Annales des Mines (1837, série 3, volume 12) [Image 328]

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JURISPRUDENCE

Chacune de ces formalités est de rigueur ; car il s'agit de priver un propriétaire de la disposition du minerai que

son terrain renferme, de permettre à un autre de venir

exploiter à sa place sur son fonds. Si la loi a donné à l'ad-

ministration, dans l'intérêt public, la faculté de déposséder ainsi de ses droits ce propriétaire, lorsqu'il refuse d'en user comme elle le lui prescrit, elle a voulu aussi, comme cela devait être, prendre toutes les précautions pour qu'il fût averti, et pour qu'il eût le temps de se déterminer et de faire connaître ses intentions. Enfin, elle ne lui interdit nullement de vendre son terrain à un tiers ; et si ce dernier déclare qu'il veut exploiter lui-même, alors il n'y a plus lieu d'autoriser le maître de forges ; car ce n'est que sur le refus du propriétaire, ou après un silence équivalant 4 un refus, que la loi permet de conférer à un tiers la faculté d'exploiter. Il n'en est pas de l'acquéreur

du terrain, de celui qui a acheté la minière et le fonds qui la renferme, comme d'un simple cessionnaire du

droit d'exploitation le premier n'est pas seulement le représentant du propriétaire du terrain., il est devenu le pro-

priétaire lui- même, il en a, par conséquent, tous les

droits ; et dès qu'il annonce qu'il veut effectuer l'extra& fion , c'est comme si le propriétaire primitif avait fait cette déclaration. De même que celui-ci, il sera tenu de

fournir du minerai au maître de forges ; ce dernier n'a donc plus à demander d'être mis à la place du propriétaire.

Le but de la loi est rempli , -puisqu'il y aura exploitation du minerai. Ce n'est qu'au cas où l'acquéreur du

terrain ne tiendrait pas ses engagements, où il n'exploite-

rait pas en quantité suffisante, ou bien s'il suspendait les travaux d'extraction pendant plus d'un mois sans cause légitime, qu'alors le maître de forges pourrait se pourvoir auprès du préfet, conformément à l'article 62, pour obtenir la permission d'exploiter. Ces principes ont reçu leur application de la manière suivante

Le 16 août 1836, M. Dumont, propriétaire de l'usine de Ferrière-la-Grande , dans le département du Nord, informé le préfet de ce département que le propriétaire d'un terrain à minerai, dans la commune de Monceau-Saint-Wast , M. Bertout, refusait de lui laisser continuer l'exploitation qu'il avait entreprise. 11 demandait que l'on

651 enjoignît à M. Bertout d'extraire et de lui livrer le minerai, et qu'a cet effet les notifications lui fussent faites DES MINES.

sans retard. Le préfet a chargé le sous-préfet d'Avesne de faire con-

naître à M. Bertout qu'il eût à déclarer sous huit jours s'il voulait exploiter, à défaut de quoi son silence serait considéré comme un refus, et il serait donné suite à la demande de M. Dumont.

Le 15 septembre, M. Bertout a répondu cluM n'avait fait aucun traité avec M. Dumont ; qu'il n'avait pas néanmoins , l'intention d'extraire lui-même , et qu'il ne s'opposait pas à ce que l'exploitation fût faite par M. Dumont, mais qu'il désirait connaître l'indemnité qui lui serait payée. Le. 22 du même mois, MM. Pillion et Destombes sont devenus acquéreurs du terrain par un acte de vente au-

thentire. Le 2 octobre suivant, ils ont écrit au préfet

qu'ils etaient propriétaires au lieu et place de M. Bertout, et qu'ils se proposaient d'extraire le minerai pour l'approvisionnement des hauts-fourneaux qu'ils avaient demandé à établir.

M. le préfet a pensé que MM. Pillion et Destombes n'étant point encore alors possesseurs d'usines légalement autorisées, et n'annonçant l'intention «extraire que pour

leurs besoins futurs, il n'y avait point "lieu d'accueillir leur déclaration. Il a pris , le 21 décembre 1836 ,. un arrêté par lequel M. Dumont était autorisé à exploiter sur le terrain en question.

Cette décision était irrégulière dans. la forme et au fond.

La lettre écrite au préfet le 16 août 1836 par M. Dumont n'était point une demande explicite pour obtenir l'autorisation d'exploiter à la place du propriétaire ; elle annonçait simplement que ce propriétaire refusait de laisser

continuer l'extraction, et on y demandait qu'une notification fût faite à ce dernier. Cette notification aurait dû avoir lieu par le maître de forges lui-même, et par acte extrajudiciaire ; elle a été faite administrativement. Le propriétaire du terrain avait un mois pour déclarer -