Annales des Mines (1885, série 8, volume 4, partie administrative) [Image 145]

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LOIS, DÉCRETS ET ARRÊTÉS

CHEMINS DE FER. — CODE DES SIGNAUX ÉCHANGÉS ENTRE LES AGENTS DES TRAINS ET LES AGENTS DE LA VOIE OD DES GARES.

RAPPORT AU MINISTRE DES TRAVAUX PURL1CS Paris, le 14 novembre 188S. Monsieur le Ministre, Parmi les questions que soulève l'exploitation technique des chemins de fer, l'une des plus graves et des plus importantes, l'une de celles qui intéressent le plus directement la sécurité publique, est sans contredit celle des signaux. Dès que le réseau national a commencé à se développer, l'attention de l'Administration s'est fixée sur les inconvénients que pourrait avoir la diversité des appareils optiques ou acoustiques employés par les différentes compagnies, notamment pour indiquer l'état de la voie aux agents des trains. Le premier document officiel qui porte la trace de cette préoccupation est le rapport de la commission d'enquête instituée en 1857, à l'effet d'étudier « les moyens de garantir la régularité et la sûreté de l'exploitation des chemins de fer ». On y trouve exprimé, avec toute l'autorité qui s'attache aux remarquables travaux de cette commission, le vœu « que les compagnies adoptent, pour tout ce qui concerne la sécurité publique, une espèce de langue universelle, des signes identiques parlant aux yeux de tous et qui, rapidement compris et appris même par les personnes étrangères aux chemins de fer, pourraient prévenir de nombreux accidents, surtout aux passages à niveau et aux stations ». Malgré cet avis, les compagnies ont continué k mettre chacune en usage les signaux qu'elles considéraient comme remplissant le mieux les conditions requises, et l'Administration n'a pas cru devoir, en l'état, leur imposer une unification d'autant plus difficile que l'industrie de l'exploitation des chemins de fer était encore en pleine voie de transformation. Les funestes événements de 1870-1871 ayant mis en lumière le rôle considérable des chemins de fer au point de vue des opérations militaires, l'opinion publique s'est émue des dangers que la variété des signaux pourrait susciter pour la défense na-

SUR LES MINES, ETC.

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tionale, et l'uniformisation lui est apparue, sinon comme une nécessité absolue, du moins comme une mesure de sage prévoyance, non seulement pour les transports en temps de paix, mais encore et surtout pour les transports en temps de guerre. Toutefois l'Administration a continué k reculer devant les difficultés qui l'avaient jusqu'alors arrêtée ; elle a cru devoir se borner k uniformiser les signaux et les règles concernant la circulation des trains pour les transports stratégiques k effectuer au delà de la base d'opérations : un ordre de service a été arrêté dans ce but, conformément à l'avis de la commission militaire supérieure des chemins de fer, et annexé au règlement du 1" juillet 1874 sur les transports militaires. En 1882, la question a été portée devant le Parlement. MM. Delattre et de Janzé et plusieurs de leurs collègues ont déposé sur le bureau de la Chambre des députés une proposition de loi relative k « la sécurité publique dans les chemins de fer ». Les honorables auteurs de cette proposition concluaient, dans les termes les plus pressants, a mettre les compagnies en demeure de rendre leurs signaux identiques, afin de permettre, le cas échéant, de faire passer les agents d'un réseau sur l'autre, sans courir les risques d'erreurs et d'accidents redoutables. Le comité de l'exploitation -technique a été consulté k cet égard. La diversité des signaux adoptés sur les différents réseaux ne lui a pas paru présenter des inconvénients aussi grands qu'on était porté a le croire au premier abord. 11 n'en a pas moins conclu a l'utilité de compléter l'uniformisation de leur langage, en leur attribuant une seule et même signification pour une apparence ou un son déterminés. Appelé a se prononcer k son tour, le Conseil d'État a, dans sa séance du 9 avril 1884, émis l'avis « qu'il pouvait être utile d'unilormiser les règles relatives au langage des signaux, tout en laissant aux compagnies, en ce qui touchait les conditions de construction et de manœuvre des appareils, la liberté indispensable au progrès ». Il a fait, en outre, remarquer que, dans l'étaactuel de la législation, l'Administration avait les pouvoirs nécessaires; qu'il s'agissait de mesures appartenant, parleur nature, au domaine du pouvoir exécutif, dont il importait, en cette matière, de ne pas amoindrir le rôle et les prérogatives; et que, dès lors, il n'y avait pas lieu de recourir k une loi. Les conclusions du Conseil d'État concordaient avec celles du comité d'exploitation technique. Les unes et les autres ne tendaient toutefois qu'a l'uniformisation du langage des signaux.