Annales des Mines (1896, série 9, volume 5, partie administrative) [Image 309]

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LOIS, DÉCRETS ET ARRÊTÉS

En 1891, le Sénat a chargé une commission de dix-huit membres d'étudier dans leur généralité les modifications à apporter dans la législation et dans l'organisation des services de l'Algérie. Plusieurs rapports ont déjà été déposés au nom de cetLe commission. L'un d'eux, rédigé par M. Jules Ferry, a été consacré à l'examen des conditions dans lesquelles fonctionne le gouvernement général de l'Algérie et de celles suivant lesquelles il conviendrait de le réorganiser. Les conclusions de ce rapport ont été discutées par le Sénat dans ses séances des 25, 26, 29 et 30 mai 1893; elles ont été ratifiées par l'ordre du jour suivant : « Le Sénat, constatant l'accord du Gouvernement et de la commission sur la nécessité de rapporter les décrets de rattachement et de fortifier les pouvoirs du gouverneur général de l'Algérie, conformément aux conclusions du rapport et aux déclarations de la commission, passe à l'ordre du jour. » Dans le courant du mois de novembre 1896, la Chambre des députés, de son côté, saisie de ces mômes questions par l'honorable M. Fleury-Ravarin, a manifesté son sentiment, sur les réformes dont l'exécution était demandée, par le vote de l'ordre du jour ci-après : « La Chambre, approuvant les efforts faits depuis quelques années pour rétablir l'ordre dans l'administration de l'Algérie, convaincue que le système des rattachements édicté par les décrets du 20 août 1881 constitue un obstacle au bon fonctionnement des services publics en Algérie et à la réalisation des réformes, invite le Gouvernement : 1° à rapporter immédiatement ces décrets et à réorganiser la haute administration de la colonie; 2° à déposer sans retard un projet de loi, tant pour constituer le contrôle que pour régler la composition et le fonctionnement du conseil supérieur. » Pour répondre aux intentions manifestées par les Chambres, j'ai préparé un projet de décret que j'ai l'honneur de soumettre à votre signature. L'autorité du gouverneur général de l'Algérie, qui se confondait avec celle du chef de l'armée pendant les premiers temps de la conquête, a été pendant longtemps déterminée et limitée par des dispositions particulières qui ne visaient, que certains services spéciaux. C'est ainsi que les arrèlés du chef du pouvoir exécutif,en date des 16 et 20 août 1848, ont ratUKhé directement aux ministères, à Paris, les services des cultes, de l'instruction publique et de la justice, sauf en ce qui concerne les musulmans. Un arrêté du 12 octobre de la même année a prononcé le même

SDR LES MINES, ETC.

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rattachement pour le service des douanes. Ultérieurement, un décret du f8 décembre 1874 a placé sous l'autorité directe du ministre de l'intérieur les services de l'administration pénitentiaire. Enfin, les décrets des 11 mars et 26 août 188i ont généralisé' l'œuvre des rattachements en plaçant sous la direction immédiate des ministres les services qui relevaient encore du gouverneur général. Il a paru au Parlement et au Gouvernement que l'expérience a révélé les inconvénients de cette organisation. Conformément aux résolutions des Chambres, l'article lor du projet de décret porte abrogation des décrets des 11 mars et 26 août 1881 ; il a paru sans inconvénients de rapporter également le décret du 18 décembre 1874, relatif à l'administration pénitentiaire. Cette abrogation impose au Gouvernement l'obligation de faire revivre les dispositions qui régissaient avant 1881 la haute administration de l'Algérie, et de déterminer, avec autant de précision que le comporte un texte d'ordre aussi général, le rôle et les attributions du gouverneur général. A cet effet, le décret rappelle tout d'abord le mode de nomination du gouverneur général; il pose ensuite le principe que le gouverneur général représente en Algérie le Gouvernement de la République, qu'il centralise sous son autorité le gouvernement et la haute administration de l'Algérie et qu'il a droit de préséance sur tous les fonctionnaires civils et militaires (art. 2 et 3). Les attributions du gouverneur général, en ce qui concerne les services militaires, font l'objet de l'article4.Elles sonten principe les mêmes que celles existant actuellement; mais il a semblé indispensable de prévoir l'éventualité, jusqu'à présent négligée, de mesures nécessaires à la sûreté intérieure ou à la défense de l'Algérie. Dans cet ordre d'idées, le décret dispose que le gouverneur général agit de concert avec le commandant en chef du 19e corps et le contre-amiral commandant la marine, et qu'en cas de dissentiment il en réfère au Gouvernement ou, s'il y a urgence, requiert l'exécution des mesures qu'il juge utiles. Aucune disposition n'avait jusqu'ici réglé le rôle du gouverneur général dans les questions qui naissent de la situation même de l'Algérie et de la nature de ses populations sur les frontières du Maroc ou de la Tunisie et dans le Sahara. Cette lacune est comblée; à l'avenir le gouverneur général correspondra directement avec le ministre de France au Maroc et avec le résident général de France à Tunis ; mais il ne pourra engager d'action poliLique ou diplomatique qu'avec l'autorisation du Gouvernement.