Annales des Mines (1883, série 8, volume 2, partie administrative) [Image 46]

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JURISPRUDENCE.

plus de sa concession la partie en amont de cette clôture, en leur abandonnant en retour la propriété des schistes qu'elle renferme et le droit de les exploiter ainsi qu'ils l'entendront. Ces conclusions qui s'appuient sur l'autorité d'ailleurs considérable du rapport des experts ne sauraient cependant être juridiquement admises. En effet, le droit à une indemnité calculée sur ces bases ne pourrait être dès à présent acquis à Hubinet qu'autant qu'il y aurait pour lui impossibilité constatée de reprendre et remettre à profit les travaux continués par les consorts Battault, que cette partie du gisement serait entièrement perdue pour lui et qu'il serait dans la nécessité absolue de la leur abandonner, sauf à ceux-ci à en tirer tout le parti que bon leur semblerait. II. En ce qui concerne d'abord l'invétison : i° Dans l'hypothèse même de la nécessité de cet abandon qui est celle sur laquelle les experts ont assis leur raisonnement et leurs calculs, on ne rencontre pas de motifs suffisants pour ordonner, quant à présent du moins, l'invétison tracé par eux pour frapper d'indisponibilité la portion de matière minérale qui serait affectée à cette clôture et pour considérer cette matière comme entièrement perdue pour Hubinet. En effet, aucune loi ne prescrit aux exploitants voisins d'immobiliser entre eux dans le gisement qu'ils fouillent un massif minéral où devront s'arrêter leurs travaux ; il est d'ailleurs inexactd'assimiler l'invétison ou espontè à la clôture ordinaire toujours nécessaire pour établir une séparation effective entre deux propriétés contiguës à la surface du sol ; dans la propriété souterraine cette clôture existe ipso facto, le travail de l'homme consistant à faire le vide dans le plein, d'où il suit que la nécessité de l'invétison n'apparaît que lorsque les exploitations deviennent en fait assez rapprochées pour qu'il y ait lieu d'aviser aux inconvénients et aux dangers que pourrait entraîner une trop grande proximité des travaux d'avancement. Cette doctrine ressort de la manière la plus évidente de l'article 45 delà loi du ÏI avril 1810, cet article disposant en prévision des dommages que deux exploitations voisines peuvent se causer l'une à l'autre, se borne à étendre, au fait même légitime du propriétaire qui travaille chez lui, la responsabilité de l'article i382 du Code civil lorsque par ce fait les eaux se déversent d'une mine à l'autre; l'invétison est en pareil cas le moyen le plus naturel peut-être et le plus souvent employé pour éviter ces responsabilités réciproques. Mais il n'est alors qu'un mode facultatif réglé à

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l'amiable entre les parties selon leurs convenances, dans le but de s'affranchir mutuellement des éventualités prévues par l'article 45 de la loi du 21 avril 1810. Dans l'instance actuelle ces éventualités n'existent pas; en fait et quant à présent la partie exploitée par Hubinet est à une grande distance des galeries de Duverneetdes consorts Battault. Il faut il est vrai reconnaître que l'utilité d'un invétison pourrait se produire d'un moment à l'autre par la volonté d'Hubinet ou de ses successeurs et par l'usage légitime de leur droit, s'ils portaient leur exploitation dans cette partie de la concession ou à raison delà qualité supérieure des schistes découverts, elle semblerait la plus fructueuse, mais il n'y a pas à régler quant à présent des difficultés qui pourraient surgir d'une situation qui n'est pas née, qui n'est encore qu'à l'état de possibilité; dès lors, on ne saurait juridiquement considérer comme acquise dès aujourd'hui et irrévocablement l'indemnité représentant la valeur industrielle après distillation des substances minérales qui formeraient ce massif éventuel d'invétison. a" Il y a lieu de se placer en dehors de cette hypothèse et l'abandon de cette partie de la concession d'Hubinet n'étant pas nécessaire par les considérations qui seront indiquées tout à l'heure, c'est surtout par ce dernier motif que l'invétison doit être rejeté. III. En ce qui concerne l'indemnité allouée à Hubinet pour la valeur des massifs compris entre les galeries des consorts Battault: On ne peut contester en principe que l'exploitation d'une mine par galeries n'en diminue pas seulement les ressources de la quantité correspondant au vide laissé dans les galeries mais qu'elle l'affecte encore par les réserves nécessaires à la solidité des tranchées et à la sécurité du travail. Mais les experts ont pris soin de défalquer de leurs calculs cette portion nécessairement indisponible pour tout exploitant qui constitue le déchet de l'exploitation, qu'Hubinet lui-même devrait laisser intacte tout aussi bien que les consorts Battault et qu'ils évaluent au quart des massifs intermédiaires entre les travaux litigieux. C'est seulement sur les trois quarts restants qu'ils ont évalué l'indemnité due à Hubinet a la condition par lui d'en abandonner l'exploitation aux consorts Battault. Mais non seulement il ne ressort du travail des experts aucun motif de faire aux parties une situation qui ne leur est pas imposée par la nature et par la force des choses, mais ils ont eu le soin de constater dans divers passages de leur rapport la beauté de ces