Lettre sur une séance de l’Académie concernant l’île de Ténériffe. Discussion des mérites de MM Buch et Berthollet ; brouillon [Image 5]

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5/ des trois descriptions que j'ai transcrites, que de la cîme du pic la grande Canarie paraît tout aussi isolée au milieu de la mer que Gomère et Palma, et que par conséquent le canal qui la sépare de Ténériffe se voit tout aussi à découvert que ceux qui séparent Ténériffe de Palma de la Gomère. Ces remarques me paraissent déjà suffire pour montrer que si M. Berthelot s'était rendu compte des effets de perspective que produirait dans le panorama du pic le cirque tel qu'il l'a figuré, il en aurait considérablement modifié les contours ; il en aurait réduit le diamètre dans une proportion considérable. Mais je puis faire remarquer en outre que vus de la mer les effets de perspective déduits de la carte de M. Berthelot ne seraient pas moins contraires à l'état réel des choses. Un navigateur qui se dirigerait vers Ténériffe, en venant du sud, commencerait à apercevoir le pic à 39 lieues de distance, et même un peu plus tôt à cause des effets de la réfraction ; en approchant un peu plus, il devrait, d'après les données de la carte, voir très promptement paraître un peu plus bas le bord du cirque, qui ne lui laisserait jamais voir le pic sur une hauteur de plus de 150 m ; cette pointe visible du pic ne soutendrait jamais à ses yeux un angle de plus de 4 à 5' ; à peine la distinguerait-il des anfractuosités du cirque lui-même. Enfin, arrivé à 18 lieues de distance (54 mètres), il la verrait se cacher derrière le cirque comme derrière un immense paravent. Au lieu de se présenter comme une masse conique s'élevant hardiment du sein des mers, Ténériffe se présenterait comme un immense plateau qui rappellerait aux marins la montagne de la table près du Cap de Bonne-Espérance. On pourrait être tenté de m'objecter que les impossibilités que je viens de signaler ne résultent pas seulement de la forme des contours que M. Berthelot donne au cirque, mais encore de la hauteur qu'il lui assigne. Il porte cette hauteur dans son maximum à 9330 pieds, tandis que M. de Buch ne la porte qu'à 8820. Cela fait à-peu-près 500 pieds, ou 162 m de différence, et on pourrait imaginer que toute l'erreur se réduit à cette différence. Mais si l'on faisait subir une réduction de 162 m aux cotes de hauteur inscrites par M. Berthelot sur les crètes du cirque, les effets de perspective que je viens de signaler subsisteraient encore en grande partie. La tangente menée par la cîme du pic à la surface des mers ne passerait encore qu'à environ 314 m au-dessus des crètes voisines de la Degollada de Veauca ; et le rayon visuel, mené de la cîme du pic à la crète