Annales des Mines (1879, série 7, volume 8, partie administrative) [Image 77]

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JURISPRUDENCE.

n'établit le droit à l'indemnité qu'à l'égard des dommages dont la responsabilité incomberait également à toute personne pour les mêmes faits en vertu de l'article 1082 du code civil. Si la jurisprudence rend le concessionnaire de la mine responsable du tarissement des puits ou sources existants à la surface du terrain sous lequel des travaux sont exécutés, la raison en est dans la constitution artificielle des deux propriétés distinctes, de la superficie et du tréfonds, qui établit entre l'une et l'autre des rapports nécessaires très différents de ceux qui existent entre deux héritages situés l'un à côté de l'autre, et dès lors aussi des obligations réciproques. Dans ce cas, le concessionnaire qui travaille dans le tréfonds, de même qu'il doit prendre des mesures pour ne point ébranler les constructions qui sont à la surface et commet une faute s'il manque à cette obligation, de même doit veiller à ce que ses travaux ne fassent pas disparaître les eaux qui alimentent le puits du propriétaire qui lui est immédiatement superposé, et, en ne le faisant pas, il encourt la responsabilité de sa faute. Il en est tout autrement lorsque, entre le fonds sur lequel les travaux sont exécutés et la surface où existe la source ou le puits, il n'y a aucune corrélation; dans ce cas, ces eaux ne sont, d'après le droit commun, pour le propriétaire, qu'un avantage accidentel, dont il peut être privé parles fouilles pratiquées dans la propriété voisine. La concession de la mine ne doit pas améliorer la situation du propriétaire de la surface et lui donner, sur l^s eaux qui lui viennent en passant par le fonds voisin, un droit plus étendu que celui qu'il avait avant la concession. Il est vrai que le voisinage d'une mine peut être plus incommode que celui d'une propriété ordinaire, mais il appartient au législateur et non au juge de prendre cette circonstance en considération. Si la loi spéciale est muette, le juge ne peut appliquer que le droit commun écrit aux articles 552, I382 du code civil. Pour déclarer, dans l'espèce, la compagnie responsable, le premier juge s'est fondé sur une interprétation erronée de l'article i5 de la loi de 1810, condamnée par l'arrêt de la cour de cassation du 12 août 1872 (*).

(') Supra, p. i39.

JURISPRUDENCE,

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OCCUPATION DE TERRAINS PAR UN CONCESSIONNAIRE DE MINES. — DOMMAGES. — INDEMNITÉS DUES AU PROPRIÉTAIRE SUPERFICIAIRE.

I. Jugement rendu, le 3o juin 1876, par le tribunal civil de Fontenay-le-Comte (affaire DE LÉPINERATS contre BALLY). (EXTRAIT.)

De Lépinerays est propriétaire, dans la commune de FaymoreauPuy-de-Serres, d'un château, avec parc d'une contenance de 90 hectares environ. Les consorts Bally, concessionnaires de l'exploitation de la mine de houille de Faymoreau, qui comprend dans son périmètre une partie du parc de Lépinerays, ont fait, depuis i865, divers travaux de mine sur les terrains qui font partie du parc. Pour satisfaire aux prescriptions de la loi, les consorts Bally offrirent à de Lépinerays une indemnité de 1.000 francs pour tous dommages causés de i865 à 1866. De Lépinerays refusa d'accepter cette indemnité, comme étant insuffisante, et forma une demande en payement de 63.000 francs pour indemnité, sans préjudice des dommages postérieurs. Par un jugement du 20 juillet 1866, confirmé sur appel, le tribunal, joignant les deux demandes en validité d'offres et en payement d'indemnité, [a déclaré que de Lépinerays avait droit, non seulement à l'indemnité réglée par l'article Uô de la loi de 1810, pour privation du revenu des terrains occupés, mais encore à la réparation de tous dommages directs et matériels causés à sa propriété, par suite soit de faits dommageables, soit de la mauvaise direction des travaux ou d'une faute quelconque des concessionnaires. Pour évaluer ces dommages et préjudices, trois experts ont été désignés par le tribunal. Le rapport d'expertise ayant été déposé, les parties en cause reviennent aujourd'hui devant le tribunal pour faire statuer sur les conclusions de ce rapport. Les experts affirment, il est vrai, avoir tenu compte, dans leur procès-verbal, de tous les dommages et dégâts commis par les exploitants, et les avoir évalués intégralement, conformément aux prescriptions de la loi, c'est-à-dire la privation de jouissance au double, en conformité des termes de l'article 43 de la loi de 1810, et les autres dommages au simple, suivant le droit commun. De Lépinerays conteste que les experts aient tenu compte de tous les dommages causés et que les indemnités qui lui ont été allouées soient la réparation suffisante du préjudice qu'il a subi.