Annales des Mines (1878, série 7, volume 7, partie administrative) [Image 85]

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JURISPRUDENCE. JURISPRUDENCE.

à part, les tribunaux ne peuvent jamais connaître que du règlement des indemnités. L'ordonnance rendue sur conflit, le 5 décembre 18/46 (*), dans l'affaire Fogle, la première de cette nature dont le conseil d'État ait eu à connaître, a parfaitement défini les limites de la compétence des tribunaux. Une jurisprudence constante du conseil d'État et de la cour de cassation met aujourd'hui hors de cause cette distinction fondamentale entre les compétences. Ainsi, en vertu du principe de la surveillance administrative sur les mines, une autorisation de l'administration est nécessaire pour que le concessionnaire puisse effectivement profiter du droit d'occupation qui résulte implicitement pour lui des articles ùôet hk delà loi de 1810. C'est à dessein que nous disons que c'est de la loi que le concessionnaire tire le droit d'occupation. Plusieurs arrêts du conseil d'État mentionnent, en effet, ce droit comme résultant de l'acte de concession. Il y a là une confusion, sinon une erreur de rédaction. Il est bien évident que l'acte de concession ne peut rien octroyer en pareille matière, surtout à rencontre du propriétaire superficiaire, en dehors des droits créés par la loi elle-même. L'acte de concession ne donne qu'une chose au concessionnaire, la faculté de se prévaloir de ces droits, le cas échéant. A ces considérations, qui établissent la nécessité d'une autorisation, on ne peut être tenté d'opposer l'avis du conseil d'État, du 12 avril 1859 (**), substituant, en matière d'ouverture de travaux de mines, de méthodes d'exploitation ou d'aménagements souterrains, le système de la simple déclaration, avec droit de veto pour l'administration, au système préexistant de l'autorisation préalable. Les cas que vise l'avis précité et celui qui nous occupe ne sont pas du tout comparables. On conçoit parfaitement que, pour tous travaux à faire dans le tréfonds à lui concédé, l'exploitant puisse se mouvoir dans son propre domaine, sous le système plus libéral de la déclaration au lieu de celui de l'autorisation préventive. Mais, lorsqu'il s'agit d'occuper des terrains de la surface, le concessionnaire sort de son domaine naturel, pour empiéter sur celui du propriétaire. Donc une autorisation administrative est nécessaire. C'est du préfet évidemment qu'elle doit émaner, puisque c es à lui qu'ap-

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partient en premier ressort, en vertu de l'article I17 de la loi de 1810, la direction de la police souterraine. Cela n'a jamais été sérieusement contesté. Dans l'affaire Galtand contre mines deSeyssel, jugée par le décret au contentieux du 22 août i853 (*), on avait bien avancé que c'était au conseil de préfecture qu'il appartenait de délivrer de pareilles autorisations, si peu soutenable que fût une opinion qui confondait le contentieux avec l'administration. Le conseil d'État n'a pas manqué de répondre à cette prétention « qu'aucune loi n'a chargé, soit les conseils de préfecture, soit les tribunaux, d'autoriser l'occupation des terrains nécessaires à un concessionnaire de mines ». Par suite de la lacune que nous avons signalée dans le texte de la loi de 1810, en ce qui concerne l'autorisation administrative, on ne trouve naturellement pas, explicitement formulée en cette matière, l'obligation toujours imposée à l'administration en cas analogues (articles 10 et 80, par exemple), d'entendre le propriétaire superficiaire, avant de statuer au fond. Seulement le ministre, toutes les fois qu'il a eu occasion de connaître de pareilles ■ affaires, sur recours interjeté devant lui, n'a jamais manqué, quand cela n'avait pas été fait, de rappeler aux préfets et aux ingénieurs que cette formalité ne devait point être omise. Dans le silence de la loi, elle n'est pas de droit étroit sans doute; mais les convenances et l'équité prescrivent de l'accomplir ; c'est bien le moins qu'on puisse faire en faveur de celui que l'on va priver de l'usage desa propriété souvent pour un temps indéfini. Le caractère, en droit, de l'acte d'autorisation qui intervient en faveur d'un concessionnaire, découle naturellement des observations qui précèdent et a été formellement reconnu par toute la série des décisions contentieuses que les Annales reproduisent. C'est un acte administratif pris par le préfet, en vertu des pouvoirs de police qui lui sont dévolus par la loi; cet acte peuftoujours être déféré au ministre, en tant que supérieur hiérarchique du préfet; le ministre pourra approuver ou réformer, en tout ou en partie, la décision préfectorale. Mais, devant le conseil d'État, il ne pourra pas être formé de recours par la voie contentieuse ; la décision, qu'elle émane du préfet ou du ministre, ne pourra être attaquée que comme entachée d'excès de pouvoirs. On sait l'importance pratique d'une pareille distinction. Le conseil d'État ne peut connaître d'un recours contre de tels actes comme juge d'ap-

(') 2° volume de 1846, p. 851. (**) Volume de 1876, p. i36. (*) Volume de 1877, p. 387.