Annales des Mines (1836, série 3, volume 10) [Image 126]

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NOUVEAU PROCÉDÉ 246 feu , et marchait assez bien, quoiqu'il ne fût pas

encore tout à fait arrivé à sa portée de mine. Lorsque nous substituâmes l'air chaud à environ 2800 centigrades, on aperçut une amélioration bien sensible dans la marche du fourneau, et pendant les huit premiers jours les essais avaient on ne peut mieux réussi, la fonte était très-belle et très-chaude, la portée de mine avait toujours été croissant, lorsque tout à coup des chutes se déclarèrent avec une telle intensité, qu'il n'y eut pas moyen de les arrêter ; la mine tamisait et arrivait crue dans l'ouvrage, et le refroidissait en l'obstruant complétement; la tuyère se recouvrait continuellement d'une voûte de scories noires qui, interceptant le vent , le faisaient refluer par le devant du fourneau, qui se trouvait en partie ouvert par le mauvais état de la tympe laquelle, étant toute dégradée, devait être renplacée le lendemain ; aussi

tous les matériaux étaient chassés par-là avec violence, et ressemblaient à un bouquet d'artifice

ou à une éruption de volcan qui empêchait de pouvoir approcher du creuset. Dans cet état de choses, le fourneau n'aurait pu se maintenir deux

heures à l'air froid; plusieurs fois, lorsque la tuyère paraissait tout. à fait éteinte et bouchée,

j'étais parvenu à la ranimer et à la rétablir en bon état, en y faisant projeter de la houille crue ;

mais comme rien ne put arrêter les chutes de mine, qui recommençaient toujours avec plus de

force, et que ce phénomène, qui dura pendant plus de huit heures, ne se serait terminé que quand tout ce que contenait le fourneau aurait été projeté au dehors, il fallut suspendre les charges, puis ensuite arrêter tout à fait. Le propriétaire dans sa mauvaise humeur, assez natu-

DE CARBONISATION.

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relie d'ailleurs, s'en prit à l'air chaud, même à

moi, quoique nous eussions procédé avec la plus grande circonspection et d'un commun accord, et que déjà ces sortes d'accidents se fussent présentés plusieurs fois chez lui pendant qu'il mar-

chait à l'air froid. La cuve, qui avait été faite beaucoup plus large que de coutume, avait été la principale cause déterminante de l'accident; car, pour éviter avec l'air chaud les chutes de mine, il convient de diminuer au contraire les dimensions de la cuve ou d'augmenter les charges à mesure que la portée de mine augmente. Ainsi au fourneau de Lavache (Nièvre), qui appartient à M. le marquis de Vergennes, je suis parvenu à faire cesser des accidents semblables (I), quoique beaucoup moins intenses à la i) Pendant que j'étais à Lavache , un autre accident survint un des engrenages de la roue s'étant brisé, les ouvriers perdirent la tête, et, au lieu de boucher, ils se disposaient déjà à enlever la daine pour faire sortir tous

les matériaux et sauver, disaient-ils, le fourneau, lorsque je fus appelé. Leur faire enlever toute la mine pâteuse du creuset, le remplir de charbon, puis boucher exactement avec du fraisil par en haut et par en bas, monter à cheval, aller prendre la poste à la Charité pour me rendre à Nevers, et y faire mouler un autre engrenage, revenir ensuite en poste, fut l'affaire de quelques heures ; néanmoins le nouvel engrenage ne put être replacé qu'au bout de quatrevingts heures ; aussi les ouvriers, qui n'avaient jamais vu arrêter un fourneau empiétement enminé plus de Ting& quatre à trente heures, le croyaient bien perdu ; et, en effet, lorsqu'on voulut remettre le vent, tout le travail était pris, et il fut impossible de percer les tuyères. Je fis pratiquer alors deux trous à la hauteur des étalages, et y dirigeai le vent ; puis on fraya une petite ouverture sur Je devant en brisant une partie de la tympe ; insensible-