Annales des Mines (1889, série 8, volume 8, partie administrative) [Image 125]

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son arrêté un texte incomplet ou une disposition législative non applicable, ils avaient à rechercher si l'arrêté préfectoral ne trouvais pas une base légale dans tout autre texte régissant la matière; Attendu que l'arrêté du 7 mai 1887 était, en réalité, suffisamment fondé sur les dispositions du décret du 28 mai 1873 spécial aux carrières pour le département de la Dordogne, lequel décret a visé le cas de péril imminent et a réglé le mode de remboursement des frais avancés par l'administration pour sauvetage (voir article 28 de ce décret) ; Attendu que le sr Imbert, après avoir objecté que ce décret n'avait pas été régulièrement publié dans le Bulletin des Lois, reconnaît aujourd'hui que cette publication a eu lieu dans le n° 593 de la partie supplémentaire; Attendu, d'ailleurs, qu'en dehors de ce décret, les autresdispositions législatives invoquées par l'administration étaient également applicables à l'espèce actuelle; qu'en effet, la loi de 1810, le décret du 3 janvier 1813 et l'ordonnance du 26 mars 1843 sont relatifs aussi bien aux carrières souterraines qu'aux mines elles-mêmes; Attendu que ces dispositions exigent qu'aussitôt après un accident arrivé dans une mine ou usine, l'autorité administrative prenne conjointement avec l'ingénieur des mines, toutes les mesures convenables pour faire cesser le danger et en prévenir les suites, fasse des réquisitions d'outils, de chevaux ou d'hommes,et donne tous les ordres nécessaires; l'exécution des travaux devant avoir lieu sous la direction de l'ingénieur ou du conducteur; Attendu que ces prescriptions sont justifiées par la nécessité d'agir avec une extrême urgence et pour parer à un péril pressant; Attendu que le sr Imbert s'efforce d'échapper à ces textes si précis en soutenant qu'on doit se conformer à une procédure spéciale. Qu'ainsi l'ingénieur doit, tout d'abord, adresser aux autorités administratives des réquisitions écrites au vu desquelles lesdites autorités feront seules les mises en demeure aux ouvriers; Attendu qu'il faut remarquer d'abord que la loi ordonne de prendre ces mesures conjointement; mais qu'il faut surtout envisager que ces réquisitions écrites de l'ingénieur ne sont nécessaires qu'au cas où l'autorité administrative est absente ou refuse son concours, et qu'elle n'ont plus d'utilité lorsqu'un préfet ou un maire assiste, au début même du sinistre, et assume par sa présence sur le théâtre de l'accident, la responsabilité des travaux de sauvetage; Attendu qu'il est certain, dans l'espèce actuelle, que M. le préfet de la Dordogne s'est rendu immédiatement à Chancelade, et

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a dirigé le sauvetage conjointement avec les ingénieurs, que vainement le sr Imbert invoque une attestation par laquelle M. le maire de Chancelade déclarait n'avoir pas reçu de réquisition puisque la présence du préfet sur les lieux sauvegardait pleinement les droits de l'administration; Attendu enfin que le sr Imbert objecte que rien ne démontre en quelle partie des carrières exploitées par lui-même ou par le sr Chaigneau, ont été tués les ouvriers, et qu'on ignore même s'ils ont succombé à la suite d'une asphyxie ou du choc des éboulemcnts, mais qu'il suffit de constater que parmi les quatorze victimes de l'accident plusieurs étaient des ouvriers du sr Imbert, employés par celui-ci à l'exploitation de sa carrière, au moment où elle s'est effondrée. Sur la solidarité; Attendu que l'administration réclame la somme de 6.862f,85 comme lui étant due solidairement par les s" Chaigneauet Imbert; Attendu que ce dernier proteste contre cotte solidarité qui par suite de la solvabilité fort douteuse du sr Chaigneau l'exposerait à supporter seul les suites de la condamnation ; Attendu que la solidarité ne saurait exister de plein droit; qu'elle ne résulte dans l'espèce, ni d'une convention puisque Imbert et Chaigneau n'étaient pas associés, ni d'un délit puisque poursuivis l'un et l'autre pour homicide par imprudence, ils ont été acquittés par le tribunal correctionnel de Périgueux; qu'on ne saurait, non plus, le faire résulter d'un quasi-délit, puisque le sinistre a pu provenir d'un cas de force majeure; Qu'ainsi, la somme réclamée par l'administration ne peut être due par Imbert que pour une moitié seulement; Par ces motifs ; La Cour rejette l'intervention de M. le préfet de la Gironde èsqualité comme non recevable; Et faisant droit, au contraire, à l'appel du sr Rey en la qualité qu'il agit, réforme le jugement du tribunal civil de Périgueux du 31 décembre 1887. Déclare valable le commandement fait à la requête du sr Rey et autorise ce dernier à y donner suite; Mais dit et ordonne que le sr Imbert n'est tenu que pour moitié dans la somme principale de 6.862',85. Condamne le préfet delà Gironde, ès-qualités, aux frais de son intervention; condamne Imbert aux dépens faits par le srRey contre ledit Imbert personnellement. Ordonne la restitution de l'amende. DÉCRETS,

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