à 5 ou 6 kilomètres l'air nécessaire aux ouvriers, expulser l'air vicié par la respiration des hommes, la combustion de slampes et la fumée des coups de mines?

On peut répondre qu'il est bien des exploitants de mines, du moins de mines de houille à grisou un peu étendues, qui s'estimeraient fort heureux de ne pas avoir plus de difficultés pour leur

ventilation que n'en présentera le percement dont il s'agit. Une telle mine doit en effet recevoir un plus grand volume d'air; cet air doit circuler dans des galeries toujours beaucoup plus étroites, et fort souvent suivre un parcours total beaucoup plus long. La seule difficulté véritable dont on dût se préoccuper, difficulté plutôt financière ou économique que technique, était celle de la durée de l'exécution. En effet, avec les roches que l'on rencontrera, il parait bien difficile que les méthodes ordinaires de travail, en tenant compte de tous les incidents, puissent faire plus de 200 mètres par an à chaque chantier, soit !Loo mètres en tout, c'est-à-dire une