Annales des Mines (1907, série 10, volume 6, partie administrative) [Image 134]

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JURISPRUDENCE.

JURISPRUDENCE.

soutenu dans le cas où les sujétions imposées par l'autorité préfectorale consistent dans des interdictions plus ou moins directes d'exploiter dans une certaine zone le gisement concédé. Cette défense d'exploiter atteint, dit-on. le propriétaire dans son droit de propriété' mémo, car, lorsqu'il s'agit de propriété minérale, le jus atendi consiste exclusivement dans le droit d'exploitation. Ce droit retiré, il y a, quant à la partie à laquelle ce retrait s'applique, violation du droit de propriété et consëquemment droit à réparation. Cette doctrine absolue, qui cadrait fort bien avec la thèse soutenant qu'il y avait, en pareille hypothèse, dépossession partielle et expropriation indirecte, ne saurait-être admise avec la doctrine et la jurisprudence qui ont triomphé. Puisqu'il n'y a pas dôpossession irrévocable, qu'il n'y a. pas transfert do propriété, il ne saurait être question d'expropriation indirect-'. Et, s'il ne peut être question d'expropriation indirecte, il n'y a d'indemnilé possible qu'une indemnité pour dommages résultant d'un travail public, et cette indemnité n'est due que si le dommage remplit certaines conditions. Autrement dit : il y a lieu de faire intervenir ici les principes que votre jurisprudence a si judicieusement établis en matière de dommages causés par des travaux publics. Gr, les dommages, d'après votre jurisprudence, pour donner ouverture à un droit à réparation, doivent être directs et matériels; ils doivent être en outre nésetactuels et non pas seulement futurs et éventuels. Dès lors, le droit à indemnité ne peut se concevoir si les sujétions imposées a. raison du passage d'un chemin de fer au travers d'un périmètre minier s'affectent qu'une partie de ce périmètre non encore soumise à l'exploitation ou dont l'exploitation n'est encore niamoncée, ni même étudiée. Pour cette partie, en effet, il n'y a point encore de dommage direct, il n'y a pas non plus dommage actuel : on ne sait pas si cette partie sera jamais exploitée, on ne sait même pas si elle sera exploitable; on ne sait pas si la voie ferrée n'aura pas disparu avant que l'exploitation, si elle est possible, soit entreprise; on ne sait pas si les progrès dans, le mode d'exploitation ou dans l'art de l'ingénieur ne permettront pas de supprimer ou d'atténuer les sujétions et les interdictions actuelles. Enfin, on est dans l'impossibilité absolue de pouvoir iléterinineruu chiffre d'indemnité qui corresponde à quoi que ce soit de réel. Au contraire, il y aura dommage direct et dommage aclufl lorsque les sujétions imposées à raison: de la traversée de la voie ferrée seront afférentesà despartiesde la concession ouvertes à l'exploitation ou se trouvant, tout au moins, dans le prolongement de

filons déjà attaqués. Dans cette hypothèse, mais dans cette hypothèse seulement,réparation sera due, et il serarelativemenlfacile aux hommes de l'art et aux juges d'arbitrer l'importance du dommaae et de fixer, par suite, le montant de l'indemnité due. Ces principes étant rappelés, voyons si les sujétions imposées aux sls Bayle et de Werbrouck par l'arrêté du préfet de la Haute-Savoie du 10 mai 1.902 ont causé à ces exploitants un préjudice direct et actuel. La Cie Paris-Lyuii-.\Lditerranée le nie. L'arrêté préfectoral, soutient-on pourelle, n'interdit pas formellementd'exploiter lamine dans un périmètre donné; il se borne à imposer aux coucessio.nnaires l'obligation de demander une autorisation préfectorale avant d'exploiter dans une zone déterminée. Les concessionnaires ne pourraient soutenir qu'ils ont subi un dommage que s'ils avaient demandé cette autorisation et si elle leur avait été refusée par -le préfet. Jusqu'alors ils ne peuvent se plaindre que d'une limitation éventuelle de leur droit d'exploitation, limitation qui ne se produira peut-être jamais. — Don.-, dit-on, pas de dommage né et actuel, pas de dommage direct non plus et, par suite, impossibilité matérielle pour les experts commis par le premier juge de se livrer à un travail utile, puisqu'ils ne pourront deviner dans quelles conditions etsous quelles réserves l'exploitation sera limitée par le préfet, lorsqu'une demande lui sera adressée. Cetle argumentation ne saurait être accueillie.Même au moment où le conseil de préfecture statuait, l'arrêté préfectoral du 10 mai 1902 avait causé aux propriétaires de la mine de SainteMarie-de-Fouilly un dommage direct et certain : ceux-ci avaient dû, eu effet, arrêter immédiatement leurs travaux en cours, et cet arrêt l'ut de longue durée, puisque c'est seulement par arrêté du 9 mars 1906 que le préfet a déterminé les conditions auxquelles l'«xploitalion pourrait être reprise dans la zone envisagée. Cet arrêté est ainsi conçu : « Art. I1'. Les concessionnaires des mines de Saiute-Marie-de-Fouilly sont autorisés à poursuivre vers le nord le percement des galeries Espérance, Sainte-Thérèse et Royale, sous la condition de laisser tout à fait intact autour de la surface extérieure du canal de dérivationdes eaux de l'Arve dépendant du chemin de fer Paris-Lyon-Méditerranée un massif vierge de rocher de 10 mètres d'épaisseur dans tous les sens. La galerie Royale pourra, par exception, passer au-dessus de ce canal à une distance minimum de 8 mètres de l'extrados de la voûte du canal, au-dessous de la sole de cette galerie. Lesdites galeries de traçages devront ainsi être di-